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| Partage des cadeaux - Event de Noël 2012 | |
| Auteur | Message |
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Fexatsyn Miroï Disciple de l'Ombre et Rêveuse à temps plein
Messages : 425 Date d'inscription : 17/06/2012 Age : 31 Localisation : A la fois nulle part et partout.
| Sujet: Partage des cadeaux - Event de Noël 2012 Jeu 29 Nov - 0:53 | |
| C'est ici que, entre le 25 décembre et le 15 janvier inclus, vous posterez vos cadeaux, en n'oubliant pas le formulaire si c'est une fiction, et en mettant bien en évidence le nom de la personne pour qui est adressé ce que vous aurez fait. Liste des participants :=> Laemia, qui offre à... => CrimsonThirteen, qui offre à... => Tonaari, qui offre à CrimsonThirteen => Lunastrelle, qui offre à Plume d'eau Partie 2 => Plume d'Eau, qui offre à Shiro-chan37 Partie 2=> Shiro-chan37, qui offre à Laemia=> Mia Suzuki-sama, qui offre à Lunastrelle (cette table des matières sera actualisée au fur et à mesure des postages) |
| | | Amestri Tueuse de M&M's
Messages : 2095 Date d'inscription : 24/06/2012 Age : 26 Localisation : Paumée quelque part entre Twilight Town et Destiny Islands
| Sujet: Re: Partage des cadeaux - Event de Noël 2012 Mar 25 Déc - 13:10 | |
| Titre : Noël, c'est cool Monde : AU Genres : Humour, Romance Personnages : Riku, Vanitas, Sora, Kairi, et mention d'autres personnages Pairing : Vaniku (Yaoi) Statut : Complet Disclaimer : Dans le monde parallèle où je vis, Kingdom Hearts appartient aux fangirls, et non pas à Square Enix Raiting : T Résumé : Noël, c'est cool, à condition que votre chieur de meilleur ami vous fiche la paix pour la journée. Remarque : Donc, nous y voilà, mon cadeau de Noël ! Ce n'est pas un pairing sur lequel j'ai l'habitude d'écrire, mais j'aime beaucoup en lire, aussi j'espère que ça plaira. Et donc, comme le veut la coutume en ce merveilleux jour : Joyeux Noël LAEMIA ! J'espère que tu aimeras ce cadeau, et que si ce n'est pas le cas, tu diras qu'il te plaît quand même Hum , bref, bonne journée et bonne lecture ! Noël, c'est cool - « Riku, lèves toi ! » Je ne sais pas quel est l'imbécile qui a eu la bonne idée de gueuler ainsi mais une chose est sûre : cette personne n'en a plus pour très longtemps. Nous sommes en vacances, il n'y a donc strictement aucune raison à ce que quelqu'un vienne me réveiller à 10 heures du matin. C'est bien trop tôt putain ! Impossible de me rendormir à présent, autant aller étrangler sans attendre le crétin qui me lance un regard narquois depuis la porte de ma chambre. - « Merde Van, est-ce que tu as la moindre idée de l'heure qu'il est ? » - « L'heure de te lever et de venir nous aider à décorer le sapin. » Parce que c'était aujourd'hui ? Sérieux, on est quatre à être restés à l'internat pour les vacances de noël, Maître Eraqus avait vraiment besoin de décorer la grande salle ? . - « Et dépêches toi, on attend plus que toi ! » Apparemment oui. C'est sans aucune motivation que je m'extirpai des couvertures bien chaudes et cherchai du regard quelque chose à me mettre sur le dos. Un pull et un bête jean feraient parfaitement l'affaire. Ce n'est qu'une fois en boxer que je remarquai un détail pourtant plutôt frappant. - « Ca va, je ne te dérange pas trop ? » - « Pas du tout, continues je t'en prie. » Trop aimable, vraiment. Question bizarrerie, je dois dire qu'on fait très fort dès le réveil. Mon chieur de meilleur ami qui se rince l'œil à mes dépends, c'est tout de même assez insolite. - « Et elle en penserait quoi ta blonde si elle te voyait ? » demandai-je en cherchant une paire de chaussettes. - « Ventus ? Ben rien du tout, on est plus ensemble. » J'ai dû manquer un épisode là. - « Comment ça ? » - « Ben on est plus ensemble quoi, je l'ai largué juste avant qu'il ne retourne dans son monde. » - « Bonjour le cadeau de noël… Et sinon, il y a une raison particulière à cela ? » - « Non, il me saoulait c'est tout. Son frangin ne m'aime pas en plus. » Tu m'étonnes. Un type joueur et manipulateur comme Vanitas, bien sûr que Terra ne l'aime pas. - « Et comment il l'a pris ? » continuai-je. - « Bien. Il savait que ce n'était pas très sérieux de toute façon. Bon, tu viens ? » Je le suis sans ajouter un mot. Bizarrement cette nouvelle me met de très bonne humeur, sans aucune raison apparente. Etre tiré du lit si tôt devait avoir des effets néfastes sur ma santé mentale. Nous arrivons rapidement à la cuisine, où Sora a déjà pris le pot de nutella en otage, et n'a pas l'air de vouloir le lâcher. Il le faudra bien pourtant, j'ai faim moi. - « Ah, quand même ! Je ne sais pas comment tu fais pour dormir aussi tard, Riku ! » - « C'est juste toi qui te lèves trop tôt. » rétorquai-je. Tout le monde ne peut pas être une indomptable pile électrique. Ne vous méprenez pas, j'adore Sora comme si c'était mon petit frère, mais son optimisme et sa bonne humeur continuelle me laissaient souvent perplexe. C'est dommage qu'il étudie avec Maître Eraqus, j'aurai bien aimé être avec lui. Parce que Vanitas plus le vieux Xehanort six jours sur sept, ça tape légèrement sur le système à la longue. Allez, plus qu'une année à tenir et je passe mon symbole de Maîtrise ! O joie. - « Bonjour tout le monde ! » Je grimace. Mon Dieu, mais comment peut-on avoir une voix aussi aiguë et désagréable ? En s'appelant Kairi bien sûr. La rousse part directement s'asseoir aux côtés de Sora mais est totalement ignorée, Vanitas étant en grande conversation avec son petit frère. Eh oui, ils sont jumeaux. Paraît que ça se voit au niveau de l'apparence, mais c'est une toute autre histoire côté caractères. Hum, bref. Je me sers une tasse de café bien noir et demande : - « Au fait, il est où le vieux ? » Parce que oui, nous ne sommes pas laissés à nous mêmes pendant deux semaines, pauvres petits adolescents en manque d'affection que nous sommes. C'est Xehanort qui est sensé nous avoir à l'œil, mais on ne le voit pas souvent. Je le soupçonne fortement d'aller draguer les sirènes à Atlantica, mais je ne pourrai malheureusement jamais rien prouver. Vanitas hausse les épaules. - « Aucune idée. On s'en fiche, non ? » - « Certes. » Kairi sembla vouloir ajouter quelque chose, mais elle fut couper dans son élan par un couloir obscur. Alors que nous attendons que Maître Xehanort montre le bout de son nez, une enveloppe sort sans un bruit du passage, qui se referme aussitôt. Sora s'en empare, l'ouvre et nous lit la courte missive : - « Je serai absent toute la journée. Faîtes ce que bon vous semble, mais je ne veux pas entendre parler de vous. Compris ? » Ca a le mérite d'être clair. Bon ben je vais me recoucher moi. J'ai à peine atteint la porte que Vanitas se plante devant moi, un sourire mauvais aux lèvres. - « Où vas-tu Riku ? Le sapin ne va pas se décorer tout seul à ce que je sache. » Je vais le tuer, lentement, morceau par morceau… oooOOOooo - « Riku, arrêtes de faire la tête et sors les guirlandes du carton s'il te plait ! » s'exclama Sora. Je pousse un long soupir. Une fois mon ami parti, impossible de l'arrêter : son côté gamin reprend le contrôle. Je remarque également vaguement Kairi qui essaye d'attirer son attention en prenant des poses assez suggestives, puis pousser un long soupir de frustration quand elle constate que ses efforts ne servent à rien. Il faudrait peut-être que quelqu'un se décide à lui dire que Sora sort avec Lea depuis plus de six mois un de ces jours. - « Alors, tu t'amuses bien ? » - « Oh toi la ferme. » - « Ce que tu peux être méchant ! Viens donc plutôt m'aider à installer les boules rouges. » - « Et si je refuse ? » - « Ce pauvre Sora sera tellement malheureux ! Tu ne voudrai pas lui faire une chose pareille, n'est-ce pas ? » Ca reste à voir. Si je sors discrètement, peut-être que… - « Tu viens me le tenir cet échafaud oui ou merde ?! » Connard. Et fier de son coup en plus ! Je me retrouve donc à lui faire passer les décorations une à une, tout en l'empêchant de perdre l'équilibre sur ce vieux machin bancal. Quelqu'un se rendrait-il compte que c'était intentionnel si je venais à lâcher Vanitas ? Je réfléchis sérieusement à cette question quand un bruit sourd retentit. J'ai juste le temps de voir un truc me tomber sur la figure avant de me retrouver étalé sur le dos avec le-dit truc allongé de tout son long sur moi. Je tente de me redresser mais Vanitas – le « truc » - ne semble pas décidé à bouger. Au contraire, il se pose de manière à être plus l'aise, et me sourit narquoisement. - « Putain bouges Van'. » - « Pas envie. » Je m'apprête à le repousser sans ménagement quand il plante son regard doré dans le mien. Black out total. Je ne sais plus où je suis, ni ce que je suis sensé y faire, ma réalité se résume en ce moment même à cette couleur si particulière. - « Euuuh… On vous dérange peut-être ? » La voix timide de Sora me ramène immédiatement sur Terre. D'un geste vif, je me redresse sur mes pieds, virant au passage le « squatteur ». Quant à Vanitas, il se redresse comme si de rien n'était. - « Ca va Riku ? » me demande Kairi. « T'es tout rouge. » - « Tout va bien. » Rah, mais pourquoi je n'arrive pas à prendre un ton cool et décontracté ?! Et qu'est-ce qu'elle a à nous regarder successivement en souriant bizarrement, hein ? - « Mmh, tant mieux. Bon ben… je crois qu'on a fini. » ajoute-t-elle en voyant que personne ne prend la parole. Elle a raison. L'immense sapin croule maintenant sous les décorations, si bien qu'on a du mal à encore distinguer la couleur verte. Je profite du fait que les autres contemplent leur œuvre pour m'éclipser discrètement. Je sillonne les couloirs à la recherche d'un coin tranquille, que je finis par trouver en la personne du toit. L'air frais me fouette le visage, alors que je m'adosse contre un mur. Quelle matinée… Entre le réveil forcé, la déco et le comportement de Vanitas, j'avais déjà presque la migraine. Le pire dans tout ça, c'est qu'il n'avait pas été le seul à agir bizarrement. Sérieusement, qu'est-ce qu'il me prenait d'être complètement infichu de penser à cause d'un simple regard ? Pas que Vanitas soit désagréable à regarder mais…et voilà que je recommence. Mon subconscient ne peut donc pas me laisser en paix ? - « j'étais sûr que je te trouverais là. » Il ne manquait plus que lui tiens. - « Et pourquoi ça ? » Il se laisser tomber à ma gauche, croise les bras derrière sa tête et s'allonge pour regarder le ciel. - « Tu viens toujours ici quand quelque chose te tracasse. Alors ? » - « Alors quoi ? » rétorquai-je. - « Qu'est-ce qu'il y a ? » Bonne question. A vrai dire, je ne suis pas sûr de moi même le savoir. - « Rien du tout. » Le silence retombe, et chacun retourne à sa contemplation. Cinq minutes environ passent avant que Vanitas ne décide qu'il en a assez de rester ici à ne rien faire. Il se relève souplement, se tourne vers moi et me tend la main. - « Tu viens ? » - « Pour aller où ? » demandai-je en me relevant à mon tour. - « Tu verras bien. » se contente-t-il de répondre. Pour le coup, je trouve ça suspect. D'habitude, j'aurai été assailli de questions à la seconde même où j'aurais refusé de parler mais là, rien du tout. - « Je finirai bien par le savoir de toute façon. » ajoute-t-il face à mon air suspicieux. « Allez, dépêches-toi ! » Sur ce, il ouvre un couloir obscur. Maître Eraqus le tuerait s'il l'apprenait, lui qui nous demande de n'utiliser que les Entre-chemins. - « Maintenant arrêtes de faire ta mijaurée et viens, c'est une surprise ! » Je frissonne. Nous nous souvenons tous de la dernière fois où Vanitas a fait une surprise à quelqu'un, en particulier ce pauvre Lea. Le roux n'avait plus osé lui parlé un mois durant. Enfin, Vanitas ne me ferait jamais volontairement du mal…n'est-ce pas ? C'est en me raccrochant à cette maigre conviction que je lui emboîte le pas. Nous progressons rapidement, l'endroit n'étant pas des plus agréables. Une courte minute plus tard, nous ressortons du couloir qui se referme discrètement derrière nous. J'ai à peine le temps de faire un tour d'horizon qu'une vive lumière blanche m'agresse les rétines. Le temps que je m'y habitue, je réalise que de la neige recouvre tout ce qui nous entoure. Ca et les chants qui s 'élèvent allègrement depuis le village au pied de la colline où nous nous trouvons, aucun doute possible. - « Chrismas Town ? T'avais rien de moins cliché ou je sais pas moi, un endroit un peu plus chaud ? » Avec le froid qui règne en hiver sur la Contrée du Départ, il aurait au moins pu avoir la délicatesse de m'embarquer à Agrabah ou, encore mieux, sur les Iles du Destin. Mais Vanitas reste Vanitas, c'est à dire un sale chieur qui a sans doute quelque chose derrière la tête en ce moment même. - « Voyons Riku, c'est bientôt Noël ! Quelle meilleure période pour venir en ville que celle-ci ? » Je m'apprête à rétorquer une réplique cinglante lorsqu'il me saisir fermement la main et m'entraîne à sa suite sans se préoccuper de si j'arrive à garder l'équilibre ou non. C'est que ça glisse, cette saleté de poudreuse ! C'est seulement après avoir dévalé la colline et manqué de me casser une jambe huit fois que je remarque que Vanitas ne me lâche toujours pas la main, alors que nous sommes presque arrivés au village. Autre fait étrange, cela ne me dérange absolument pas, j'aurais même tendance à trouver le contact plutôt agréable. Est-ce que je viens vraiment de penser ça à l'instant ? - « Euh, Van ? » - « Mmh ? » - « Tu me lâches maintenant ? C'est qu'on arrive en ville, et… » Il lâche brutalement ma main et détourne le regard l'air… gêné ? Vanitas ? Gêné ? On nage en plein délire là. Je choisis de faire comme si de rien n'était et engage la conversation, qui ne tarde pas à virer en fou rire de mon côté. Tout paraît ridicule sous les commentaires de Vanitas, des habitations en elles-mêmes jusqu'aux lutins qui s'activent comme des fourmis autours du traîneau du Père Noël. Oui, le Père Noël. J'ai bien été obligé d'admettre son existence lorsqu'un Sora complètement surexcité m'avait emmené ici pour la première fois et présenté au vieux bonhomme vêtu de rouge et blanc. Il lui arrive encore de se moquer « gentiment » de moi en me rappelant la tête que j'avais fait ce jour là. Sale môme. - « Tiens, je ne suis pas sûr que nos cadeaux arrivent en un seul morceau cet année. » - « Pourquoi ? » demandai-je curieusement. Pour toute réponse, Vanitas me désigne une personne bien plus grande que les lutins s'affairant au milieu de ces derniers. Ah en effet, si Jack s'y met… Le squelette avait beau être doté de toute la meilleure bonne volonté de ce monde, il est plus habile à effrayer les enfants qu'à s'occuper de leurs cadeaux. Le Père Noël a plutôt intérêt à le surveiller de près. De très près. Nous continuâmes à nous balader sans but précis durant encore environ une heure, jusqu'à avoir exploré les moindres recoins des environs, qui ne sont certes pas très étendus. - « Tu veux rentrer ? » me demande soudain Vanitas en regardant le bout de mes doigts bien plus rouges qu'ils ne devraient l'être. J'hochai vigoureusement la tête en remuant mes orteils gelés. Encore quelques minutes ici et je ne les sentirais même plus. Nous sortons rapidement du village, moi loin devant mon ami. Fichue discretion qui nous oblige à nous éloigner pour que personne ne nous voit ouvrir un passage. J'en suis encore à ruminer mes pensées noires quand je sens quelque chose d'humide mais surtout glacé percuter ma nuque. Je pousse un juron que la bienséance m'empêche de divulguer et retire rapidement la neige restée coincée dans le col de mon pull. Je me retourne, furieux, et regrette que mon regard ne puisse pas tuer. Si c'était le cas, Vanitas serait déjà en train de bouffer les pissenlits par la racine. Non mais c'est que cet imbécile est fier de lui en plus ! Deux solutions : l'ignorer ou agir comme un gamin. Une demi-seconde plus tard, une magnifique boule de neige lui atterrit en pleine figure et lui ôte ce petit sourire si agaçant. Il a à peine le temps de retirer la neige de ses yeux que je repars à l'assaut, le mitraillant inlassablement et sans aucune pitié. Vanitas ne tarde pas à répliquer, et les noms d'oiseaux fusent au milieu des projectiles et des rires. Je profite d'un moment d'inattention de sa part pour me glisser derrière lui et le pousse impitoyablement, l'imaginant déjà avec délice face contre terre. Ce plan était presque parfait. A la dernière seconde, Vanitas agrippe la manche de mon pull et m'entraîne dans sa chute. J'atterris lourdement sur le dos, la neige gelée s'infiltrant dans les moindres recoins qu'elle puisse trouver. Le choc et le froid me coupent littéralement le souffle. J'inspire un grand coup, m'étranglant à moitié à cause du crétin du crétin qui se trouve une fois de plus affalé sur mon torse. Décidément. - « Bouges, s'il te plait. » Vanitas me lance un regard provocateur, croise les bras pour y caler son menton et s'affale un peu plus encore. Il n'a pas l'air spécialement décidé à bouger. - « Putain lèves-toi Van, je suis gelé ! » - « Mmh, pas tout de suite, je commence à peine à me réchauffer. » Mais qu'il aille se faire foutre ! Je m'apprête à me redresser quand il plante un regard mortellement sérieux dans le mien. C'est tellement rare que ça me cloue sur place. Nous restons ainsi sans rien dire un moment, jusqu'à ce qu'il me lance : - « Tu veux que je te dise Riku, je suis sûr de savoir ce qui te tracasse. » - « Tiens donc. » Il ignore ma remarque remplie d'ironie et poursuit : - « Et je peux même te le prouver. » Mais fais donc, j'ai hâte de voir ça. J'ai à peine formulé cette pensée que Vanitas pose ses lèvres sur les miennes. Oh mon Dieu, il est en train de… de m'embrasser ?! Et pas un petit bisou innocent comme ceux que Lea fait à Sora, non, c'est fiévreux, impatient, et tellement enivrant. Je répond sans même réfléchir. Je suis bientôt à court d'oxygène et le repousse doucement par les épaules. Son regard est redevenu insolent, mais avec cette fois-ci une imperceptible pointe de douceur. - « Tu veux que je te dise Riku ? T'es amoureux de moi. » Quoi ? - « Si si, inutile de le nier. » De quoi ?! - « Et arrêtes de faire cette tête, on dirait un poisson rouge. » Je referme automatiquement la bouche. - « C'est mieux comme ça, mais je risque de mal le prendre tu sais. » - « Mal prendre quoi ? » - « Que tu le nies. » Cette conversation me paraît complètement surréaliste. Vanitas prendrait mal le fait que je nie l'aimer alors que je ne l'aime pas ? Enfin, je crois… - « Même si je t'aimais ducon, toi non, alors qu'est-ce que ça peut te faire ? » - « Je n'ai jamais dis que je ne t'aimais pas. » Je vais me réveiller. J'ai mangé trop de chocolats et de bonbons hier soir avec Sora, il va bien rigoler quand je lui raconterai ce rêve stupide, ha ha. - « Alors ? » - « Alors quoi ? » grognai-je. - « Tu veux sortir avec moi ? » Est-ce que je… quoi ?! - « Je t'ai déjà dis de fermer la bouche. Alors, tu veux sortir avec moi ? » - « Même si je te répondais oui, qu'est-ce qui se passera après ? On restera ensemble trois semaines puis tu me diras gentiment que t'en a assez ? Merci bien. » - « Je t'aime, Riku. » Il vient vraiment de dire ce qu'il vient de dire ? Je crois bien que oui… Le pire dans tout ça, c'est mon fichu cœur qui bat la chamade depuis qu'il vient de parler, sans compter de mes joues probablement rouges pivoine. - « Alors, tu me laisses une chance ? » Si je veux lui laisser une chance ? Oui, j'en crève d'envie, mais c'est de Vanitas qu'on parle là, le même Vanitas que celui qui s'ennuie de faire la même chose plus de dix minutes, alors rester avec la même personne pour un temps prolongé, autant ne pas en parler. J'en suis encore à mes réflexions lorsqu'il se penche sur mon visage et commence à m'embrasser furtivement. Mes arguments rationnels s'envolent à chaque baiser qu'il me donne. - « Un mois. Donnes-moi un mois. » - « …D'accord. » Après tout, qui vivra verra, comme dirait l'autre. Ca fait trois ans que ce noël est passé maintenant, je supporte toujours mon imbécile de petit ami toute la journée, et je l'aime aussi, accessoirement. Paraît que lui aussi, ça tombe bien, non ?
Dernière édition par Shiro-chan37 le Mer 26 Déc - 12:12, édité 1 fois |
| | | Sixtejun Esprit tordu qui fait des nœuds dans ceux des autres
Messages : 1046 Date d'inscription : 23/05/2012 Age : 35 Localisation : Nulle part ailleurs
| Sujet: Re: Partage des cadeaux - Event de Noël 2012 Mar 25 Déc - 13:55 | |
| (Attention, c'est un Two-shot. Donc je fais deux posts pour mes deux parties) Titre : Younivers Monde : semi-canon, semi-UA (rangez-le en UA pour la classification) Genre : Romance, hurt/comfort Personnages : Riku et Xion Pairing : RikuShion Statut : Terminé Disclaimer : Aucun personnage de Square Enix ni de Disney ne m'appartient, de même que les lieux. Rating : K+ Résumé : La guerre contre Xehanort est terminée. Riku n'a plus aucun but, sauf retrouver celle qui hante ses songes et qu'il n'a jamais vue pourtant. Elle, qui ne vit pas dans le même univers... et qui rêve de lui en mourant à petit feu. Remarque : Mon premier UA. Enfin, semi-UA, hein! Voici l'event tant promis, écrit pour... Plume d'eau! Joyeux Noël ma belle ! Younivers
* * *
Acte 1 : Le destin à revers
* * * Une odeur douce, embruns et quiétude mêlés en un parfum unique. Une vague et un banc de sable qui ne font plus qu'un. Riku s'y dirigea avec une nonchalance qu'il était bien loin d'éprouver. Il comptait rejoindre l'arbre à Paopu pour ne pas changer. Sous cet arbre, il laissait ses pensées libres comme le vent. Il s'y sentait un peu mieux qu'ailleurs, même si son mal-être s'étendait de jour en jour... comme s'il n'avait plus sa place ici. D'ailleurs, l'avait-il eue un jour ?
Un ciel d'azur, à peine gribouillé par un ou deux nuages ou par quelques voiles abandonnés par ces derniers. L'île de la Destinée. Un havre de paix après la bataille acharnée contre celui qui voulut remodeler les mondes, l'univers à sa façon : Xehanort, grand Maître de la Keyblade, qui courba enfin le dos devant le Kingdom Hearts.
C'était arrivé il y a quelques mois à peine, mais tout s'était précipité à la vitesse d'une aérolame, celle que brandissait Xemnas, un Simili issu de Xehanort et de Terra. Les Élus de la Lumière avaient décroché la victoire pour préserver les mondes et la vie de milliers d'êtres vivants. Ils avaient sauvegardé la Lumière, mais aussi les Ténèbres originelles, celles non corrompues par Xehanort.
Une victoire qui leur coûta bien plus que quelques blessures physiques ou mentales... comme la mort confirmée d'Ansem le Sage, qui se sacrifia pour Sora et Ventus. Terra succomba aussi, malgré les efforts conjugués de Sora, Riku, Lea, Kairi et Mickey pour empêcher cela. Aqua, qu'ils n'étaient pas parvenus à sauver non plus, et qui avait donné son cœur au Kingdom Hearts pour que ce dernier soit assez fort.
Naminé, Roxas... Riku ignorait s'ils existaient toujours à travers Sora et Kairi. Il s'était avéré que les deux Simili avaient sacrifié leur personnalité pour contrer Xehanort. De quelle façon ? Personne ne le savait. En tout cas, leur présence ne se faisait plus ressentir au sein du Porteur de la Clé et de la Princesse de cœur.
Lea était mort en voulant sauver Isa, qu'Even et Ienzo soignaient petit à petit au Jardin Radieux. Ses séquelles étaient nombreuses, hélas... Il n'était pas certain qu'il retrouve l'usage de ses yeux ni celui de la parole un jour. Celui au Simili surnommé Rafales Dansantes s'était fait tuer par le Devin Lunaire, encore réceptacle de Maître Xehanort, et ce sans qu'il n'eût aucune chance d'en réchapper. C'était arrivé juste avant que Kairi ne porte secours à Sora, juste avant la bataille finale.
Tant de morts, tant de peine... Pour des mondes en paix et la disparition d'un être malfaisant. Dans l'ombre, d'autres ennemis vicieux, ou désespérés, chercheraient peut-être encore à avilir la lumière et les ténèbres... L'un sans l'autre ne pouvait avoir de sens. L'un comme l'autre pouvait se révéler destructeur.
Mais Riku ne s'en souciait que peu à cet instant. Ses yeux se tournaient vers d'autres horizons. Oh, la tristesse pesait encore sur son cœur, et il faisait doucement le deuil. Par contre, à cet instant précis, ses pensées étaient à des kilomètres de ces sujets et ne se concentraient que sur une seule chose.
Un visage. Celui de cette fille qui ressemblait à Kairi, qu'il n'avait jamais vue... mais il la connaissait. Il le savait au plus profond de lui même si c'était impossible. Ses yeux bleus, ses cheveux noirs, ce visage pâle. Et cet air triste qui ne la quittait pas. Cet air qui l'interpellait et qui l'amenait à penser à elle.
Lorsqu'il l'avait vue dans le cœur de Sora, et qu'elle lui avait posé la troisième question, Riku avait compris que quelque chose de fort les unissait. Or, comment ce phénomène pouvait-il exister en sachant qu'ils ne s'étaient jamais croisés avant ? Et cette certitude s'effritait pour laisser place à une autre, effrayante, mais plausible. Et s'il l'avait connue, mais qu'il ne s'en souvenait pas ?
Riku soupira, s'adossa un peu plus contre l'arbre Paopu en laissant pendre une jambe dans le vide. Le crépuscule effleurait l'océan calme, le couvait de ses jupons mordorés. Quelques mois s'étaient écoulés depuis leur victoire amère... et il n'avait pas bougé de cette île depuis. Cependant, tant de choses s'étaient produites en ces quelques mois.
Riku n'y pensait pas sans pour autant s'en ficher comme d'une guigne. Il était concentré sur d'autres préoccupations, qui le touchaient plus qu'il ne l'aurait voulu. Pour la première fois de sa vie, l'île lui paraissait trop grande pour lui, pour son être misérable qui se traînait sans aucun but.
Il se sentait vide comme un sans-cœur, mais ce vide le mangeait à petit feu.
Plusieurs fois, au cours de son combat contre Xehanort, la fille qui ressemblait à Kairi était intervenue dans ses rêves, ou même comme une image surgissant du passé. Quel passé ? Celui qu'il avait perdu ? Pourtant, sa mémoire avait été conservée à Oblivion, au contraire de celle de Sora.
Peut-être devait-il demander conseil à Maître Yen Sid ou au Roi Mickey ? Après tout, en tant que Maître de la Keyblade, Riku pouvait voyager entre les mondes. Kairi et Sora l'accompagneraient s'ils le désiraient, ayant été nommés Maîtres à leur tour après qu'ils aient vaincu Xehanort... Non.
Riku secoua la tête. Il n'en avait pas envie. Yen Sid et Mickey ne pourraient pas l'aider, il en avait le pressentiment. Peut-être qu'il devenait fou ? Peut-être que finalement, les ténèbres le dévoraient seulement maintenant et s'en prenaient à sa mémoire...
Riku baissa le menton et sentit sa gorge se nouer. Il n'en avait plus rien à faire, à vrai dire.
Ce qui était certain, c'était que cette fille continuait de hanter ses songes. * * * Les étoiles. Ardentes, parfois ternes, mais toujours hantées par cet éclat que la physique seule ne pouvait expliquer. Elles brillaient dans cette immensité bien plus grande qu'elle ne le laissait croire. Riku ne l'avait que trop éprouvé, en sillonnant de monde en monde, que ce soit en vaisseau, en planeur, en rêve, ou même par couloir des ténèbres.
Entre elles se nichait le néant. Il n'y avait rien. Que du vide à l'état pur. Il l'avait appris grâce à ses voyages et au savoir du grand Yen Sid. Le son demeurait silencieux, seule la lumière pouvait un instant l'éclairer, même si c'était à retardement. Si une étoile disparaissait dans le ciel d'un monde, cela voulait dire qu'elle était morte il y a des millions d'années déjà.
Le néant des Étoiles était loin d'être vide cependant ; bien au contraire. Les ténèbres s'y logeaient quand elles le pouvaient, mais la lumière y parsemait ses diamants aussi et incitait les astres brûlants à les réchauffer pour former des mondes. Oui, certains d'entre eux naissaient de cette manière. Une étrange alchimie que Maître Xehanort avait étudiée jadis, quand il était encore sain d'esprit.
Les iris turquoise du jeune Maître de la Keyblade parcouraient la voûte céleste et ce vide entre les éclats en quête d'une réponse qu'il ne trouvait toujours pas : pourquoi ? Question trop vague ou trop précise ? Pourtant, cette réponse était si simple... ou trop compliquée pour une entité telle que le Kingdom Hearts. Le Royaume des Cœurs. Et cette question en amenait une autre.
Existait-il un seul univers, celui où Riku et des milliers de personnes vivaient, ou bien y en avait-il d'autres ? Les domaines du Rêve, des Ténèbres, du Néant et de la Lumière ne constituaient qu'un univers... mais peut-être qu'ils se mélangeaient aussi dans d'autres, qu'ils s'épousaient pour former une harmonie connue d'eux seuls.
Riku se frotta le front du bout des doigts. Et ces univers, peut-être étaient-ils habités... et le Kingdom Hearts veillait aussi sur eux, même si ce n'était pas sous la forme que lui connaissait. Peut-être qu'il se manifestait autrement. Ou alors, il n'existait pas, et ces univers n'étaient que chaos et artifice de la vie...
Riku pensait, voyait trop grand. Il délirait. Les rêves, surtout le dernier, ne l'arrangeaient pas. Il fixa ses ongles. Il avait revu la fille aux cheveux noirs. Elle n'avait toujours pas conscience de sa présence, même si depuis quelque temps, les songes prenaient la forme d'une histoire morcelée en plusieurs fragments.
Le contenu évoluait aussi : elle se trouvait dans une ville, surpeuplée à ce qu'il voyait, et elle vivait dans un environnement un peu gris, un peu triste, même si la ville semblait grande, paraissait à la pointe de la technologie. Pas autant qu'Illusiopolis, ou que le monde de Tron, mais quand même. Néanmoins, il y avait une petite touche « traditionnelle », issue du passé, qui ressemblait aux paysages qu'il avait pu découvrir dans d'autres mondes... comme celui de la Terre des Dragons.
Une ville qu'il n'avait jamais vue. Une ville qui lui fendait le cœur. À moins que cela ne fût la jeune fille ?
Lorsque Riku ouvrit de nouveau les yeux, l'aube caressait sa peau avec douceur. Il s'était encore endormi sur le balcon et avait le dos endolori à cause de sa position assise. * * * Les nuits, les jours passèrent, s’enchaînèrent à un rythme monotone. À l'aube de l'un de ces jours, Riku ouvrit les yeux. Il s'accrochait désespérément à son rêve, dont le dernier lambeau lui échappait sans aucun scrupule. Un combat qu'il était en train de perdre, inexorablement... et ça le rendait malade !
Le réveil fut dur. Tellement dur qu'il décida de retourner dans le monde des songes, rien que pour la revoir encore une fois, qu'elle le remarque enfin. La fille aux cheveux noirs et aux yeux aussi bleus que l'azur. Il n'y parvint pas malgré ses efforts, se tourna et se retourna sans son lit en grognant et en soupirant.
Sa tristesse lui faisait mal au cœur, d'autant plus qu'il avait compris d'où cette émotion venait. Seule. Elle se sentait seule, comme lui, dans ce monde où elle errait comme une âme en peine, dans cette ville qui la rendait malade même si elle l'aimait. Seule comme si elle cherchait sa place dans un monde qu'elle ne comprenait pas.
Il l'avait suivie durant toute une journée, silencieux, comme une ombre. De l'immeuble haut dans lequel elle habitait jusqu'au lycée où elle rentrait, dans son uniforme gris et triste. De la sortie de ce même lycée jusqu'au parc enneigé où elle se réfugiait malgré les rigueurs de l'hiver.
Elle s'asseyait alors sur un banc, levait les yeux vers le ciel tout en s'immergeant dans sa musique grâce à un lecteur de très petite taille, qui s'accrochait n'importe où. Ses écouteurs couvraient ses oreilles et les protégeaient du gel, au moins, même si ses mains semblaient bleuies malgré les mitaines épaisses qu'elle portait. Des mitaines avec des carrés noirs et blancs, qui ressemblaient à l'espèce de brassard que Roxas avait au poignet. Roxas...
Riku s'était assis à côté d'elle... mais elle n'avait pas remarqué sa présence, comme s'il était un fantôme. Peut-être qu'il en était un dans le monde où elle vivait... si ce monde existait vraiment. Par contre, il l'avait entendu parler à voix basse après un soupir :
« J'aimerais tellement qu'il soit là... »
Riku s'était figé. À qui pensait-elle à ce moment-là ? Quel homme occupait-il de la place en son cœur cousu dans le noir et le blanc, seules couleurs qu'elle semblait vouloir porter ? Vers qui pouvaient bien se tourner ces yeux d'azur ?
Son cœur s'était serré brièvement de jalousie et d'une émotion proche de la détresse. Puis ce coeur avait bondi dans sa poitrine, lui avait écorché le souffle tandis qu'elle murmurait de ses lèvres blanchies par le froid :
« Mais il n'existe pas. »
Étrangement, ces mots avaient trouvé un écho en lui et l'avaient remué. Riku avait alors avancé la main vers elle pour la poser sur la sienne, celle qui tenait son lecteur de musique... et il s'était réveillé à ce moment-là.
Il repoussa ses couvertures avec humeur, le visage tendu, les iris traversés par des éclairs d'agacement. Tant pis, il la retrouverait la nuit prochaine. Après tout, il contrôlait de plus en plus son sommeil et ses rêves. Une bien maigre consolation pour une chimère... une folie qu'il laissait s'épanouir dans son esprit. * * * - Riku, que fais-tu ? Riku ?
Le jeune homme ne fit pas attention à Sora, qui avait fini par s'arrêter de lui parler et attendait qu'il réagisse. Son inquiétude n'était pas feinte. Riku ne semblait pas du tout aller bien ces temps-ci, il était loin d'être aveugle. Il se renfermait sur lui-même, ne se mêlait plus du tout des conversations avec Kairi, Selphie, Tidus et Wakka. Déjà qu'il n'était pas très bavard avant...
Il finit par se tourner vers son meilleur ami, battit des paupières pour chasser cette étrange impression en lui. Ses pensées et son mental se trouvaient à mille lieues de son corps. Il la cherchait. Il voulait établir un contact avec elle, la fille aux cheveux aussi sombres que l'ébène, mais aux yeux aussi purs que du cristal. Elle avait un air de ressemblance avec Sora. Pas d'un point de vue physique, mais la beauté du regard. Cependant, chez elle, il y avait ce petit plus qui...
- Riku ?
- Oh, Sora...
Riku soupira et détourna les yeux pour ne pas soutenir le regard du Porteur de la Keyblade. Ce dernier décida une fois de plus de masquer ses angoisses derrière un sourire, puis pencha la tête sur le côté en adoptant une voix malicieuse :
- On dirait que tu es ailleurs... que tu me caches quelque chose !
- Pas que je sache, répondit laconiquement Riku.
- Oh, arrête, va ! Je sais que tu es doué pour ne rien laisser paraître de tes émotions, mais ça ne marche pas avec moi, ni avec Kairi !
Sora éclata d'un rire amusé devant l'air blasé de Riku, qui se raidit avec brusquerie lorsqu'il ajouta d'un ton badin :
- Elle m'a avoué que ce regard que tu avais de temps en temps, elle savait ce qu'il voulait dire. Par contre, comme c'est un secret de fille...
Le Porteur de la Keyblade continua de bavarder, mais Riku ne faisait plus attention. Il fixa le chemin de terre sur lequel ils marchaient pour se rendre jusqu'au petit port, là où les attendaient leurs barques. Il remarqua que la sécheresse estivale avait malmené la surface, qu'elle se craquelait sous leurs pieds.
Dans le monde de la jeune fille aux cheveux noirs, par contre, l'hiver parsemait son manteau... et le temps s'accordait avec les couleurs de la ville : gris, triste. Sora lui secoua le bras, le visage soucieux, puis lui dit :
- Riku ? Oh allez, ne m'en veux pas. On oublie cette conversation, d'accord ?
Il serra les dents; les paroles de Sora tournaient dans sa tête. Kairi... Elle savait ce qui le rongeait, ce qui lui brûlait le cœur, les entrailles, l'âme et l'esprit. Du moins, elle savait ce qui le dévorait, même si elle ignorait qui était la personne qui en était responsable. Il ne pouvait plus continuer à faire l'impasse en essayant d'être fort. Ces symptômes, qu'il n'avait jamais éprouvés... il finit par les admettre et leur donner un nom.
Il s'était attaché à cette jeune fille. Il en était tombé amoureux. Même Kairi l'avait « su » avant lui, avec son instinct. Ce n’était pas agréable du tout ; la chose n'avait rien à voir avec les contes de fées. Riku lâcha un sifflement rageur, planta ses ongles dans la paume de sa main tellement il serrait fort son poing.
Sora avisa ce geste, mais ne dit rien. Il se tut et pointa du doigt Kairi, qui marchait vers eux. Riku retrouva son calme tant bien que mal, mais ne put chasser la douleur inscrite sur son visage. Personne ne lui posa de question, mais il savait qu'elles étaient là, pesantes, et légitimes.
Il s'en voulait de cacher ses problèmes à ses deux amis... sauf que cette fois, ils seraient incapables de l'aider. * * * Un soir, alors qu'il échouait à s'endormir, Riku quitta la maison familiale pour aller sur l'île du Destin. Une idée angoissante s'était insinuée dans son cœur torturé. La grotte contenait-elle encore la porte qu'il avait ouverte jadis ? Oserait-il y pénétrer et affronter ses derniers démons ? Depuis leur victoire sur Xehanort, le jeune homme n'y était jamais retourné, comme s'il voulait à jamais sceller une partie de son passé.
Et ce soir, il s'apprêtait à se le prendre en plein visage et en plein cœur pour une raison. Pour la rejoindre. Ou au moins, la voir et être vu d'elle.
Riku était arrivé à la conclusion suivante : la jeune fille aux cheveux noirs existait. S'il pouvait aller sur son monde pour la retrouver, alors il le ferait. Or, ce monde-ci ne semblait pas se situer dans cet univers. Sinon, il serait parvenu à le localiser rien qu'avec Point du Jour. Son esprit fou se faisait-il trop d'illusions, à s'être enfoncé dans ses ténèbres... ou bien la jeune fille vivait non seulement dans un autre monde... mais aussi dans un autre univers ?
Riku inspira profondément alors qu'il était planté devant l'entrée de la petite grotte. Jadis, c'était leur cachette à Sora et lui. Puis Kairi s'était jointe au secret... Pendant un temps, la grotte avait été le témoignage des tendres sentiments entre la Princesse de cœur et le jeune Élu de la Keyblade. Enfin, elle avait été entièrement désertée, délaissée... parce que la porte s'y trouvait encore.
Celle que Xehanort avait créée pour transcender le temps, entre autres.
Riku serra les dents, mais trembla un peu. Cependant, il franchit l'entrée de la grotte. La porte... Il n'avait pas du tout les mêmes desseins que Maître Xehanort. Il ne désirait que découvrir la vérité, en même temps que de rejoindre la jeune fille. Dire qu'il ne connaissait pas son nom...
Le cœur battant, Riku se retrouva plus vite qu'il ne l'aurait voulu à l'endroit où les dessins de Sora et Kairi se répondaient. Il n'y fit pas attention et se concentra plutôt sur l'arche brune située au fond. Son visage tressauta, mais il se reprit.
Il ne désirait pas bouleverser l'équilibre des mondes et de l'univers pour causer le chaos... Xehanort ne le souhaitait pas non plus lorsqu'il avait commencé à faire ses recherches sur les ténèbres et la lumière. Yen Sid et Mickey insistaient sur la responsabilité d'être détenteur de grands pouvoirs, sur le danger qu'ils pouvaient représenter...
Oui, mais ils ajoutaient aussi que rien n'était plus pur que l'amour, et rien que pour ce sentiment, des risques valaient la peine d'être pris, pour le meilleur et pour le pire.
Riku n'y avait jamais cru. Pour lui, ce n'était qu'une fadaise que l'on racontait aux futurs adultes pour les inciter à grandir. Il ne l'avait que trop compris lorsqu'il se trouvait au Pays Imaginaire, le monde de Peter Pan.
Pourtant, en ce jour, il y croyait dur comme fer. Dur comme cœur. Cette nouvelle expression était belle et cruelle. Belle et rebelle.
Riku releva le menton et affronta la porte de son regard turquoise. Il avait choisi. Sa main se tendit en avant et invoqua Point du Jour, sa fidèle Keyblade. Les ailes rouges et blanches de l'arme semblèrent se déployer autour de la lame, qu'il pointa vers le centre. Un seul désir battait au sein de sa poitrine.
Soudain, une lumière bleue et intense naquit entre la Keyblade et la porte dépourvue de serrure et de poignée. Riku dut lever l'autre bras pour couvrir ses yeux. Un souffle de vent poussa avec force son corps, qui se sentit irrésistiblement attiré en avant. Ses amis lui en voudraient sûrement de les avoir abandonnés... ou même d'avoir osé faire cet acte. Sora, Kairi, Mickey...
Néanmoins, Riku sourit et ouvrit grand les bras à cette lueur de plus en plus chatoyante, aveuglante. Il entendait une voix l'appeler. Peu importe si c'était son esprit dévoré par la folie ! Cette voix, il désirait y répondre ! Quelque chose saisit ses membres et étouffa le cri qu'il s'apprêtait à pousser. La lumière fut attrapée par les ténèbres ensuite... et plus rien.
Le destin venait de retourner ses multiples robes. Un souffle de monde en était responsable.
Lorsque Riku ouvrit les yeux et parvint à reprendre ses esprits, il était étendu dans une allée enneigée bordée par des sapins. Il serrait contre lui quelqu'un. Une fille vêtue d'un long manteau blanc... qu'il reconnut. La jeune fille aux cheveux noirs.
Elle le regardait avec crainte, mais une espèce de tendresse qui le renversa. D'une main, elle caressait des plumes immaculées qui entouraient leurs deux corps, ainsi qu'une sorte de membrane rouge...
Riku se figea. Des ailes... Une d'ange, et une de chauve-souris. Elles venaient de lui et partaient de son dos. Son dos qui lui faisait si mal. Et sa Keyblade avait disparu.
C'est alors que sa voix le tira de son hébétude :
- C'est toi... c'est bien toi, mon ange gardien ?
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| | | Sixtejun Esprit tordu qui fait des nœuds dans ceux des autres
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Acte 2 : Les ailes du souvenir
* * * Lassitude, envie de hurler. Tous ces sentiments s'abritaient en elle, l'abîmaient dans la plus profonde des mélancolies. Dès l'instant où elle avait ouvert les yeux après qu'elle fut sortie du ventre maternel, même si elle ne s'en souvenait pas, Shio avait senti que quelque chose lui manquait. Plus tard, lorsqu'elleeut l'âge de se tenir debout et de parler, le sentiment d'être étrangère à ce monde où elle était née avait surgi des ténèbres pour s'emparer d'elle. Il avait grandi en elle comme un vers qui s'étire, et la pomme qu'elle était se découvrait rongée de l'intérieur. Si elle en avait parlé à quelqu'un, Shio aurait été certaine de se faire traiter de dépressive ou de folle. Or, elle sentait au plus profond de son être qu'il fallait que quelqu'un la prenne au sérieux un jour... Aujourd'hui, c'était pire que tout. Ses yeux bleus, personne n'y regardait de plus près pour tenter de les déchiffrer. Son visage, aucun de ses proches, de ses amis, ou même de simples inconnus n'y faisait attention. Jolie, mais sans plus. Banale à bien des égards, mais trop étrange pour être considérée comme normale. Shio, qui signifiait « marée ». Pourquoi sa mère l'avait-elle nommée ainsi ? Elle était loin d'être aussi belle que les vagues de l'océan. Ses cheveux, aussi sombres que l'ébène, ne les symbolisaient pas du tout, ils étaient raides comme des baguettes de bambou. Elle se sentait beaucoup plus proche de la terre chaude détrempée par la pluie, dont elle aimait l'odeur même si tout le monde trouvait que cette boue formée semblait laide. Ces gens-là ne savaient pas apprécier la beauté quand ils l'avaient sous leurs yeux. La jeune fille mit la musique un peu plus fort sur ses oreilles, serra les lèvres et se replongea dans son monde intérieur; là-bas, elle y était merveilleusement bien, mais ne pouvait jamais y rester bien longtemps, sous peine d'attirer trop l'attention sur elle de personnes curieuses de savoir ce qu'elle faisait, à quoi elle pensait. Ce monde-là, Shio l'aimait parce qu'il y avait ce petit quelque chose qui sur Terre était absent. Et bien sûr, il y avait cet homme. Jeune, avec des yeux incroyables et une chevelure impossible à imaginer ici comme étant une couleur naturelle. Chez lui, elle l'était pourtant. Cet homme, il n'existait pas, sauf dans son esprit. L'influence des jeux vidéos avait-elle altéré les fantasmes de base de l'être humain qu'elle était ? Non, puisqu’avant d'y avoir goûté, Shio le voyait déjà dans ses rêves toujours empreints de douceur et de folie. Des rêves bien plus vivants que sa vie réelle. La jeune fille sentit ses yeux se fermer lentement. Peut-être devait-elle aller consulter un médecin pour ce problème. Il était impossible de s'attacher à des personnes imaginaires, sauf pendant l'enfance... mais Shio, elle, n'avait jamais cessé de le faire même si elle avait fini par le cacher. Cet inconnu avait grandi avec elle sans grandir. Ce mystère la laissait un peu perplexe, mais elle ne s'y attardait pas de trop. Le sentiment qu'elle éprouvait pour lui s'était alors éclairci, et... son cœur avait sombré sous la douleur. Il n'existait pas. Jamais ils ne vivraient ensemble, ni ne s'accorderaient un simple regard. Shio serra les poings sur sa jupe. Le froid mordant du banc de fer lui parut plus cruel encore. Pourtant, elle restait assise dessus, faisait semblant d'être pétillante de vie, plaquait un faux sourire sur ses lèvres bleuies lorsqu'un passant la saluait. Elle donnait l'illusion de vivre. Son monde intérieur ne lui suffisait plus et lui créait tant de tourments... elle avait si mal ! Il en était issu, lui, qu'elle appelait à tort son ange gardien, parce qu'il représentait bien plus pour elle... Cet ange gardien qui n'existait pas. Lorsqu'elle ouvrit de nouveau ses paupières fatiguées, la voûte céleste avait presque revêtu son manteau d'astres. Elle devait rentrer. Ce parc la déprimait, de toute façon. Au moins, il lui paraissait un peu plus familier que le lycée ou la maison. Du haut de ses seize ans, Shio ne se sentait bien nulle part. Sauf dans son monde intérieur, celui qu'elle imaginait ou croyait imaginer. Sauf dans les bras de ce jeune homme aux yeux turquoise et aux cheveux d'argent. Un an plus tard, elle serait assise à la même place, parlerait à voix basse de lui... et s'abîmerait plus encore dans la tristesse. Parce qu'il n'existait pas. Elle n'aurait pas conscience que ce jeune homme la regarderait d'une autre dimension, sous une forme astrale ou une simple émanation de l'esprit, et qu'il tenterait de poser la main sur la sienne avant d'être rattrapé par sa propre réalité. * * * Shio poussa un gémissement de désespoir; le sommeil lui échappa. Ses yeux s'ouvrirent et des larmes acides, brûlantes, coulèrent sur ses joues et achevèrent d'éclater ses dernières barrières. Ils s'étaient vus, mais il ne l'avait pas reconnue. Là-bas, sur cette île qui représentait le cœur de son monde imaginaire. Elle lui avait posé une question – pas celle qu'elle aurait voulu formuler – et il lui avait répondu. Elle s'était aperçue qu'il était troublé, qu'il doutait, qu'il cherchait à se souvenir d'elle... Non, cela n'était pas possible. Pour lui, elle n'existait pas et inversement. Shio saisit son oreiller et y fourra son visage pour étouffer ses sanglots imprégnés de fatigue. L'insomnie lui aurait été salutaire pour une fois. Recroquevillée en fœtus, elle maudissait plus que jamais la vie d'être aussi cruelle envers elle. Elle s'en voulait à elle-même d'être trop étrange, malade, folle. Comme Alice au Pays des Merveilles. Elle aussi avait-elle été amoureuse ? Lewis Carroll n'en parlait pas. Peut-être que ça avait été trop douloureux pour lui. Où ses pensées dérivaient-elles ? Oui, elle était folle. Folle d'amour et folle d'aller aussi mal. Folle et pétrie de sentiments pour quelqu'un qui n'existait même pas. Pitoyable, grotesque. Combien de personnes en ce bas monde étaient-elles touchées par cette épouvantable malédiction au goût de sucre et de miel ? Ici, ce n'était pas sa place. Ce monde, ce n'était pas sa maison. Cette maison, enfin cet appartement, ne lui appartenait absolument pas. Ce lit, ce n'était pas le sien. Jamais Shio n'en avait été plus persuadée. Même son prénom était une imposture. Elle l'avait modifié secrètement pour qu'il colle plus à elle, l'inconnue. Un X au niveau du graphisme, même s'il pouvait se prononcer comme un « sh » dans sa langue natale. Xio. Cela ne lui avait pas plu. Non, pas du tout même. Son prénom, elle le voulait musical. Elle désirait qu'il fût unique. Xion. Oui, c'était beaucoup mieux. Lorsqu'elle l'avait formulé à voix haute, un carillon lointain avait retenti à ses oreilles. Son cœur s'était allégé d'un poids. Néanmoins, une vieille douleur s'était réveillée. Une douleur sourde, incompréhensible, impossible à définir. Une douleur issue d'une autre vie ? Shio – non, Xion – se releva doucement et frotta ses paupières rougies. Elle fixa le volet fermé de sa fenêtre. Il était trois heures du matin. La ville devait dormir à moitié, ou être animée d'une énergie morte. Cette ville, qu'elle avait appris à aimer, mais qui la rendait malade aussi. Cette ville triste et grise, à la pointe de la technologie d'après les dirigeants de son pays. Du haut de ses dix-sept ans, Xion avait l'impression d'avoir souffert mille maux. Une autre vie... et puis quoi encore ? Son esprit cherchait-il des chemins plus tortueux pour s'égarer un peu plus dans ses délires ? * * * Hōryū-ji (1) somnolait sous un ciel gris et trop duveteux. Pourquoi y était-elle allée, alors qu'elle se fichait de la religion, quelle qu'elle fût ? Xion n'en avait aucune idée. Peut-être était-ce pour l'atmosphère de paix qui se dégageait de l'endroit, malgré l'hiver rude qu'ils connaissaient en ce moment. La neige avait recouvert son toit harmonieux et les allées bordées par des sapins. C'était là qu'elle s'était réfugiée après qu'elle eut visité l'intérieur de la pagode. Elle n'y était pas restée longtemps malgré le froid. Xion soupira et attrapa une des mèches de ses cheveux courts. Elle refusait de les porter long depuis ses quinze ans. Elle se sentait plus elle-même ainsi. Cependant, chose étrange, dès qu'on l'interpellait par son prénom d'origine – Shio –, il lui arrivait de ne pas se sentir concernée. Elle devait faire attention avec cela, parce « Xion » devait rester secret ! Elle tritura une de ses mitaines en laine. Les carreaux noirs et blancs lui rappelaient l'échiquier de sa vie. Elle ne cessait de changer de camp, de violer les règles fondamentales. En vérité, Xion se cherchait... et cherchait sa place sur Terre, même si elle n'existait pas. La liberté l'appelait plus que tout, mais elle ne savait pas où la débusquer ! Les barrières l'empêchaient de venir toucher un des sapins, mais elle comptait l'enjamber lorsqu'il n'y aurait plus personne. C'était plus ou moins le cas, d'ailleurs. Le crépuscule donnait rendez-vous de plus en plus tôt en ce mois de décembre. Noël arriverait trop vite, et Xion ne souhaitait pas le fêter, ni même y penser. Quelques flocons de neige échouèrent sur sa tête, qu'elle recouvrit de sa capuche. Son long manteau blanc affinait sa silhouette déjà mince et lui tombait jusqu'aux pieds. Ses bottes plates, d'un noir de jais, faisaient craquer la neige parsemant l'allée. Elle marchait sans but et raison sur ce chemin dont elle ne voyait pas le bout. Quelques mois plus tôt, elle avait tenté de faire le deuil. Oublier ce jeune homme inventé. Bien mal lui en prit, puisqu'elle ne l'avait pas supporté et était tombée malade. Et encore, Xion s'estimait heureuse de s'en être sortie avec une simple grippe intestinale. C'était passé inaperçu aux yeux de sa famille, et c'était tant mieux. Alors elle avait voulu l'aider. À chaque fois qu'elle rêvait de lui, il combattait une force obscure. Il n'était pas tout seul, mais il semblait avoir besoin d'encouragements. Sans réfléchir, Xion lui en avait donné. Il avait remporté sa bataille, et la jeune fille s'était dit qu'elle ne devait plus intervenir. Pensive, elle leva la tête vers le ciel. Toujours ce gris souris, ce gris à vomir... ce gris qu'elle ne supportait plus. Il symbolisait l'absence, le chaos... et tout son être mâchait ce gris, en était empli jusqu'au bord ! Désespérément, ses yeux cherchèrent d'autres couleurs, d'autres nuances, même infimes. Sans en avoir conscience, elle se mit à appeler un nom qui lui tournait dans la tête depuis quelques minutes. Un prénom qui signifiait « terre ferme ». La jeune fille fronça le nez et le front, se concentra davantage. Elle sentit à peine la morsure du vent soudain sur sa peau. Elle fit à peine attention à l'éclat du jour, qui grandissait... sauf lorsqu'elle fut obligée de s'arrêter et de fermer les yeux. Xion perçut alors que quelque chose était en train de se produire. Son cœur se mit à battre d'affolement, mais d'une étrange excitation qui l'atterra. Pourquoi ne fuyait-elle pas en direction de la pagode ? Pourquoi plaçait-elle ses bras devant son visage comme une idiote en détresse ? Un corps dur la frappa de plein fouet et la coucha par terre. Ce corps-là attrapa sa taille et la serra contre lui. Xion ne cria pas, même si elle aurait dû. Elle ne chercha pas à se débattre et se laissa faire. Elle mit un moment avant de lever les paupières et de manquer s'étrangler. Le garçon aux cheveux d'argent et aux yeux turquoise... C'était lui ! Non, impossible... Pour s'en assurer, elle déplaça sa main tremblante vers ses ailes. Dans son rêve, il n'en possédait pas. À la place, il avait une arme étrange : une lame sertie par une garde ornée d'un œil bleu félin, et de deux ailes entrelacées. Une aile d'ange et une aile de démon. Ces ailes, il les avait dans le dos. Xion les caressa doucement toutes les deux jusqu'à ce qu'il ouvre les yeux. Elle se pétrifia l'espace d'une seconde, mais elle retrouva ses esprits rapidement et lui sourit tendrement. Elle ne pouvait pas s'en empêcher, c'était viscéral. Même si tout ceci était le jouet d'une hallucination, elle en profitait jusqu'à ce qu'elle s'arrête. Elle le sentit se raidir. D'une voix tremblante d'émotion, Xion lui demanda : - C'est toi... c'est bien toi, mon ange gardien ? Il semblait hébété, mais cela ne dura pas. Sans rien dire, il la serra contre lui à l'étouffer en murmurant d'une voix étranglée – d'une voix grave, mais si belle à ses oreilles : - Je t'ai retrouvée... Kingdom Hearts, alors tu existes vraiment ! * * * Tous deux se relevèrent alors que la nuit achevait de naître au-dessus de leurs têtes. Riku refusait de lâcher Xion, et l'inverse était tout aussi vrai. La neige tombait à gros flocons sur eux et les bénissait de ses étoiles éphémères. Sans que la jeune fille ne s'y fût attendue, le jeune homme la saisit par la taille et les jambes pour la porter étroitement contre lui, lui adressa un sourire confiant, puis lui chuchota : - Accroche-toi. Xion ne se fit pas prier ; Riku déploya ses ailes, donna une impulsion du talon, puis s'éleva avec douceur dans les airs. Elle cacha son visage dans son torse en gémissant : - On pourrait nous voir... Les anges, personne n'y croit ici... - Ne t'inquiète pas. Je ne nous emmène pas bien loin. Je connais ton monde. Xion ne lui posa pas plus de questions. Riku les déplaça sous la sapinière la plus proche, à l'abri des regards. Elle frissonna lorsqu'il la déposa à terre et qu'elle quitta la chaleur de ses bras. Ne sachant trop quoi dire, elle baissa la tête et joua à tasser la neige avec son pied. Riku perçut son désarroi, ses interrogations. Lui-même avait du mal à croire qu'il avait changé d'univers, qu'elle était en chair et en os devant lui. Il ferma les yeux, imagina que ses ailes disparaissaient. Étrangement, cela marcha. Elles ne rentrèrent pas sous sa peau, ni ne se replièrent simplement, elles s'évaporèrent comme par magie. Riku sut qu'il pourrait les rappeler à loisir. C'était sa Keyblade qui se manifestait de cette manière. Xion le regardait en coin, avec une sorte de sourire triste comme elle en avait l'habitude. Ce qui était en train de se produire tenait du miracle pur et dur, mais il ne durerait pas. Les belles choses mouraient si vite... et celle-là ne ferait pas exception. Son ange gardien disparaîtrait à son tour, comme les ailes qu'il possédait. Il ne pouvait pas rester rien que pour elle. Riku s'approcha d'elle et lui saisit le visage à deux mains. Il devait clarifier un point avec elle : il ne retournerait pas dans son univers. Il demeurerait auprès d'elle, et lorsqu'ils seraient prêts, alors il l'y emmènerait. Doucement, il lui demanda : - Quel est ton nom ? Je n'ai jamais pu le savoir... À sa plus grande surprise, elle lui dit : - Mon vrai nom, ou celui que l'on m'a donné à la naissance ? Pourquoi lui avait-elle répondu une chose pareille ? Xion l'ignorait. Était-ce si important ? Hésitante, elle attendit. - Ton vrai nom, si tu penses que celui que tu as ne te convient pas. - Alors je m'appelle Xion. Au moment où elle prononça ces mots. Une douleur vive naquit au sein de la poitrine de Riku. Il geignit et tomba à genoux en se tenant le cœur. Xion... Ce qui manquait à sa mémoire lui revint avec une force inouïe. La cassure se ressouda, et le puzzle prit tout son sens. Xion, celle qui était l'incarnation des souvenirs de Sora, mais qui était parvenue à construire sa véritable personnalité. Xion, la quatorzième membre de l'Organisation condamnée à disparaître... et à être effacée des mémoires. De son côté, Xion mettait les mains devant sa bouche, horrifiée, et reculait. Que lui arrivait-il ? Pourquoi semblait-il souffrir ? - Non, s'il te plaît... Dis-moi ce qu'il y a... Un éclair de lucidité traversa son cerveau de part en part. Une grimace de douleur transparut aussi sur ses traits. Cependant, la seule chose qui se libéra chez elle ne fut pas la mémoire de son ancienne vie... Juste un prénom. Celui qu'elle prononçait tout à l'heure, avant que son « ange » ne lui tombe dessus ! Haletante, elle se mit à genoux, lui prit le visage en coupe et lâcha : - Riku... Ce dernier eut un rictus, puis se calma soudainement. Ses yeux brillaient lorsqu'il lui dit : - Je ne ferai pas comme dans notre autre vie... Perplexe, Xion le regarda comme s'il était devenu fou. Ce dernier lui servit un sourire tendre, rabattit une de ses mèches couleur ébène derrière son oreille et ajouta : - Je sais que tu ne comprends pas, mais tu sauras tout le moment venu. Pour l'instant... La seule chose dont se souvint la jeune fille avant de s'évanouir dans ses bras, à cause de l'émotion, mais aussi du froid et de la fatigue, ce furent ses lèvres contre les siennes, douces et invitantes. Ces lèvres qu'elle attendait depuis si longtemps. * * * Après être entré le plus discrètement possible, Riku la déposa doucement dans son lit en bénissant une chose : en partant de chez elle, Xion avait oublié de fermer la fenêtre. La pièce était glaciale, mais il y remédierait... Les parents de la jeune fille étant absents, il pouvait se permettre de rester à ses côtés quelques heures, avant de chercher un endroit où loger dans la ville même. Toutes ces choses, loin de l'effrayer, le remplissaient d'une sérénité tranquille. Son apparence risquait de choquer, mais s'il le fallait, alors il trouverait une solution aussi. Ce n'était pas compliqué, il était débrouillard et très intelligent. Xion fronça les sourcils, ouvrit des paupières confuses. Ses iris croisèrent ceux de Riku, ce qui la fit bondir de surprise. Calmement, le jeune homme la recoucha et caressa ses cheveux en lui disant : - Je suis là. Je ne suis pas près de partir. - C'est vrai ? Tu me le jures ? Sa voix était éraillée, elle tremblait peut-être de fièvre, mais Xion ne s'était jamais sentie aussi vivante qu'aujourd'hui. Riku lui répondit par un nouveau sourire, puis un baiser qu'il déposa sur ses lèvres. Les joues de la jeune fille s'empourprèrent sous le geste. Personne ne l'avait jamais regardée, ni même embrassée ainsi... - Je te le jure. Je me taillerai une place dans cette ville, comme dans tous les mondes que j'ai visités. Il se mordit la langue après avoir sorti ces mots. Cependant, Xion ne releva pas. Elle était heureuse; elle savait qu'il ne venait pas de la Terre, mais cela ne la dérangeait pas. Celui qu'elle aimait depuis qu'elle était enfant, et même depuis une autre vie... Il existait pour de vrai. C'était tout ce qui comptait. Ces conclusions, Riku les formula aussi au sein de son esprit. Il se pencha vers elle, lui chuchota à l'oreille en lui saisissant la main : - Un seul ciel, une seule destinée. Je suis parvenu à franchir la porte de ton « younivers », oui, ton univers à toi, pour te retrouver. Un ange passa avant qu'il n'ajoute : - Mon cœur... - … est un zéphyr ardent qui rêve de se déposer sur le tien, acheva-t-elle de dire à sa place, la voix pleine d'émotion. - Notre histoire ressemble à une épopée, fit-il remarquer, en s'allongeant à ses côtés. - Un rêve éveillé... mais je ne veux pas qu'il cesse. - On est deux. Le reste, leurs yeux se l'avouèrent avec beaucoup plus d'éloquence. Plus rien n'importait que cet instant présent, que même un souffle de monde ne pourrait rompre malgré l'énergie qu'il y mettrait. L'amour était une bien plus étrange alchimie qu'on ne l'aurait pensé. Le Kingdom Hearts, lui le savait... que ce fût dans un univers ou dans un autre. Lexique:Hōryū-ji (1): Temple bouddhiste situé à Ikaruga, ville de la préfecture de Nara au Japon.
Dernière édition par Volazurys le Mar 29 Jan - 20:49, édité 1 fois |
| | | Danaëlle Garde de Nuit
Messages : 304 Date d'inscription : 23/05/2012 Age : 25 Localisation : Pirate Cove
| Sujet: Re: Partage des cadeaux - Event de Noël 2012 Mar 25 Déc - 20:10 | |
| Titre : Elle souriait des larmes. Monde : Tentative de canon 8D Genre : Romance. WESH Personnages : Kairi, Xion, Sora, Riku. Quelques OCs mineurs par-ci, par-là, mention de Roxas et d'Axel. Pairing : Tentative de KaiShion. Statut : Terminé. Disclaimer : Rien à moi. Wesh. Rating : K+, voire peut-être T parce que y'a un peu de sang à un moment, mais... rien d'hardcore. Résumé : Elle souriait. Elle souriait si fort, d'un mélange de désespoir et de bonheur intense. Remarque : ... Luna. Joyeux noël. Lis cet OS. Profite. AVANT QUE JE NE TE COUPE LA TÊTE PARCE QUE C'EST LA SIXIÈME VERSION DE TON CADEAU. <3
Elle souriait. Elle souriait si fort. Elle souriait. Un si beau sourire.
Pourquoi souriait-elle ? Kairi l’ignorait. Mais elle souriait. Cette autre fille, au loin, si loin.
Elle était assise sur le sable. Les vagues remontaient jusqu’à ses genoux, mouillant, par la même occasion, sa robe d’une blancheur éclatante.
La jeune fille s’approchait. Un pas, un autre. Mais elle ne semblait pas avancer. L’autre fille s’éloignait toujours plus. Elle continuait, pourtant. Se forçait. Impossible de la rejoindre. Pourquoi voulait-elle la rejoindre ? Kairi l’ignorait. Et cette fille la regardait, au loin ; un beau regard bleuté, un regard unique, un si beau regard. Et elle souriait. Souriait encore. Un sourire aux teintes mélancoliques. Un sourire heureux également, un sourire unique qu’elle n’avait jamais vu ailleurs, sur aucune autre bouche.
Elle avait l’impression que ses pieds s’enfonçaient dans le sol. L’autre se redressait. Encore ce regard, encore ce sourire, encadrés par de courtes mèches noires. Elle s’approchait et Kairi pouvait détailler sa silhouette, petite et fine. Il y avait encore quelques rondeurs de l’enfance sur son visage. Comme une petite qui n’aurait pas eu le temps de finir de grandir.
L’autre se posait devant elle. S’assit sur le sable. Les vagues viennent s’échouer sur ses genoux. Le bas de sa robe, d’une blancheur aveuglante, est trempé.
« Kairi ? »
La voix qui s’adressait à elle était cassée. Fatiguée, triste peut-être ; tant d’émotions, tant de désespoir dans une simple voix. Alors qu’elle souriait. Mais si cette fille-enfant était si triste, pourquoi est-ce qu’elle souriait ?
« Le paysage est beau, n’est-ce pas ? Roxas voulait aller à la plage… Mais je n’arrive pas à le conduire jusqu’ici. Il ne veut pas. Il ne me fait pas confiance… Ce que je peux comprendre. »
Ses yeux se fermèrent lentement.
« Excuse-moi. Cette bulle est en quelque sorte la mienne, j’ai presque tous les pouvoirs, quand je m’y trouve. C’est étrange, n’est-ce pas ? Quand je t’ai vue, j’ai été effrayée. Tu peux bouger, maintenant. »
Kairi restait interdite, ne sachant que faire. Devait-elle écouter cette fille ? Elle ne la connaissait même pas ! Où était-elle, d’ailleurs ?
« Je pense qu’il s’agit d’un fragment du cœur de Sora. Comment as-tu pu y avoir accès ? C’est une excellente question, mais je n’ai pas la réponse. Je ne comprends pas tout. Qu’est-ce que c’est rageant de ne pouvoir rien savoir ! »
Elle fronça les sourcils, mais sourit toujours. Son expression était étrange, mais s’effaça bien vite. Et, sans qu’elle ne comprenne pourquoi, le cœur de Kairi battait. Battait vite, battait fort. Trop vite et si fort.
L’autre fille reprit la parole :
« Je m’appelle Xion.
-Et –
-Je sais, la coupa-t-elle en souriant. Je sais, Kairi. »
C’était au tour de la rouquine de froncer les sourcils, à la fois intriguée et passablement agacée.
« Et qui es-tu, Xion ?
-Ah… Personne. Je ne suis personne.
-On ne peut pas être personne ! C’est impossible ! Même les Simili sont quelqu’un !
-Mais je ne suis pas un Simili. »
Son sourire se fit plus grand, plus insistant, plus triste aussi ; comme une pauvre âme au bord du gouffre.
« J’aurais voulu être égoïste. J’aurais voulu rester. Je voudrais qu’ils se souviennent de moi. Kairi, je ne suis personne. Je suis encore plus misérable qu’une ombre, parce que je n’ai plus de lumière pour exister. »
Plus de lumière ? Qu’est-ce que c’est que cette histoire ?
« Qu’est-ce que tu es, alors ?
-Une marionnette. Une poupée cassée. Décousue. Si je n’avais eu ses souvenirs… J’aurais simplement été jeté aux ordures. »
Kairi n’osait plus rien dire. Elle finit par s’asseoir à un bon mètre de Xion qui riait. Un rire discret mais bien là, le seul son qui brise le silence, ce silence qui emplit tout, qui est partout, à en exploser les tympans. Un rire toujours aussi triste, toujours aussi désespéré.
« Je voudrais que Roxas se souvienne de moi. Naminé aussi. Riku. Il ne se souvient pas de moi non plus, n’est-ce pas ? Qu’est-ce que c’est douloureux… Tu as de la chance, Kairi. Tu n’imagines pas à quel point tu peux avoir de la chance d’exister pour de vrai. »
~o~O~o~
La jeune fille se réveilla en sursaut. Sora lui secouait l’épaule.
« Hé ! Kairi ? Tu fatigues ? dit-il en souriant. Bonne sieste ?
-J-… Hein ?
-Tu t’es endormie, rajouta Riku.
-Oh. Je vois.
-Héhé ! T’as raté toutes les explications tordues de la prof. J’suis étonné qu’elle ait pas vu que tu dormais.
-Elle était sans doute trop occupée à hurler contre Selphie.
-Ouais. Allez, on bouge ? Je sais pas vous, mais j’ai pas envie de rester ici pendant trois heures de plus !
-Je suis d’accord, approuva Kairi en se redressant. »
Les trois jeunes gens quittèrent l’établissement. Ils firent une partie de chemin ensemble avant de se séparer d’un geste de la main.
Arrivée chez elle, la jeune fille s’écroula sur son lit. Alors ce n’était qu’un rêve ? Xion, cette plage ? Cette histoire de marionnette, ce n’était qu’un rêve ? Elle était à la fois rassurée et attristée. Alors, cette image – puisque ce n’était visiblement que cela – avait raison ? Elle n’existait pas ?
Non. Kairi ne pouvait y croire. Cette fille existait, d’une façon ou d’une autre. Elle ne saurait expliquer pourquoi, quelle est cette certitude qui l’étreint. Xion était quelqu’un. Et qu’importe le temps qu’il faudra attendre, la rouquine trouverait un moyen de la revoir. De lui prouver qu’elle avait tort, rêve ou pas, mirage ou réalité, qu’importe.
La jeune fille ferma doucement ses paupières. Le sourire lui apparut, ce sourire si beau qui lui donnait envie de pleurer, pleurer tant et tant, pleurer jusqu’à ce que mort s’en suive. Sourire déchirant, sourire de pure mélancolie. Elle ne savait pas comment le décrire vraiment, le décrire de façon correct, appropriée. Il n’existait aucun mot capable de parler correctement de ce sourire.
Kairi ne revit plus Xion pendant un mois. Un long mois où elle ne fit presque que dormir. Ses rêves étaient peuplés d’images à la fois macabres et belles. Elle s’était souvent réveillée en sursaut, la sueur dans le dos, les larmes sur les joues. Elle ne se souvenait presque pas de ce qu’elle avait vu.
A peine un corps, emporté par la glace. Des souvenirs qui s’effacent. C’est aussi simple.
Oui. Un mois comme une éternité ; le temps n’a jamais été aussi lent.
~o~O~o~
« Xion ? Xion ! »
Elle marchait. Court sur la plage qu’elle avait tant attendue, tant cherchée.
« Bon sang… Mais où est-elle ? »
Elle court. Contrairement à la première fois, elle ne se sentait pas bloquée, ni limitée. Elle courait, mais Xion restait introuvable.
Elle tomba finalement sur la jeune fille, recroquevillée dans un coin, au bord d’un gouffre sombre. Kairi se pencha sur elle, posa un doigt sur sa peau. Elle se recula immédiatement. L’autre était froide. Aussi froide qu’un cadavre.
Des sanglots résonnaient. Résonnaient et déraisonnaient dans sa tête et Kairi hurlait. Hurlait, tant ce son lui faisait mal, tant il était douloureux. Elle hurla et sa voix se brisait.
Le ciel de ce coin de paradis se couvrit. Des nuages noirs encre se formaient au-dessus de leurs têtes.
Il pleuvait. Il pleuvait des gouttes de jais, aussi sombres que les nuages ou le gouffre à côté. Prenant son courage à deux mains, la jeune fille tituba jusqu’à Xion et se pencha de nouveau sur elle. Malgré l’étrange dégoût que lui inspirait sa peau trop froide, elle l’enlaça doucement.
La tempête faisait rage, mais Kairi tenait bon. Soudain, elle sentit des griffes dans son dos. Elle se rendit compte qu’elle tenait une ombre tout contre elle.
« Xion ? »
~o~O~o~
Une ombre aux yeux bleus. Une ombre qui semblait sourire. Une ombre qui pleurait.
C’était un cri qui réveilla Kairi. La rouquine ne comprit pas tout de suite, jusqu’à ce que son regard se pose sur ses draps couvert de sang.
« T-Ton dos… Mon Dieu, Kairi ! »
Son dos était lacéré.
« Vite, un médecin ! »
Personne ne savait comment ses blessures étaient apparues.
Seule Kairi le savait. Mais, depuis l’incident, elle s’était recluse, refermée sur elle-même. Elle ne disait plus rien à personne. Même Riku et Sora n’arrivaient pas à la faire parler.
Chaque fois elle retournait voir Xion. Chaque fois, son corps était froid. Chaque fois il pleuvait des gouttes noires, et la jeune fille n’y pouvait rien.
~o~O~o~
« Xion… »
Aucune réponse. Comme d’habitude. Elle ne parlait plus qu’à Xion, presque cadavre sanglotant à longueur de temps. Et dès qu’elle essayait de la toucher, la jeune fille se transformait en ombre. Elle ne pouvait rien faire, si ce n’est parler.
Mais cette fois était différente des autres. Kairi avait mal.
« Xion. Tu m’as fait souffrir. J’ai mal à cause de toi. Tu m’as blessée. »
Aucune réponse. Encore.
« Xion. Après notre première rencontre, j’ai pensé… J’ai pensé qu’il fallait, que tu sois un rêve ou une réalité, te prouver que tu existais. Mais j’ai eu tort. »
La pluie semblait défaillir, l’espace d’un instant.
« J’ai cru… On s’en fiche de ce que j’ai pu croire. Je te croyais plus forte que ça. Tu me déçois, Xion. Je crois même que… Tu me fais pitié. Oui. C’est ça. Je te trouve pitoyable. »
Kairi attendit un peu. Une minute ou deux peut-être avant de se redresser. La jeune fille s’avança un peu en direction de la mer, jusqu’à ce qu’une main s’accroche à son poignet.
Une main chaude.
« J-Je suis désolée. Tellement… Tellement… »
La jeune fille passa une mèche acajou derrière son oreille en souriant tendrement. Elle se baissa et prit Xion dans ses bras.
La tempête se calma, mais les nuages étaient toujours là.
~o~O~o~
« Hé, Xion…
-Oui ?
-Le temps, ici, c’est toi qui le décide ? »
Une expression gênée naquit sur le visage de la brune.
« Pas vraiment… Je pense que le temps représente mon état d’esprit. Ce que je trouve étrange, puisque je ne suis pas sensée avoir de cœur. »
Elle dit ces derniers mots mélancoliquement.
« Tu ne veux pas me parler un peu de toi ? De ce que tu étais, avant.
-Je n’étais rien, avant…
-Xion !
-Désolée ! »
Kairi marmonna, passablement vexée.
« Parle-moi d’avant ici, s’il-te-plaît !
-J’ai peur que tu me détestes, après ça …
-Pourquoi je te détesterais ? »
Son regard bleuté se tourna vers l’horizon. Toujours sombre, il y avait cependant quelques nuances de gris qui venaient teinter ce triste décor.
« J’ai fais partit de l’organisation XIII pendant presque un an.
-Sérieusement ? Mais… les treize membres ont tous disparus !
-J’étais le quatorzième.
-Ca n’a aucun sens ! »
Xion sourit tristement en se tournant vers Kairi.
« Je t’avais dis qu’avant, je n’étais rien.
-Xion, je-
-Ne sois pas désolée. C’est comme ça. »
~o~O~o~
« Kairi !
-Sora ?
-Je suis content que tu ailles mieux. Tu ne sais pas à quel point on était inquiets, Riku et moi, quand tu –
-Oui, je sais. Désolée, encore…
-Ne t’excuse pas, voyons ! On s’est dit qu’on pourrait aller se balader sur la plage, tous les trois. T’en dis quoi ?
-Je viens ! »
La jeune fille se mit à sourire, ce qui rassura son ami. Le mutisme de Kairi avait été très dur à supporter pour lui. Il était heureux qu’elle aille mieux.
La journée passa étrangement vite. Les trois jeunes gens se retrouvèrent sur la plage dès que possible. Ils commèrent à parler de la pluie et du beau temps, alors que le soleil commençait à se coucher et que les étoiles apparaissaient les unes à la suite des autres.
« Je crois que je vais y aller. J’ai promis à ma mère de ne pas rentrer trop tard.
-Ah, déjà ? Tu veux qu’on te raccompagne ?
-Non, ça – »
Un voile noir tomba sur les yeux de la jeune fille qui s’écroula sur le sol, sous les cris de panique de Sora.
~o~O~o~
« Xion ?
-Kairi ? »
Les deux jeunes filles s’échangèrent un bref regard où se mêlait incompréhension et… joie ?
« Qu’est-ce que tu fais ici ? Enfin, je veux dire –
-J’ai fais un malaise, je crois…
-Oh… J’espère que tu vas bien… »
Xion s’assit sur le sable en se mordant la lèvre.
« Xion… Pourquoi tu t’es transformée en ombre, quand j’essayais de te toucher ?
-Je ne sais pas.. C’était instinctif, je crois.
-Je… Vois. Je pense. »
La jeune fille se mit à rire nerveusement.
« Nous ne sommes sûres de rien… C’est effrayant.
-Xion, s’il-te-plaît. Parle-moi d’avant.
-Pourquoi tu y tiens tant ? »
Bonne question ; Kairi n’en savait rien. Elle voulait que Xion lui raconte sa vie, les bons et mauvais moments… Elle voulait qu’elle lui raconte toute son existence, sans savoir pourquoi.
« Je ne sais pas trop… j’ai besoin de savoir, tu comprends ? »
L’autre lui sourit tristement.
« Si tu y tiens. »
Xion lui parla longuement de l’organisation. Des missions. De la haine que Saïx lui portait, des glaces sur le clocher, en compagnie d’Axel et Roxas, de Riku…
« Je me suis toujours posé une question… Comment Riku faisait-il pour y voir, avec son bandeau ?
-Je ne sais pas. Je ne me suis jamais posée la question, en fait… »
Elle lui raconta quelques anecdotes ; la fois où elle avait perdu le contrôle de sa Keyblade et où Roxas s’était retrouvé avec un bâton pour combattre. Ou bien la fois où le Supérieur avait eu l’idée d’envoyer Axel à Atlantica pour elle ne sais plus quelle raison …
« C’était tellement drôle… Je te jure ! »
Finalement, la brune s’arrêta. Elle avait presque tout raconté. Presque.
« Xion ?
-Je… Excuse-moi. Je me sens nostalgique. »
Les quelques rayons de soleil, qui avaient réussit à percer la barrière de nuages, disparurent.
« Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
-J’ai rencontré Naminé. J’ai découvert que je n’étais qu’une marionnette. Je devais rejoindre Sora, parce qu’une partie de ses souvenirs étaient en moi. J’ai… Xemnas s’est servit de moi pour combattre Roxas. Nous ne pouvions plus coexister. J’ai été tuée par mon meilleur ami, Kairi. Et je savais que si je venais à disparaitre, personne ne se souviendrait de moi. J’ai détesté Sora. J’ai détesté Sora, et je crois que je le déteste toujours de m’avoir arraché à cette vie. Je le déteste d’avoir empêché Roxas de vivre en le créant. Je le déteste d’être un porteur. Je le déteste parce qu’il a tué des gens à qui je me suis attachée. J’ai sans cesse l’impression qu’Axel est mort de sa faute… »
Les larmes coulaient le long de ses joues.
« Kairi, est-ce que tu as déjà vu ton meilleur ami se sacrifier sous tes yeux… Sans pouvoir rien faire ? Il s’est suicidé, Kairi. Et Roxas… Roxas… »
Une goutte tomba du ciel.
Kairi n’osait plus rien dire.
~o~O~o~
« C’est sans doute dû à sa blessure. Ne vous inquiétez pas. Il serait cependant préférable de la garder au lit quelques temps.
-Merci beaucoup. »
L’homme se redressa et quitta la pièce.
« Ma chérie… tu te réveilles enfin… dit sa mère, d’une voix douce.
-Maman ? Qu’est-ce qui c’est passé ?
-Tu as fais un malaise. Apparemment, c’est à cause de ta blessure… Reste au lit, d’accord ? Ton père et moi allons te laisser te reposer. Si tu as besoin de quelque chose, appelle-moi. »
Kairi hocha la tête. Ses paupières étaient maintenant closes.
Cette nuit-là, ses rêves ne furent que néant.
~o~O~o~
« Salut, Kairi !
-Sora ?
-Oui, c’est mon nom. Je viens te rendre visite ! Riku est là aussi, mais il a dit qu’il ne préférait pas rentrer…
-Est-ce que tu peux lui dire que je dois lui parler ? En privé, s’il-te-plaît. »
Le jeune homme eut l’air passablement déçu. Malgré tout, il sortit de la chambre, souhaitant un bon rétablissement à son amie. Riku entra dans la pièce quelques secondes plus tard.
« Hm ?
-Tu connais une certaine « Xion » ? »
L’argenté fronça les sourcils. Xion ? Non, inconnue à cette adresse.
« Pour quelle raison ?
-Oh, pour rien… Je me posais juste la question. »
Ils parlèrent encore quelques instants, jusqu’à ce que le jeune homme quitte la chambre. Kairi doutait. Et si Xion lui mentait ? Et si cette fille tentait de la manipuler ? Elle n’avait aucun moyen de prouver son existence. Peut-être n’était-elle qu’un mirage, crée par elle ne sait quel ennemi pour l’amadouer. La rouquine n’arrivait pas à y croire. Quelque chose la poussait à faire confiance à cette fille. Et son cœur battait si vite quand elle était là, quand elles parlaient ensemble…
Kairi s’endormit, l’âme rongée par le doute.
~o~O~o~
« Kairi. Je t’attendais.
-Xion ?
-Oui. Je –
-Pourquoi tu te caches ?
-N’avance pas ! »
La voix de Xion résonna dans la bulle.
« Je… Prendre contact avec toi a dû altérer mon apparence. Je ne veux pas que tu me vois comme ça.
-Xion … Ne dis pas ça ! Je suis sûre que tu n’es pas si horrible !
-Ne me touche pas ! »
Malgré les hurlements de Xion, l’autre fille la tira jusqu’à la lumière.
Elle écarquilla les yeux. Son amie – elle pouvait la considérer ainsi, malgré les battements irréguliers de son cœur – était…
« Oh.. Xion… »
L’ancienne membre de l’organisation s’était transformée en une sorte de sans-cœur. Malgré son apparence, et malgré la peur qui l’étreignait en cet instant, Kairi la prit dans ses bras.
Une grande lumière jaillit alors, transperçant les nuages d’encre qui disparurent. Le sans-cœur disparu. A sa place, une jeune fille, les larmes aux yeux.
Comme elle avait fait pour Sora, quelques temps plus tôt. Kairi continuait de serrer Xion fort contre elle.
« J’ai eu peur. Si peur.
-Kairi…
-Je comprends pas. Xion, je comprends pas, mais quand tu es là, j’ai mon cœur qui bat. Il bat tellement fort qu’il m’en fait mal. J’ai quelque chose qui bouge dans mon ventre, comme des papillons. Je me sens étrange et quand tu n’es plus là… Je t’appelle, je veux te voir. J’ai besoin de te voir. Ca en devient vital. Je ne comprends pas… Pourquoi ? Pourquoi tu me fais cet effet-là ? J’ai beau le dire que tu es peut-être dangereux, mon cœur ne veut pas m’écouter et il prend toujours le dessus ! Qu’est-ce que tu m’as fait ?... »
La jeune fille avait dit tout cela d’une traite. Elle se recula et restait là, immobile, une expression étrange plaquée sur le visage.
« Je crois que moi aussi. Il y a une sensation étrange qui me prend. Et si tu savais comme je pleure, quand tu repars dans ton monde à toi… Kairi… »
Un orage éclata en même temps que le morceau de chair qui lui servait de cœur. Kairi ne bougeait toujours pas. Un tonnerre violent, accompagné d’un vent qui ne semblait pas les toucher.
Xion tituba légèrement et s’accrocha aux épaules de son vis-à-vis.
« Je crois que je –
-Moi aussi. Je pense. Tout est confus. Ca se bat en moi, ça s’écrase partout. Je ne comprends pas bien, mais … »
La brune posa doucement ses lèvres sur celles de l’autre fille. C’était un baiser étrangement brouillon, hésitant. Elles se serrèrent l’une contre l’autre, tremblantes. La tempête qui ravageait la plage était lointaine.
~o~O~o~
Les jours suivants furent terribles pour Kairi.
Elle était à la fois heureuse d’avoir comprit ce qu’elle ressentait, encore plus de savoir que ce sentiment était réciproque… Mais Xion ne la laissait plus entrer dans sa bulle. Qu’avait-elle ?
La jeune fille était inquiète, triste. Ses deux amis, qui lui rendaient visite presque quotidiennement, le remarquèrent bien vite. Se fut Riku qui, le premier, demanda :
« Ca concerne encore cette Xion ?
-… Comment est-ce que tu as deviné ?
-J’ai mes secrets. Elle te fait mal ?
-Oui… » répondit Kairi, hésitante. Pouvait-elle vraiment lui parler de Xion ? Elle craignait sa réaction.
« Tu peux tout me dire. On est ami, non ? Sora n’est pas là aujourd’hui, donc tu auras le temps de lui en parler la prochaine fois qu’il viendra.
-Je ne sais pas si j’arriverais à le lui dire… C’est compliqué… »
Riku sourit légèrement. Il était debout, appuyé contre un mur, à côté du lit de Kairi.
« Tu l’aimes ? »
La question résonnait dans la pièce. La fille s’empourpra et marmonna quelques phrases sans aucun sens.
« Et c’est réciproque ?
-J-Je crois.
-Comment ça, tu crois ? Tu lui a dis ?
-Pas directement. M-Mais, elle a –
-Elle t’a embrassée ? »
Kairi sourit, gênée.
« Comment est-ce que tu fais pour lire en moi comme dans un livre ouvert ?
-Je te connais depuis longtemps, c’est tout. »
Elle n’avait rien à ajouter.
Il lui parla longuement, ce qui ne lui ressemblait pas vraiment ; il allait à l’essentiel, sans tourner autour du pot. Généralement. Il se tut également de nombreuses fois pour l’écouter, la consoler.
« Tu dois vraiment lui parler.
-Mais je ne peux pas aller la voir ! »
Elle ne lui avait pas dit qu’elle n’apparaissait que dans ses rêves.
« Tu ne peux pas la forcer. Je pense qu’elle doit réfléchir à tout ça. Elle aussi, ça doit la peser. Elle viendra te voir d’elle-même quand le moment sera venu.
-Tu es sûr ?
-Oui. Elle semble t’aimer, n’est-ce pas ? Et Kairi… »
Il la regardait dans les yeux.
« Ne crois jamais qu’on va t’en vouloir parce que tu es amoureuse. Fille ou garçon, d’accord ? Tu es notre amie. Et on ne peut pas abandonner une amie, encore moins quand elle a besoin de nous. »
Sur ces mots, il quitta la chambre, laissant Kairi méditer seule. Cette dernière ferma les yeux. Tout était sombre autour d’elle.
~o~O~o~
« Xion ? »
Il n’y avait que le silence. Sa voix semblait s’y perdre.
« Xion ! Je ne sais pas où tu es, je ne sais pas si tu m’entends, mais si c’est le cas… »
Elle inspira, nerveuse.
« Je t’aime ! Je t’aime, si tu savais. Je t’aime, Xion. J’ai veux te voir. J’ai besoin de te voir ! Xion ! »
Une grande lumière apparue alors. Kairi lui fit dos ; elle était bien trop aveuglante.
La jeune fille atterrit sur la plage. Elle regarda autour d’elle. Xion n’était nulle-part.
Elle marcha un long moment sur le sable. Le ciel était gris, au-dessus de sa tête baissée. Les yeux fermés, elle profitait de la sensation presque désagréable des grains sur sa peau, ayant retiré ses chaussures un peu plus tôt. C’était étrange. Surtout pour un rêve. Mais elle n’y prêtait pas attention. Ce n’était, de toute façon, pas très important.
Son pied entra en contact avec un tissu. Elle rouvrit les paupières ; devant elle, un manteau de l’organisation… Appartenait-il à Xion ?
Kairi s’assit sur le sol. Les vagues venaient s’écraser contre ses jambes, mouillant par la même occasion sa tenue.
« Kairi…
-Xion. »
La brune passa une main dans ses cheveux en détournant la tête, gênée. Elle n’osait pas s’approcher de trop.
« J-je …
-Non. Ne dis rien. C’est inutile. Est-ce que tu as eu le temps de réfléchir ?
-Je ne suis pas sûre, Kairi. Comment cette histoire se finirait-elle ?
-Je vois. Je crois que… Je vais partir. Je vais bien trouver un moyen. »
La rouquine se releva, un sourire mélancolique scotché aux lèvres.
« Je suis triste qu’on finisse comme ça.
-Kairi, attends –
-Non. Xion, je t’aime. Mais je ne me refuse à attendre que tu arrêtes de douter…
-Tu ne comprends pas ? Je n’existe pas !
-Si. Tu existes. Tu es devant moi. Et qu’importe le temps qu’il aurait fallut, j’aurais trouvé un moyen de t’avoir près de moi. »
Une larme se forma au coin de l’œil de la brune qui ne bougeait pas, interdite. Avait-elle bien entendu ? Ne rêvait-elle pas ?
« Xion, je… Tu m’as dis que tu étais une moins que rien. Plus pathétique qu’une ombre. Tu m’as dis que tu n’avais plus de lumière… J’aurais voulu devenir ta lumière. J’aurais… Non. Rien ne se passe comme on le voudrait. Jamais. N’est-ce pas ? J’ai été… Tellement heureuse de te connaître… »
Une goutte tombait dans la mer qui trembla. Une larme tombait sur le sol qui ne bougea pas. Kairi lui faisait à présent dos. Elle pleurait. Des chutes d’eau salées s’échappaient de ses yeux.
« Non.. Non, pas toi…
-Xion, adieu. Je t’aime. »
La jeune fille commença à marcher, jusqu’à ce qu’une goutte tombe sur sa tête. Une, puis dix, puis des milliards. Il pleuvait.
Son visage se tournait vers le ciel.
« Kairi ! Tu n’as pas le droit ! Tu n’as pas le droit de me rendre aussi heureuse et de me faire aussi mal, puis de partir, comme ça ! Tu n’as pas le droit de m’arracher le cœur, qu’il existe ou pas, et de repartir avec comme une voleuse ! Tu n’as pas le droit, tu m’entends ?! »
Xion hurlait. Hurlait à s’en briser la voix. Elle fit un pas. Un premier. Et se mit à courir pour rejoindre l’autre, l’autre fille qui était à, quoi, dix mètres d’elle, à peine ?
Une fois que la brune fut devant elle, Kairi la regarda. Une main s’approcha de sa joue, passa une mèche trempée derrière son oreille. Une main d’une douceur infinie.
« Kairi. Je t’aime. Je ne suis pas sûre de ce que ça peut vouloir dire, mais je t’aime. Tu es ma lumière. »
Xion n’était qu’à quelques millimètres d’elle. Elle sentait son souffle chaud sur son visage. Elle pouvait détailler ses yeux, si beaux yeux. Si profond qu’elle aurait pu s’y noyer, en cet instant.
Dans un élan passionné, elle parcouru la distance qui séparait leurs lèvres. Peut-être était-il encore plus brouillon que la première fois, peut-être était-il plus doux, plus hésitant, mais c’était le meilleur baiser du monde.
Au-dessus d’elles, les nuages devinrent d’abord blancs, puis disparurent, laissant place à un magnifique crépuscule. Kairi se recula très légèrement et serra la main de Xion dans la sienne.
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| Sujet: Re: Partage des cadeaux - Event de Noël 2012 Mer 26 Déc - 1:54 | |
| Titre : Rivière (ou comment trouver dans l'urgence un des titres les plus merdiques du monde, par Nuity) Monde : UA, avec références canons. Genre : Romance... et devine quoi ? Hurt/Comfort. Ouais t'as bien lu. HURT/COMFORT. Enfin, il me semble bien. u.u Personnages : Tu verras. Statut : Terminé. Disclaimer : Rien à moi. Wesh. (vive les copier-coller des messages de Mia quand on a la flemme d'aller choper le formulaire ahaha *bam*) Rating : Oh, K+, je pense. Résumé : Il avait des cheveux en pétard, châtains, qui ruisselaient d’eau sans avoir l’air mouillés, et un grand sourire aux lèvres. Un sourire lumineux. Tu n’en avais jamais vu de pareil. Dans ton monde, personne ne sourit jamais. Parce que personne n’est heureux. Remarque : Je te jure que le style d'écriture s'est IMPOSE à moi. J'avais RIEN demandé. Je te jure. >.< *part* Enfin, tu vois, je me suis réveillée à un moment à deux heures du mat' avec un plot bunny sous mes yeux ensommeillés, et j'ai du relire ce truc au moins une dizaine de fois, donc normalement c'est potable. (Même si j'en ai bavé parce qu'au moment de vérifier ta liste "OOOH MERDE ILS DEVAIENT S'EMBRASSER" /fuit/ J'ai galéré après coup... >.<) Et tu sais quoi ? Je crois bien même que ça se finit pas trop mal. \o/ So. Je sais pas si ça va te plaire mais en tous cas... JOYEUX NOËL CRIM. <3 (Au passage, ce truc m'a été vaguement inspirée par une très belle bande dessinée nommée Mon arbre, qui m'est revenue à l'esprit pendant que je l'écrivais.) (Et au deuxième passage, c'est assez court... Je suis désolée. >__<)
Tu regardes de l’autre côté du rivage.
Ca a toujours été une drôle de rivière. Enfin, tu la trouvais un peu bizarre, tu supposais, comme tu supposais beaucoup de choses, mais ça ne t’empêchait pas d’y retourner tous les jours. Parce qu’il y était.
Tu ne sais pas exactement pourquoi tu y retournes maintenant qu’il n’y est plus ; quel intérêt ? As-tu seulement l’espoir de le retrouver ? C’est stupide. Terriblement stupide. Il ne sera plus jamais là. Tu le sais, au plus profond de toi ; tu l’as su au moment même où il t’a dit au revoir. C’est un pressentiment, un stupide pressentiment. Stupide, stupide, stupide. Tout te semble stupide aujourd’hui. Tout te semblait stupide hier aussi. Ca fait une journée qu’il est parti ; ça fait trente ans que tu es partie...
Il riait souvent, et tu lui disais qu’il était stupide lui aussi. Ca te semblait si bizarre de rire aussi facilement. Aussi naturellement. Tu as toujours craint de rire. Les adultes n’aimaient pas quand tu riais. Pas normal. Pourquoi aurais-tu ri d’ailleurs ? Toi, coincée dans ce monde si propre, si blanc. Trop éclatant. Inintéressant. Tu t’ennuyais, alors tu t’évadais.
Un carnet, des crayons. Une feuille vierge, de la couleur. Des taches, des taches partout. Tes dessins ne ressemblaient à rien de connu, les personnages que tu couchais parfois sur le papier t’étaient familiers, existaient sans exister. Ils ne vivaient pas dans ton environnement, mais tu étais persuadée qu’ils avaient leur propre volonté. Comme cette fille aux cheveux roux-rouge-sang. Elle s’était imposée à toi. Elle t’avait obligée à la dessiner.
Ils étaient tous là. Présents à la lisière de ta conscience.
Tu n’étais pas normale, pas à ta place. Alors tes parents t’avaient envoyé ailleurs. Dans un endroit tout blanc, tout propre, avec des gens tout blancs, tout propres. En disant que tu serais mieux là-bas. Mais peut-être se débarrassaient-ils simplement de toi. Tu n’en avais rien à faire. Rien du tout.
Il y avait une dame là-bas, qui t’avait demandé si tu étais triste. Tu avais levé tes yeux bleus vers elle, et tu l’avais fixée, presque surprise ; triste ? A quoi bon être triste ? Parce que tu étais loin de tes parents ? Mais qu’importait, au juste ? Tu étais sûre de ne pas vraiment être née d’eux. Ca devait être une erreur, une simple erreur, juste une erreur.
Ce monde était une erreur, et tu étais une erreur.
Les jolis iris vert, vert pâle, vert doux, s’étaient teintés d’un sentiment que tu avais qualifié intérieurement de « compassion ». Elle semblait affligée par ce qui t’arrivait.
Qu’est-ce qui t’arrivait au juste, là était la question.
Ou plutôt, quelque chose t’arrivait-il vraiment, ou était-ce juste eux qui n’avaient pas conscience qu’ils vivaient dans un rêve ? Tout ça n’était qu’un rêve pour toi. Mais tu n’allais pas te réveiller. Pas tout de suite. Pas maintenant.
Tu avais à peine huit ans à l’époque.
Trois mois plus tard, ils ont commencé à te faire sortir en dehors des grands murs blancs qui entouraient le parc, tandis que toi, tu commençais à réaliser que ça n’était que le début. Le début de quoi ? Le début de tout.
Et puis il y avait eu ce jour-là.
Tu te souvenais qu’à ce moment-là tu venais de te faire une amie. Une amie, vraiment ? Peut-être. Le terme n’avait pas de réelle signification pour toi. Elle était jolie. Pâle comme une poupée de porcelaine. Des yeux comme la mer et des cheveux comme la nuit. Courts, qui s’agitaient autour de son visage tout fin, tout blanc. Blanc blanc blanc. Ca fait si mal aux yeux le blanc.
Souvenirs d’une dame qui te donnait des mots. Tu devais répondre par d’autres.
« Cheminée. - Feu. - Clé. - Souvenirs. - Solitude. - Habituelle. - Manoir. - Blanc. - ... Blanc ? - Prison. »
Apparemment tes réponses n’étaient pas les bonnes. Y en avait-il des bonnes, au moins ?
Ils voulaient vous emmener près des bois. Ils avaient parlé de forêt, cabanes, rochers, explorer, et ça leur fera du bien d’être un peu en liberté comme ça. Tu te rappelles vaguement que tu serrais la main de la fille – quel était son nom, déjà ? – dans la tienne, très fort. Tu n’as jamais aimé être seule. De toutes façons, vous deviez rester ensemble. En groupe. Tu n’as jamais aimé les groupes non plus. Trop grands. Trop terrifiants. Ils t’évoquaient quelque chose sans que tu puisses savoir quoi. Quelque chose de menaçant, de noir. Peut-être que l’oubli était la meilleure solution, finalement.
Ils vous on fait avancer dans les feuilles mortes ; leurs pas faisaient crisser le sol, trop bruyants, trop agaçants, et pourtant tu étais légère, légère comme une plume, et silencieuse. Contrairement à eux. Comme un fantôme...
Ton regard a été attiré par un éclat de soleil qui se répercutait sur... quoi au juste ? Même en plissant les yeux, tu n’arrivais pas à savoir. Ton attention avait été captée.
Tu as cessé d’écouter l’adulte qui vous guidait entre les arbres, cessé de mâchouiller une de tes mèches distraitement, cessé de tenir la main de la fille, de la petite poupée fragile, et tu t’es dirigée vers l’éclat de lumière, sans un mot, sans un soupir. Personne ne t’a remarquée. Trop pâle. Trop discrète. Evanescente.
Tu es allée jusqu’à l’endroit ; c’était une rivière. Une drôle de rivière. Trop brillante, sans être blanche. Tu ne savais pas à l’époque qu’il y avait une autre couleur que le blanc qui pouvait faire mal aux yeux. Tu t’es approchée de l’eau avec curiosité, une curiosité que, tu t’en rendais compte, tu n’avais jamais éprouvée auparavant, parce qu’il n’y avait rien en ce monde qui méritât ton attention, si ce n’était cette eau mouvante, vivante, et son éclat. Elle te donnait l’impression qu’elle souriait. De l’eau qui souriait.
Etrange.
Tu t’es approchée encore, tu as tendu la main jusqu’à toucher la surface lisse et joueuse, avant de reculer en poussant un petit cri. C’était froid. Bizarre.
Avec la méfiance d’un animal sauvage, tu as de nouveau effleuré le liquide glacé, jusqu’à plonger ton doigt dedans ; et puis un grand bruit a retenti, comme si la rivière s’ouvrait en deux – alors que le fluide n’avait pas bougé, coulait toujours de la même manière – et il était sorti de l’eau.
Tu avais ouvert de grands yeux ; les siens étaient bleus, d’un bleu que tu n’avais jamais vu. Pétillant. Pas comme celui de la fille, pas comme l’océan... Plutôt comme le ciel. Il avait des cheveux en pétard, châtains, qui ruisselaient d’eau sans avoir l’air mouillés, et un grand sourire aux lèvres. Un sourire lumineux. Tu n’en avais jamais vu de pareil. Dans ton monde, personne ne sourit jamais. Parce que personne n’est heureux.
Et puis, avant que lui ou toi puisse dire quoi que ce soit, un appel à retenti, et une adulte furieuse est arrivée et t’a prise par le bras, son regard brun brillant de reproche. Tu aurais presque pu croire qu’elle avait eu peur de te perdre – si tu n’avais pas eu conscience qu’elle ne voulait juste pas avoir de problèmes. C’était ce qu’elle-même avait dit quelques jours avant.
Ils t’ont traînée jusqu’à la grande maison blanche et tu t’es retrouvée à nouveau enfermée.
« Fleurs. - Faux. - Sourire. - Rare. - Froid. - Perpétuel. - Oublier. - Remplacer. »
Tu n’as pu ressortir que deux mois après. Ils avaient décidé de retenter l’expérience.
Tu n’as pas vraiment réussi à tenir en place ; tu voulais juste retrouver la rivière.
Mais quand tu es arrivée à l’emplacement où elle était censée se trouver, il n’y avait rien. Des feuilles mortes et des arbres. Tu n’as pas compris.
Ils t’ont rattrapée à nouveau, et cette fois-ci, tu leur as dit que tu t’étais perdue. Ils t’ont crue.
Naïfs, si naïfs...
Le garçon aux yeux de ciel était partout dans ton esprit. Dans tes rêves aussi.
« Neige ? - Blanc. Trop blanc. Encore trop blanc. »
Il a neigé, oui. Beaucoup.
Tout était blanc comme l’intérieur de la maison et tu trouvais ça peut-être un peu triste. Trop étincelant. Trop voyant.
Tu es restée dehors toute la journée avec les autres enfants, et puis tu t’es endormie en plein milieu de l’étendue blanche. Trop froid. Trop tentant. Personne ne t’as vue. Trop discrète. Fantomatique. Evanescente.
Quand tu t’es réveillée, il faisait nuit et tu étais gelée. Tu n’avais même plus la force de frissonner.
Tu n’étais plus dans le parc. Ni même dans l’enceinte du grand bâtiment blanc.
Tu étais en face d’une rivière, une rivière que tu as reconnue immédiatement, parce qu’elle réfléchissait le soleil alors qu’il était couché.
Et il était là.
Tu as souri en même temps que lui.
« Mer ? - Ciel. - Rivière ? - Liberté. »
Le lendemain, tu as réalisé que tu avais rêvé. « Personne ne vit dans une rivière, enfin ! Cesse de t’imaginer des choses ! »
« Crayon ? - Arme. - Carnet ? - Chaînes. »
Tu ne te souviens plus exactement de la première fois qu’il t’a embrassée. Peut-être que ça n’était qu’un énième songe, mais tu ne le voyais plus autre part, alors peu importait. Tu te rappelles juste de la sensation de ses lèvres sur les tiennes, et le curieux sentiment que tu avais de toucher peut-être l’essence même de l’eau, ou celle du vent, ou le ciel dans son ensemble ; ça aussi t’était égal, peut-être était-ce un mélange de tout cela à la fois. Tu te rappelles juste que tu aurais voulu que ça ne s’arrête jamais.
Mais tout finit toujours par s’arrêter.
Tu es partie des années et des années plus tard. Tu t’es éloignée. Ils t’ont laissée sortir parce que tu étais majeure et qu’il fallait de réinsérer dans la société.
Tu as trouvé ça stupide.
Terriblement stupide.
Mais tu l’as eu, ta place. Tu es devenue une adulte raisonnable et tu ne l’as plus jamais vu la nuit quand tu dormais. Tu as cessé de sourire, cessé de chanter, cessé de dessiner. La fille était restée là-bas. Trop jeune, trop jeune pour partir avec toi. Peut-être que c’était triste. Mais tu avais perdu la notion de « ce qui était triste » depuis trop longtemps.
Maintenant tu es revenue et tu regardes de l’autre côté du rivage. Ca fait longtemps, longtemps que tu n’es plus une enfant. Ni même une adolescente. Tu es à la fin.
« Crépuscule ? - Virtuel. - Aube ? - Lisière. »
Ca ne veut rien dire... Ca ne veut rien dire du tout.
Tout doit s’achever maintenant et tu sais ce qu’il faut faire.
Tu as retrouvé la rivière. Elle est réapparue. Comme par magie. Et elle brille de mille feux.
Tu ne t’es jamais sentie aussi sereine ; alors lentement, sans même retirer ta robe, ta robe blanche, trop blanche, tu poses un pied dans l’eau, puis deux. Elle te semble moins froide qu’elle ne l’était avant.
Tu es déjà immergée jusqu’aux épaules et tu souris. Pour la première fois, la voix de la dame qui te questionnait est remplacée par une autre. Plus douce. Plus enfantine.
Finalement, il est là. Finalement, il t’a attendu.
Tu plonges, ton corps dans la rivière, tes yeux dans les siens. Ils sont toujours le ciel. Lui n’a pas changé. Il sourit aussi.
« Je suis heureux que tu reviennes enfin, Namine. » |
| | | Plume d'Eau Papillon des Rêves
Messages : 191 Date d'inscription : 23/05/2012 Age : 32
| Sujet: Re: Partage des cadeaux - Event de Noël 2012 Dim 20 Jan - 23:26 | |
| Titre : Neige Monde : AU Genres : Romance, Angst Personnages : Riku, Sora Pairing : Soriku (Yaoi) Statut : Complet Disclaimer : Yahouuuu j'ai acheté Riku ! ... nan j'déconne, rien est à moi. .____. Raiting : T Résumé : Quand on mêle bohémiens, rêveurs, neige, douceur, haine et Noël, que se passe-t-il... ? Remarque : BORDEEEEEEEEEEEEEEEL je l'ai enfin finit ! Bon sang de bon soir, c'était laborieux ! Mais voilà, Shiro-chan d'amour, j'espère vraiment que ça te plaira. Je suis vraiment vraiment [...] vraiment vraiment désolée de tout ce retard éè Joyeux Noël <3 Neige - Le premier regard sur le ciel, virgule, nous révèle une Voie lactée, virgule… Riku soupira le plus discrètement possible. Il aimait le ciel. Sa beauté azuréenne, les nuages de coton qui le parsemaient parfois. Les étoiles, la nuit, qui l’habitaient, millions de points brillant comme l’espoir qu’il aimait contempler par sa fenêtre jusqu’à en attraper des rhumes carabinés. Il aimait aussi ses diverses humeurs. La pluie, parfois, qui tambourinait contre les toits et les fenêtres en une musique endiablée. Le vent qui l’aidait à varier les trilles de ses mélodies. Ou la neige, quand la température baissait de plus en plus, qui s’installait tranquillement, toujours silencieuse. Qui recouvrait tout d’un long manteau blanc, comme pour recouvrir ses problèmes avec… Mais voilà. S’il aimait le ciel… il haïssait la dictée. Il n’avait jamais aimé ça, quel que soit le sujet sur lequel elle portait. Cela l’ennuyait profondément. Comment c’était possible, d’abord, qu’à presque 17 ans, il dût encore subir une telle torture à l’école ? Il voulait bien que le fait d’habiter dans un petit village plus que reculé n’aidait pas au développement du programme scolaire, mais il y avait quand même des limites… non ? Décidé à ne plus s’encombrer de tels problèmes, il tourna son regard cyan en direction de la fenêtre, juste à côté de lui, et plus loin, sur le paysage qu’il voyait. Une forêt entourait par trois côtés l’école où ils se trouvaient, l’autre étant un simple chemin pour rejoindre le village, à quelques minutes à pied, dans la vallée en contrebas. Ce n’était donc que forêt à perte de vue. Conifères aux épines d’un vert terne, le sol brun rendu boueux par la pluie de la veille, pas un rai de lumière… Bref, la joie de vivre faite forêt. Un détail attira néanmoins son attention. Venant par la gauche – pas si loin du chemin, elles provenaient sans doute du village ou de ses environs – deux silhouettes remontaient la pente en direction de l’établissement. Un homme adulte, visiblement, et une autre silhouette légèrement plus petite, encapuchonnée. Peut-être un nouvel élève ? Il ne tarda pas à le savoir. Quelques minutes après que les deux personnes eurent disparu du champ de vision de Riku, on frappa trois fois à la porte de la classe. Après que leur professeur eut lancé un «entrez !», vaguement ennuyé par l’interruption de sa dictée, le panneau de bois s’ouvrit. Comme il l’avait deviné, les deux silhouettes se découpaient dans l’encadrement de la porte. Ils avancèrent après quelques secondes, attendant que le professeur s’approche. - C’est pour quoi ? lança-t-elle d’une voix un peu sèche. - Mon fils, je souhaiterais qu’il rejoigne votre école un moment. Nous sommes arrivés ce matin, je ne sais pas si vous nous avez vus… Nous ne restons pas longtemps, mais je tiens à ce qu’il ait la meilleure éducation possible, vous comprenez… Un silence pesant se fit entendre. De toute évidence, non, l’enseignante ne comprenait pas vraiment. Elle baissa les yeux vers la silhouette encapuchonnée qui, maintenue en place par la poigne serrée sur son avant-bras, restait aussi calme et silencieuse qu’une statue de glace. Au bout d’un moment, un soupir sifflant entre ses dents, elle marmonna: - Quel est ton nom, petit ? Seul le silence lui répondit. Comprenant que le gamin ne semblait pas du tout décidé à ouvrir la bouche, son père retira la capuche qui lui cachait la moitié du visage. Tandis que des épis bruns étaient libérés dans tous les sens, il reprit la parole pour répondre à sa place. - Sora. Il s’appelle Sora. - Sora comment ? - Il n’a pas de nom de famille. Un autre grognement, et elle ordonna d’un geste au garçon d’aller s’asseoir à la dernière place vide de la classe. Juste à côté de Riku. Tandis que le jeune homme regardait le gamin s’approcher d’une démarche docile, presque éteinte, les deux adultes sortirent un instant de la classe, juste après que l’enseignante eut lancé l’ordre sec aux élèves de la classe de se tenir tranquille. Sora s’était assis tout près de lui, sans décrocher un mot, un sourire. Glissé derrière le petit bureau de bois, posé sur le banc à côté de lui, il semblait… presque absent. Riku avait l’impression que s’il avançait la main pour le toucher, cette dernière le traverserait. Le gamin était vêtu comme s’il venait d’affronter un orage. Les cheveux en pétards qui lui descendaient jusque dans le cou, il avait la peau un peu hâlée, certainement de tous les voyages qu’il avait déjà parcourus. Il n’était vêtu que d’un pantalon ample et d’une tunique attachée à la ceinture, un gilet passé sur ses épaules, certainement pour le protéger du froid. Un instant, il se demanda comment il faisait pour ne pas mourir gelé quand il était dehors. A moins que sa cape ne soit très épaisse, il devait… Il fut interrompu dans le cours de ses pensées par le regard du gamin, qui venait de se tourner vers lui. Un regard dirigé, il le comprit quelques secondes plus tard, non pas vers sa personne mais vers la fenêtre et le paysage dans son dos. Un regard infiniment pur, d’un bleu azuréen totalement incongru en ce monde si gris. Il lui fallu quelques instants pour se souvenir de respirer, au risque de tomber dans les pommes. Quelques minutes qu’il passa à scruter sans gêne ces yeux si bleus, comme un morceau de ciel qui se serait infiltré là où il n’aurait pas dû. La journée, après ça, passa comme dans un rêve. Il n’avait plus conscience de rien, à part du garçon assis à ses côtés. De sa présence, de chacun de ses mouvements, de chacune de ses respirations lentes et mesurées. Quelques fois, il avait légèrement détourné le regard. Celui-ci n’était alors plus porté sur le ciel ou la neige… mais sur Riku lui-même qui, à ces moments-là, en oubliait à nouveau de respirer, obnubilé par cet effet étrange que le garçon avait sur lui. Cela ne durait jamais longtemps, mais à chaque fois, il avait ce sentiment que le gamin pouvait lire dans ses pensées, à travers son âme, quand leurs regards se croisaient. Vers la moitié de l’après-midi, sa décision était prise. Lorsque la cloche de la fin des cours sonna, il était déjà prêt. Il partit un peu en avance, mais s’arrêta près du petit mur qui ceignait l’école, appuyé contre ce dernier. Son visage avait pris une attitude aussi nonchalante que possible, mais son cœur battait plus vite que n’importe quelle chamade. Sora ne parut pas étonné le moins du monde de le voir là, de croiser son regard turquoise quand il arriva à sa hauteur. Comme s’il savait déjà ce qui se passait, il lui tendit la main, sans un mot, sans un sourire. Mais lorsque Riku attrapa doucement ses doigts, un sourire lumineux envahit son visage. Ils partirent en silence, Sora presque sautillant, tirant derrière lui un Riku étonné – abasourdi – mais heureux, au fond de lui, de s’être fait plus ou moins accepter par le jeune homme. Ce dernier semblait totalement transfiguré. Si toute l’après-midi il n’avait été qu’une sorte de coquille vide, les yeux perdus dans le vague sur l’horizon barré par les arbres de la forêt, là, il donnait plutôt l’impression d’une centrale électrique qui se serait emballée. Vaquant un peu partout sur le chemin qu’ils empruntaient et qui traversait la forêt, il était tantôt à sautiller près des arbres pour tenter d’apercevoir un écureuil, tantôt plus calme, marchant sans bruit sur les feuilles mortes et la neige fraîche, le nez penché en avant comme s’il espérait apercevoir quelque chose. Au bout d’un moment, Riku osa enfin ouvrir la bouche. - Tu as quel âge ? Sora se releva de son étude approfondie du sol pour le fixer un instant, la tête penchée sur le côté, une moue dubitative jouant sur ses lèvres. Il finit par lui répondre. - 16 ans, je crois. - Tu crois ? Tu n’en es pas sûr ? - Non, personne ne sait quand je suis né… Il sourit doucement à l’air intrigué, peint sur le visage de son compagnon. - Ma maman a rejoint le camp de Kelan alors que je n’étais qu’un bébé. Elle est morte de la fièvre, quelques heures plus tard. Depuis ils ont pris soin de moi, mais ils n’ont jamais su d’où je venais. Crina m’appelle «le fils du vent» en riant… Un sourire plein de nostalgie avait pris possession de ses traits. Mais il disparut comme un mirage qu’un souffle efface, tandis qu’il relevait la tête, à présent curieux. - Et toi, alors ? - J’ai eu 17 ans il y a 3 mois. D’ici peu de temps je serai majeur, je pourrai partir d’ici. - Partir ? Tu n’aimes pas ton village ? Moi je le trouve chouette… - Mmmh… C’est parce que tu n’y vis pas depuis que tu es né, répondit l’argenté avec une grimace, après quelques secondes de réflexion. Il a l’air chouette comme ça, mais on s’y ennuie terriblement vite. Et puis, tout est vieux ici, même les idées… L’air de Sora se fit plus sombre, tout à coup. - J’ai remarqué… Un vent froid souffla entre les deux jeunes hommes avant que l’un d’eux n’ose bouger à nouveau. Riku détourna le regard au bout d’un moment, presque gêné de l’attitude des villageois, qu’il devinait exécrable envers eux. Désireux d’oublier cet incident, il tenta de changer de sujet, glissant sur la première pensée qui se présentait à lui. - Pourquoi tu fouilles la forêt du regard ? Tu as perdu quelque chose ? L’éclat que prirent furtivement les yeux du châtain le convainquit que c’était sans aucun doute possible la pire question à poser sur le moment. Mais ce dernier se reprit bien vite et lui offrit un sourire – qu’il devina, à son aspect polaire, au moins partiellement faux. - Non, non, rien. J’aime bien regarder le paysage, c’est tout. L’argenté hocha poliment la tête, pas le moins du monde convaincu. Ils reprirent ensemble leur chemin, plus silencieux. Quelque chose de malaisé s’était glissé entre eux. Arrivé vers l’entrée de la ville, Sora se tourna brusquement vers son compagnon, ses yeux toujours aussi froids, comme s’ils avaient perdu l’étincelle qui les animait jusqu’alors. - Je dois te laisser ici, nous ne sommes pas à l’intérieur de la ville. A plus ! Il déguerpit, presque en courant, avant même que Riku n’ait eu le temps d’ouvrir la bouche. Eberlué, ce dernier secoua la tête, comprenant à peine ce qu’il venait de se passer. Il essayait vainement de saisir ce qu’il avait fait de mal pour que le jeune homme semble ainsi passer de «je t’adore» à «ne m’approche plus» en quelques minutes à peine. Ce fut plongé dans ces sombres et tortueuses pensées qu’il retourna chez lui, remarquant à peine le salut et les remontrances de sa mère pour rentrer aussi tard. *** - Salut ! Riku sursauta violemment à la voix de Sora. Celui-ci venait juste de s’asseoir, tout en légèreté et en élégance – entendez par là qu’il s’était laissé tomber sur le banc comme s’il pesait 120 kilos – juste à côté de lui. Il eut la délicatesse de rougir au regard désapprobateur que Riku lui lança. - Euh… je suis désolé pour hier ? J’aurai pas dû réagir ainsi contre toi, t’y es pour rien, pour ton village… - Content de te l’entendre dire… Le ton de l’argenté restait très froid, laissant entendre à Sora que même s’il comprenait ses raisons, il n’était pas sûr de vouloir pardonner une telle attitude alors qu’il n’avait rien fait. Sora, baissant piteusement la tête, se mordilla les lèvres, comme à la recherche d’une quelconque parole à dire, qui pourrait débloquer la situation. Néanmoins, au bout de quelques minutes de silence profond, Riku retourna à l’éclat du ciel redevenu d’un bleu limpide – comme si la tempête de neige n’avait pas eu lieu, la veille, comme si tout n’avait été qu’un rêve. Ce fut une tape sur son épaule qui le sortit de sa transe. Se retournant une seconde fois, il s’apprêtait à répondre une quelconque réplique un peu acerbe histoire d’avoir la paix, mais se retrouva, encore une fois, cloué sur place par le regard azuréen de son voisin de table. Celui-ci avait récupéré l’étincelle radieuse qui brillait la veille dans son regard, et lui lança d’une voix ravie – mais assez basse pour que toute la classe ne l’entende pas: - Je sais ! Viens avec moi, après la classe. Je te montrerai ma maison ! Riku manqua de tomber de sa chaise en entendant sa phrase. Ok, ça y était. Là, pour de bon, il ne comprenait vraiment, vraiment plus rien. Il sentit le regard interrogateur du bohémien sur lui, comme s’il ne saisissait pas quelque chose qui, pour lui, était clairement limpide. Comme si c’était lui, l’énigme. C’était la meilleure ! - Bah qu’est-ce qu’il y a, fit-il en réponse à ses pensées. Ça ne te plait pas comme idée ? - C’est… c’est pas que ça me plait pas, mais… où est-ce que tu as été chercher ça ?! Pourquoi ? - Eh bah… je me suis dit que ça te ferait peut-être plaisir de voir où j’habitais, de découvrir un bout de mon monde, vu que j’ai vu un bout du tien ? La réponse laissa le plus vieux pantois, bouche grande ouverte, yeux écarquillés. Une vision si absolument incongrue qu’elle fit partir Sora d’un grand éclat de rire. Rire merveilleux, sorte de mélange entre le trille d’un oiseau et le sifflement du vent, qui acheva de stupéfier Riku tout en lui réchauffant anormalement la poitrine. Il n’eut pas le temps de récupérer que leur enseignante entrait, suivie des quelques élèves qui n’étaient pas encore assis à l’intérieur de la classe. Il ne prit le temps de répondre qu’une ou deux heures plus tard, en pleine dictée. Un simple petit bout de papier, provenant d’une page de son cahier arrachée, qui avait atterri sur celui de son voisin. Sur ce dernier, deux mots. «Je viens.» La réponse de Sora fut un autre et chaleureux sourire. *** A la fin de la journée ils partirent ensemble, la petite main de Sora glissée dans la sienne en toute innocence. Cette fois-ci, il ne gambada pas autant que la veille. Ses yeux continuaient de fouiller la forêt à la recherche de cette chose qu’il ne souhaitait pas partager avec l’argenté, mais il le faisait en restant à ses côtés, aussi calme qu’il le pouvait. C'est-à-dire, en sautillant tout de même assez joyeusement, forçant Riku à accélérer considérablement le pas. Arrivés à l’entrée du village, comme la veille, Sora prit la direction d’une petite plaine qui entourait le village par la gauche, à l’opposé de la forêt qui siégeait à sa droite. Mais cette fois-ci, Riku le suivit, sa curiosité décuplée au maximum. Ce fut à son tour de scruter les environs du regard, cherchant à repérer le plus tôt possible l’endroit où Sora habitait, afin de pouvoir l’observer autant qu’il le pouvait, pour tout apprendre sur lui. Son compagnon pouffa en l’observant discrètement. Quand il surprit une œillade interrogative de l’argenté, il lui expliqua brièvement: - Cette fois-ci, c’est toi qui as l’air de chercher quelque chose… Un petit clin d’œil accompagnant la phrase convainquit les joues de Riku de prendre une légère teinte rosée, tandis qu’il détournait prestement ses prunelles turquoise de celles du plus jeune. Pour aller se poser sur une petite farandole de caravanes qui venaient d’apparaître, au loin. Comme une sorte de petit manège, ces dernières étaient disposées en rond, autour d’un feu réchauffant l’atmosphère. Des chevaux paissaient non loin de l’une des caravanes, un peu en retrait. Il en comptait cinq… non, six ! Six chevaux, pour six caravanes. Il n’eut pas le temps de détailler plus que Sora l’entraînait à nouveau en direction des caravanes. Ils durent traverser la petite place formée par leur ronde, passant juste à côté du feu et des hommes assis près de ce dernier pour rejoindre celle que visait Sora. Ces derniers observaient le jeune homme à la tignasse argentée d’un air étonné, marmonnant entre eux des paroles d’une langue qu’il ne connaissait pas – certainement leur langue natale - tergiversant sûrement sur la raison qui l’avait poussé à venir ainsi chercher la compagnie de l’un des leurs, au pays des Romanichels. Une fois monté dans la caravane où l’avait mené Sora, et la porte de cette dernière refermée derrière lui, Riku s’autorisa enfin à poser la question qui lui brûlait les lèvres. - C’était des gens de ta famille ? Qu’est-ce qu’ils disaient ? - Euh, en quelque sorte oui. Pas de ma famille proche, mais ce sont un genre de cousins. Et ils ne disaient rien d’important… ils se demandaient juste qui tu es. Ça n’en avait pas franchement l’air, songea Riku un instant. Ils avaient l’air plus hostiles qu’intrigués, à ce qu’il lui avait semblé. Mais il ne les avait aperçus que quelques instants, peut-être s’était-il trompé, en fait… Il ne pensa bien vite plus du tout à cela, occupé qu’il était à détailler l’intérieur de l’espace où ils étaient. Il aurait été plus difficile de trouver plus coloré que cet endroit. Qu’importe où se posait son regard, des instruments bigarrés se côtoyaient. Jouets, ustensiles de cuisine, couvertures, vêtements… Il ne semblait y avoir aucun ordre dans le rangement. - Excuse le désordre, lança Sora en écho à ses pensées. Mes frères ne savent pas tellement ce que c’est que le rangement… - Tu as des frères ? s’étonna Riku. - Oui, deux. Des jumeaux, ils sont encore très jeunes, c’est pour ça qu’ils restent avec Crina au lieu de venir à l’école. Il avait eu l’air sombre, un instant, en prononçant ces paroles, mais ses pupilles retrouvèrent leur éclat sitôt qu’elles croisèrent celles de l’argenté. Il ressortit son plus beau sourire. - Bon, j’te fais visiter ? *** 4 jours passèrent ainsi. Les deux garçons se retrouvaient le matin, en classe, et bavardaient joyeusement jusqu’à ce que leur maîtresse arrive. Ils restaient le plus silencieux possible à ces moments là, mais ne cessaient d’échanger regards en coin et sourires à la fois tendres et maladroits dès qu’ils le pouvaient – au grand dam de l’institutrice, exaspérée de voir un de ces bohémiens pervertir son élève le plus prometteur. Sitôt la classe finie, ils partaient alors côte à côte – le plus souvent, main dans la main – pour rejoindre le champ où les roulottes se trouvaient. Là, malgré les regards que Riku sentait de plus en plus désapprobateurs, ils montaient dans celle que Sora lui avait fait «visiter» - le mot était un peu fort, celle-ci ne faisant en tout et pour tout que, peut-être, 9 mètres carrés – et passaient le reste de l’après-midi ensemble, jusqu’à ce que le soleil se couche et indique à Riku par là même qu’il était temps pour lui de rentrer chez lui. Pendant ces moments, ils ne cessaient de se raconter mutuellement leurs vies. Les grands voyages de Sora, les paysages et les gens qu’il avait rencontrés. La vie paisible, tranquille – ennuyeuse – de Riku, ses parents, l’école tous les jours, le paysage mille fois connu… Ils vouaient chacun une passion à la vie de l’autre, voulant toujours en savoir plus. Riku remarqua que l’une des choses qui semblaient fasciner le plus Sora, c’était la neige qui était périodique ici – qui revenait pour trois mois, chaque hiver. Le bohémien lui avait fait part de sa déception, quand il avait vu que cette dernière s’évaporait peu à peu, étant donné qu’il n’avait pas neigé depuis leur arrivée, mis à part la tempête qui les avait accompagnés. Quand il y repensait, Riku était stupéfié de la rapidité avec laquelle, lui qui ne se liait en général jamais avec personne, secret et solitaire, il s’était attaché à Sora. Il voyait dans le jeune homme tout ce qu’il n’était pas, tout ce qu’il aurait voulu être. Tout ce qu’il voudrait un jour partager avec quelqu’un. Cette pensée, parfois, insufflait en lui une chaleur sourde, accélérant son cœur du même coup. Il était heureux de l’avoir rencontré, heureux de pouvoir le voir tous les jours, partager tout ce qu’il partageait avec lui. Malheureusement, peu de personnes étaient du même avis que lui. C’est ce qu’il comprit l’après-midi du cinquième jour. Ce jour là, alors qu’il accompagnait Sora encore une fois chez lui, ils se virent tous deux refuser l’accès à la roulotte par trois hommes adultes, qui invectivèrent son compagnon de manière plutôt virulente, visiblement mécontents de quelque chose. Pendant plusieurs minutes, ces hommes parlèrent – crièrent ? – d’un ton sec, presque cassant. Riku, même s’il ne comprenait pas ces paroles étranges, parvenait néanmoins à en saisir le sens assez aisément, à la simple vue du visage de Sora, qui se décomposait peu à peu. Et de sa main, qui tremblait de plus en plus fort dans la sienne. Il y avait un problème. Qui les concernait. Ses craintes furent justifiées lorsque, une fois les adultes partis, Sora l’emmena près de sa roulotte, les traits tellement décomposés qu’il ne semblait pas loin de s’effondrer. Il s’arrêta devant la porte et se tourna vers Riku, les pupilles aussi sombres qu’un océan des abysses. - Sora… qu’est-ce qu’il y a ? - Je… mes parents ne veulent plus que tu viennes, ni qu’on se revoie. Ils disent que ça pose des problèmes… - Mais qu… Riku ne put finir sa phrase. Au même instant, deux silhouettes faisant à peu près la moitié de sa taille le bousculèrent comme une tornade pour attraper Sora et le traîner à l’intérieur. Il se retrouva tout seul sur le pas de la porte, la bouche grande ouverte, une douleur sourde à la poitrine. Il aperçut encore un instant les deux saphirs qui tenaient d’yeux à son ami, chargés de tristesse, avant que ses deux petits frères ne le tirent loin de la fenêtre. Alors il partit en traînant les pieds, tirant son cœur derrière lui comme un poids mort. Il sentait gronder au fond de lui comme une rage sourde. *** Ce grondement ne fit qu’augmenter au cours des jours qui suivirent. Il augmenta en voyant l’air satisfait de sa mère, qui était sans aucun doute au moins en partie à l’origine de cette séparation forcée. Il augmenta en observant du coin de l’œil les gens du village papoter furieusement, critiquer sans rien connaître de ce qui se passait sous leurs yeux. Il augmenta en se rendant compte qu’ils l’empêchaient sciemment de tenter d’approcher du camp des gitans. Il manqua d’exploser lorsqu’il se rendit compte qu’il ne pourrait même plus voir Sora à l’école, les adultes (le village ? les gitans ? les deux ?) ayant interdit à son ami d’y remettre les pieds. Ce fut à ce moment précis qu’il comprit, en voyant les visages figés, les regards de glace. Une sorte de guerre s’était déclarée entre les villageois et les gitans. Une guerre froide et silencieuse, qui ne demandait qu’une occasion pour exploser. Il comprit également à ce moment-là que ceux dont il se souciait le plus n’étaient pas ceux qu’on aurait pu croire… Il recommença à s’ennuyer, seul en classe, assis à son pupitre. Ses pupilles turquoise fouillaient la forêt, comme à la recherche de quelque chose, à l’instar de son ami coincé chez lui. A chaque fois qu’une branche bougeait un peu bizarrement, il sentait son cœur se serrer d’espoir, l’espoir de le voir braver l’interdit pour venir le rejoindre à l’école. Mais il savait que ce n’était pas possible. Ils devaient obéir à leurs parents… Une résolution qu’il avait de plus en plus de mal à tenir. Jusqu’à ce que Noël arrive. *** Dire que son village était religieux aurait été un euphémisme choquant. Ce mot aurait été inventé pour son village que cela ne l’aurait pas étonné. Dès le début du mois de décembre, les couronnes de l’avent avaient fleuri partout dans le village – et dans les maisons. Sa mère elle-même allumait avec respect chaque soir les bougies, en fonction du nombre de semaines qu’il restait avant Noël. Autant dire que pour Riku, Noël en lui-même était un cauchemar. Bien sûr, comme tout enfant – personne ? – il aimait cette fête pour les cadeaux que l’on pouvait recevoir ou offrir. Mais en tant que fête religieuse, il ne la supportait pas. Sa mère, depuis son enfance, le tirait là-bas, sans se soucier un instant du fait que Riku ne croyait pas au Dieu qu’elle adulait. Il ne le rejetait pas, mais pour lui, les messes étaient une véritable torture. Rester assis des heures durant, tremblotant dans le froid et les courants d’air de l’église, à marmonner des choses qui pour lui n’avaient pas vraiment de sens… Cette année, il traîna d’autant plus les pieds qu’il était de base de mauvaise humeur. Voilà presque deux semaines qu’il n’avait pas pu voir Sora, malgré toute l’envie qui le taraudait. Il avait bien tenté quelques petites choses, mais à chaque fois il s’était fait arrêter soit par les villageois, soit par sa propre mère – chose encore plus embêtante, car elle avait une sale tendance à se mettre à hurler pour un oui ou pour un non, ces derniers temps. Une fois assis de mauvaise grâce dans un des derniers bancs au fond de l’église – il avait refusé de suivre sa mère tout devant, qu’importe ce qu’elle avait pu dire – il tenta de se plonger dans ses pensées, les laissant vagabonder. Inutile de préciser vers qui elles le firent. Il entendait toujours les déblatérations du prêtre, mais n’y prêtait que très peu d’attention, perdu dans son imagination, dans sa volonté d’essayer de recréer son compagnon à ses côtés. Maigre consolation, tant la copie était pâle face à l’original, plein de vie et de joie. Trente longues minutes s’écoulèrent tandis qu’il s’occupait comme il le pouvait – il en avait marre de chanter en boucle une petite chanson dans sa tête, s’il continuait il finirait zinzin… - jusqu’à ce que le Père n’entame un nouveau sermon. Un sermon… plus qu’intéressant, pour une fois. Enfin, surtout le début. - Mes chers frères et sœurs, comme vous le savez, Noël est enfin arrivé. Période de paix et de renouveau. Noël est un instant hors du temps, une trêve de paix et de bonheur entre tous les peuples, toutes les familles. Et c’est ensemble, dans la Paix du Seigneur que nous… Riku avait déjà cessé d’écouter. A vrai dire, il était déjà en train d’essayer de refermer sa veste le plus discrètement possible. Heureusement qu’il était resté au fond de l’église, il n’aurait jamais pu faire ça, sinon. Le prêtre avait à peine terminé sa phrase que l’argenté s’était déjà fait un devoir de quitter la salle où tout le village était réuni. Un immense sourire fendit son visage alors qu’il traversait le village au pas de course. Dans ses pensées, un rire retentit tandis qu’il se repassait la phrase qui l’avait convaincu de s’échapper. Noël est une trêve de paix pour tous les peuples non ? Alors il l’est aussi pour nous, entre le village et les gitans ! Donc je peux aller voir Sora sans crainte, si même leur Seigneur le dit… Cela faisait déjà plusieurs jours qu’il se maudissait de ne pouvoir aller vers le bohémien. Il espérait, sans bruit derrière sa fenêtre, que lui fasse le premier pas, mais au fond c’était aussi à lui de faire quelques pas dans sa direction, pas toujours l’inverse. Il ne lui fallut que quelques minutes pour parvenir jusqu’au cercle des gitans. Tout le camp était désert, vu le froid ambiant. Il ne tarderait d’ailleurs pas à neiger, Riku le sentait à son nez complètement gelé. Il trouva du regard la roulotte de son ami, et s’en approcha, baissé au maximum pour ne pas se faire repérer par les adultes. Il dut néanmoins se relever une ou deux fois, juste en dessous de la fenêtre, pour regarder par cette dernière afin de repérer son ami. Il était assis dans un coin, loin de ses frères et de ses sœurs, le regard complètement éteint. Cette vision lui serra le cœur. Mais comment faire pour lui faire savoir qu’il était là ? S’il frappait au carreau ou contre le bois, tous les habitants – ses parents et ses frères y compris – seraient au courant de sa présence. Et ce n’était à son avis pas le meilleur moyen de réussir à le voir, ils refuseraient certainement. Il en était à un mélange entre le désespoir de ne pas savoir trouver, et la folie de quand même tenter d’aller toquer à la paroi contre laquelle était appuyé son ami, quand sa maman – Crina, s’il ne se trompait pas – lui sauva la mise. Elle s’approcha de Sora, parlant suffisamment fort pour que Riku l’entende lui demander d’aller chercher de l’eau au ruisseau qui coulait non loin du campement. Le cœur de l’argenté fit un bond dans sa poitrine lorsqu’il vit son ami se lever – pareil à un zombie… ou un automate – prendre un seau et se diriger vers la porte, dans l’intention d’enfiler un manteau ou une cape. Il n’attendit pas que Sora sorte pour partir en courant – toujours plié en deux – en direction de la forêt. Il s’arrêta quelques arbres après la lisière de cette dernière, caché derrière un de ces géants de bois pour attendre son ami. Son cœur battait à mille à l’heure tandis que, l’oreille tendue, il guettait la moindre preuve de la présence de son ami non loin de lui. Une respiration, presque un soupir, des pieds qui se traînaient sans envie dans la neige, le bruit métallique d’un seau qui bat contre une jambe… Aucun doute, il arrivait juste à côté de lui. Il vit ses pensées confirmées à peu près une seconde plus tard, lorsqu’une silhouette aux impressionnants pics bruns se dressant dans tous les sens le dépassa. Le corps de Riku agit presque plus rapidement que son esprit. Attrapant le poignet de Sora quand il passa à sa hauteur, il le tira prestement vers lui pour lui signaler sa présence. Ce qu’il n’avait pas prévu, c’est que Sora, pris par surprise, trébuche et s’étale de tout son long en sa direction, l’entraînant dans l’opération. Ils se retrouvèrent tout deux à terre, Sora à moitié étalé sur Riku, aussi abasourdis l’un que l’autre. Pendant quelques instants recouvert du gel du silence, ils restèrent figés, les pupilles fondues l’une dans l’autre, aucun d’eux n’osant bouger. Ce fut Sora qui brisa la glace en éclatant d’un rire joyeux, achevant le geste qui l’avait presque jeté dans les bras de son ami. Ce dernier se sentit rougir furieusement lorsque Sora lui sauta au cou, mais ne s’empêcha pas pour autant de lui rendre son étreinte. Lorsqu’ils furent enfin debout, Sora lui lança, les yeux pétillants d’une joie sans limite: - Mais… tu fais quoi là ? - Euh… répondit Riku, surpris. Je suis venu te voir ? Si tu préfères, je peux repartir… - Non ! Le cri de Sora effraya un oiseau, qui s’envola à toute vitesse, faisant prendre conscience au jeune homme qu’il avait presque hurlé, amenant par là même un rouge tenace sur ses joues. - Pardon, je… c’est juste que, tu m’as manqué… - Je sais, sourit son ami. Tu m’as manqué aussi. Un sourire illumina le visage du châtain, reflet de l’infinie joie qui brillait dans son regard. La main tendue, il lui fit un signe de tête en direction du cœur de la forêt, l’invitant sans un mot à une balade. Une balade. Une simple promenade, la main dans la main, juste à côté de lui, à discuter, partager avec lui. Ce n’était rien, techniquement. Mais avec Sora, c’était spécial, c’était comme si on lui offrait la promesse du paradis. Il sentit son cœur gonfler, s’emplir de bonheur jusqu’à exploser. Il glissa sa main dans celle, plus petite et plus froide, de son cadet. Et ils partirent ensemble, côte à côte, s’enfonçant dans la forêt en discutant joyeusement. *** |
| | | Plume d'Eau Papillon des Rêves
Messages : 191 Date d'inscription : 23/05/2012 Age : 32
| Sujet: Re: Partage des cadeaux - Event de Noël 2012 Dim 20 Jan - 23:28 | |
| - Et tu as fait quoi, toi, pendant ces derniers jours ? Ils marchaient depuis déjà au moins une bonne demi-heure. Ils en avaient profité pour rattraper tout le temps perdu qu’ils avaient passé loin de l’autre en se racontant ce qu’ils avaient fait pendant tout ce temps. Riku venait de lui rapporter ses longues heures d’ennui, loin de lui, avant de lui poser la question, curieux de savoir comment il avait pu survivre sans même avoir l’école pour tenter de lui remplir la tête avec des absurdités. Sora eut un sourire énigmatique. - J’ai marché. - Où ça ? - Ici, dans la forêt. Riku fronça les sourcils, regardant autour de lui. Il ne lui semblait pourtant pas que… - Ah… ce que tu cherchais, c’est ça ? Tu l’as trouvé ? - Tu as bonne mémoire ! sourit à nouveau Sora. Je me disais bien que mon excuse ne t’avait pas convaincu. - Pas du tout non, ça se voyait que tu ne disais pas la vérité… mais comme tu semblais ne pas vouloir en parler, je n’ai pas insisté. - C’est gentil de ta part. Et oui, j’ai fini par le trouver. Si… Un instant de silence, le temps pour Sora de s’arrêter – Riku suivant son mouvement quelques secondes après – afin de plonger son regard océan dans les pupilles émeraude. Il semblait y chercher quelque chose, comme une confirmation muette de la part de l’argenté. Riku ne savait pas exactement quelle était cette confirmation, mais il semblait l’avoir trouvé, car il reprit, bien plus doucement, comme un murmure hésitant : - Si tu veux… je peux te montrer. Riku en resta presque bouche bée. Il ne s’attendait pas à ce que le garçon, si secret à propos de ses recherches, lui propose directement de lui montrer le résultat. C’était une preuve de la confiance qu’il lui accordait, que l’argenté goûta avec bonheur. Il hocha doucement la tête. - Ça me ferait très plaisir. Le temps d’un autre sourire lumineux de la part de Sora – de ceux qui faisaient briller jusqu’à ses yeux d’une douce lueur de joie – et les deux garçons se mirent en route, s’enfonçant encore plus profondément dans la forêt. Il leur fallut au moins un autre quart d’heure, voire plus, à marcher dans la neige en s’empêtrant un peu plus à chaque pas – ils n’étaient pas vraiment dans la partie la plus visitée de la forêt – pour atteindre une petite clairière, cachée au cœur des bois. D’une forme circulaire, elle était totalement recouverte de toute la neige qui était tombée ces derniers jours – c'est-à-dire une couche suffisamment épaisse pour arriver jusqu’aux genoux des deux garçons. Il distinguait néanmoins, sous le généreux tapis blanc, plusieurs bosses qu’il supposa être des souches d’arbres ou de grosses pierres. Mais ce qui était étrange avec ces bosses, c’était la façon dont elles étaient disposées. Elles formaient une sorte de cercle parfait, comme une «ronde des fées» dont lui parlait souvent sa grand-mère, quelques années auparavant – mais dans un modèle un peu plus grand. Il y avait déjà des traces de pas qui menaient jusqu’au centre du cercle, preuve que quelqu’un était déjà passé ici. Sora, sans aucun doute. Ce dernier, sans l’attendre, avait déjà entrepris de refaire le chemin que ses pas avaient laissé, reposant exactement ses pieds dans les empreintes formées afin de faciliter sa progression. Riku attendit qu’il avance d’un pas ou deux pour l’imiter, souriant en se rendant compte que les pieds de son compagnon étaient légèrement plus petits que les siens. Une fois arrivés au centre de la clairière, il s’arrêta à côté de Sora. Ce dernier s’était totalement immobilisé, toute son attention focalisée sur le décor onirique qui les entourait, ses pupilles saphir cherchant visiblement à repérer quelque chose dans la poudreuse immaculée. Enfin, son regard s’arrêta à la lisière de la forêt, totalement à l’opposé de leur point d’arrivée. Devenant soudain fébrile, il attrapa son ami par la manche et se baissa, l’invitant par là même à l’imiter. Il grimaça un peu en sentant la neige froide sous lui, mais se dit que son compagnon ne lui demanderait pas ça s’il avait une bonne raison. Ils attendirent ainsi pendant quelques bonnes minutes, silencieux, impatients, aux aguets. Riku était de plus en plus intrigué, ses yeux percevant quelques mouvements mais trop imperceptibles pour qu’il puisse comprendre de quoi il s’agissait. Si c’était un animal, en tout cas, il était drôlement petit… et drôlement rapide. Enfin, il sentit les doigts – presque gelés ! – de Sora se poser sur son visage, recouvrant ses paupières d’un voile noir. Il ouvrit la bouche pour protester, mais la voix de son ami le convainquit de se taire. - Chut… Ferme les yeux Riku, s’il te plait. Fais-moi confiance. Un instant peu sûr de la conduite à adopter, l’argenté finit par fermer les paupières. Il ne comprenait pas tout, mais si son ami désirait qu’il ne regarde pas pour l’instant, alors il le ferait. Il ne doutait pas que la surprise n’en serait que plus grande. Attendant le moment où il pourrait recouvrer l’usage de la vue, il goûta au simple plaisir de sentir la main de Sora sur son visage, sa peau contre la sienne. Il ne comprenait pas pourquoi il réagissait ainsi au contact du châtain, mais puisque ce dernier était si agréable, il n’allait pas le repousser. Il aurait même préféré qu’il dure plus longtemps… Après quelques longues – ou trop courtes ? – secondes, enfin, le bohémien retira sa main. Un sourire se fit entendre dans sa voix tandis qu’il lui murmurait : - Tu peux ouvrir les yeux… Doucement, presque craintivement, l’argenté obéit à l’invitation, le cœur battant d’appréhension à ce qu’il pourrait bien découvrir. Ce qu’il vit le stupéfia bien au-delà de toute supposition. Sur les différentes souches qui les entouraient, de petites créatures s’étaient posées. Elles étaient minuscules, comme des répliques d’humains, mais à peine plus grandes que son majeur. Vêtus de blanc des pieds à la tête, les petits êtres se fondaient à la perfection dans le décor environnant, perceptibles seulement lorsqu’ils bougeaient. En volant, au vu des délicates ailes de cristal qui ornaient leur dos. Un pouffement du cadet ramena Riku à la réalité. - Ferme la bouche ! Tu as l’air un peu stupide là… Avec un léger hoquet, l’aîné lui obéit, tournant vers lui un regard totalement abasourdi, en quête d’une quelconque explication à la magie qui se déroulait sous ses yeux. Sora lui sourit doucement. - Ils s’appellent les façonneurs. Ce sont des sortes de fées, je crois. Ils passent l’année cachés, à créer des flocons de neige, et lorsque l’hiver arrive, ils sortent de leurs cachettes pour distribuer les flocons et créer ainsi la neige. - La neige ? - Oui… je les connais depuis que je suis tout petit, je les ai rencontrés vers mes six ans. Je m’étais perdu dans la forêt, en plein hiver, et ils m’ont aidé à rentrer chez moi. Depuis, lorsque l’on déménage, j’essaye toujours de les retrouver où que l’on aille. Ce sont mes seuls amis. Enfin… jusqu’à maintenant. Un instant de silence, le temps pour Riku de froncer les sourcils, et Sora de lui sourire. - Eh bien… oui, tu es là maintenant. Non ? - Ah ! Si, bien sûr, mais… dans tous les endroits que tu as visités, tu n’as jamais trouvé d’ami ? Je pensais qu’au contraire, tu en avais plein… Le châtain secoua tristement la tête. - Non… en général, les gens ne nous aiment pas beaucoup, ils nous réservent le même accueil que ton village. Et quand je rencontrais quand même quelqu’un, comme on repart toujours quelques semaines après, eh bien j’imagine qu’ils m’oublient vite… - Quelques semaines ? Seulement ? La déception, presque tangible dans la voix de Riku, réchauffa doucement le cœur du châtain. - Oui, nous évitons de rester toujours au même endroit trop longtemps… les gens n’aiment pas trop cela, après ils nous chassent. Nous avions déjà voulu une fois rester un peu plus longtemps car l’endroit semblait accueillant et… les gens n’ont pas aimé. C’était pas très… agréable. Alors du coup on évite. - Je vois… Riku semblait sur le point d’ajouter quelque chose, mais un délicat son de carillon parvint à ce moment-là à leurs oreilles. Tournant tous les deux la tête, les deux jeunes découvrirent un des façonneurs qui s’était approché d’eux, tintinnabulant et gesticulant à leur attention. Ce petit son de clochette semblait être leur façon de parler – ou en tout cas la manière dont les oreilles de Riku percevaient leur langage. Sora, lui, visiblement plus habitué à les côtoyer, écarquilla dans un premier temps ses yeux de surprise, avant de se tourner vers Riku pour lui offrir un sourire plus éclatant que le Soleil. - Les façonneurs disent qu’il va bientôt y avoir une nouvelle naissance parmi eux… ils aimeraient savoir si nous voudrions y assister. - Qu… quoi ? - Oui, je suis aussi étonné que toi. J’y ai déjà assisté une fois, mais sans vouloir t’offenser… ça m’étonne qu’ils te proposent aussi d’être là, la seule fois où j’ai pu en voir un, cela faisait déjà des années que je les connaissais. Ils semblent bien t’aimer. Riku resta pensif quelques secondes, avant de se tourner vers le façonneur, qui attendait toujours une réponse. - Si vous voulez bien de moi, je serai honoré d’assister à un si bel évènement. Un carillon joyeux fut sa réponse, tandis qu’il faisait battre ses ailes pour s’envoler. Attrapant la main de son ami, Sora se releva pour suivre la petite créature dans les bois. Ils s’y enfoncèrent pendant quelques bonnes minutes, main dans la main, les yeux fixés sur leur guide, avant de pénétrer dans une autre clairière, bien plus petite. Elle était remplie d’un nombre incroyable de ces minuscules façonneurs, à tel point que les deux garçons durent faire preuve d’une délicatesse à toute épreuve pour traverser cette clairière et aller se poser à la place que leur indiquait celui qui les avait guidés. Une fois assis, le silence se fit. De longues minutes s’écoulèrent sans qu’aucun des garçons n’ose bouger. Riku glissait de temps en temps des regards en direction de Sora, surpris une fois sur deux de croiser les pupilles océans, brillantes de joie. Ce n’est qu’après quelques instants qu’il entendit le son, presque imperceptible, qui s’élevait autour d’eux. Les façonneurs chantaient ! Une seule note, qui tendait lentement vers l’harmonie, le temps se comptant en secondes avant qu’elle y arrive. Tout le peuple vibrait de cette unique note, entraînant avec eux comme un ronronnement de l’univers. Muet devant la magie qui se déroulait autour d’eux, Riku fit un bond en sentant la main de Sora se glisser dans la sienne pour la serrer. Coulant un regard en direction du châtain, il vit que celui-ci avait les yeux fixés devant lui, sur le ciel. Lorsqu’il suivit la direction que ses prunelles indiquaient, il sentit son cœur frémir. Des sortes de petites lucioles, véritables boules de lumière pure, se dirigeaient lentement vers l’assemblée dans une délicate danse aérienne. Lorsqu’elles ne furent plus qu’à quelques mètres, Riku se rendit compte qu’elles étaient quatre, se rapprochant de plus en plus les unes des autres. Elles se touchèrent juste au-dessus de la souche devant laquelle Riku et Sora étaient assis, en une explosion de couleurs. Lorsque l’arc-en-ciel se fut estompé, ils découvrirent dans un silence presque religieux une petite silhouette assise dans la neige, battant faiblement des ailes, l’air totalement perdue. Elle observait ses mains, ses nouveaux «vêtements» et le monde qui l’entourait avec un air presque hagard, semblant ne pas comprendre pourquoi elle se trouvait là. Un des façonneurs le plus proche – une petite demoiselle aux cheveux bleu clair, à ce que put voir Riku – s’approcha de la nouvelle venue pour la prendre par la main et l’aider à se relever. Elle se glissa dans son dos pour attraper à deux doigts chacune des ailes et les tendre avec douceur, solidifiant ses dernières. Après quelques secondes, elle invita la nouvelle née à l’imiter tandis qu’elle battait des ailes. Elles s’envolèrent de concert, tout en légèreté et en cabrioles, bien vite suivies par le reste du petit peuple, carillonnant joyeusement. En à peine quelques secondes, les deux garçons se retrouvèrent seuls, assis sur la neige au milieu de la petite clairière. Sora tourna des yeux brillants d’une joie prête à exploser vers son ami, qui lui sourit doucement. Tandis qu’ils se relevaient pour repartir dans les bois, le bohémien entreprit d’expliquer quelques détails à son ami. - D’après ce que j’ai pu comprendre, un façonneur naît quand quelqu’un de très gentil et qui aime plus que tout la neige meurt. Son âme qui normalement devrait disparaître est appelée par le chant du peuple et elle rejoint ce dernier. Là, elle fusionne avec leur magie pour pouvoir donner naissance à un nouveau façonneur. - Mais comment savent-ils que quelqu’un est mort ? - En fait, je crois qu’ils sentent sa mort imminente… c’est pour ça d’ailleurs que selon la légende, ceux qui sont appelés à devenir façonneurs entendent généralement une musique avant de mourir… Riku hocha la tête, silencieux. Observant ses pieds laissant de profondes empreintes dans la neige encore vierge de toute trace, il réfléchit un instant à tout ce qui venait de se passer. Il avait rencontré des émissaires d’un peuple vivant dans la forêt, créant puis distribuant les flocons, dont les membres naissaient par la musique… S’il s’était écouté, il se serait dit que tout ça n’était qu’un rêve, un délire de son esprit peut-être malade de fièvre à force de traîner dans la neige… Mais voilà. Avec Sora à ses côtés, tout cela semblait presque normal. Naturel. Tout était toujours si féerique, avec le châtain, qui avait cette faculté étrange de mettre de la magie dans le moindre détail de son existence, que ce qu’il venait de voir, de découvrir, ne lui semblait pas aussi abasourdissant qu’il l’aurait cru. - A quoi penses-tu ? La question de Sora surprit l’argenté. Sursautant, il coula un regard vers ce dernier, et s’arrêta, ses yeux plongés dans l’océan des siens. - Euh… à toi. Enfin, au fait que tu arrives à rendre tout ce qui nous entoure magique. - Je… un rouge tenace avait envahi les joues de Sora. Tu penses vraiment ça ? - Bah, oui, pourquoi ? Le rouge augmenta encore plus, à tel point que Riku crut un instant qu’il était malade. Posant une main sur son front comme il avait longtemps vu sa mère le faire, il haussa un sourcil. Non pourtant, il n’avait pas de fièvre… Sora bégaya à son contact. - Qu-qu’est-ce que tu fais ? - Tu es tout rouge, je me demandais si tu n’avais pas de la fièvre… Le châtain détourna le regard. - Bien sûr que j’ai pas de fièvre… C’est toi, t’as vu ce que tu me racontes ? - Hein ? Bah quoi, j’ai pas le droit de dire ce que je pense… ? Il n’eut pas droit à une réponse. Plus précisément, pas une réponse verbale. A la place, Sora se contenta d’avancer de deux pas, enfouissant sa tête dans le cou de l’argenté, ses bras se refermant du même coup dans son dos. Riku eut un petit hoquet de surprise mais ne bougea pas d’un demi-millimètre. Il lui fallut néanmoins quelques bonnes minutes avant d’oser, à son tour, refermer ses bras sur le bohémien. Un soupir – visiblement de contentement – fut sa réponse, accompagné d’un murmure dans son cou, tout près de l’oreille. - Je suis heureux de t’avoir rencontré, Riku… jamais je n’avais connu quelqu’un comme toi. - Je… moi non plus, je n’avais jamais rencontré quelqu’un comme toi, Sora. Je suis heureux aussi. Il sentit plus qu’il ne vit le sourire du châtain, tandis que ce dernier raffermissait sa prise sur lui. Ils restèrent ainsi un très, très long moment – mais étonnement, bien trop court au goût de Riku, qui eut du mal à le relâcher quand ce dernier se recula doucement, son sourire toujours accroché aux lèvres. - Il commence à faire nuit, nous devrions rentrer, non… ? - Oui, c’est sûr… ça va barder quand je rentrerai, je crois, rigola son aîné. Un air d’excuse s’imprima sur les traits de Sora, ses yeux se teintant d’une inquiétude sourde. Inquiétude que Riku se dépêcha d’essayer de rassurer tant elle serrait son cœur. - Eh, ça va aller, t’inquiète. Je préfère mille fois avoir passé mon après-midi avec toi, tant pis pour les conséquences. Vraiment. Ce fut sur le sourire de Sora qu’ils repartirent en direction de la lisière de la forêt. Lorsqu’ils y parvinrent, le plus jeune s’arrêta de marcher à quelques arbres de la «sortie», tournant son regard vers l’argenté. - J’ai… pas envie de rentrer. - Je sais, moi non plus… mais on est forcés, je crois, sinon ça va barder… Mais on peut se rejoindre plus tard non ? - Quand ? Ce soir ? Demain ? Riku tordit sa bouche en une moue ennuyée. - Je vais pas pouvoir… comme ma mère est très religieuse, on fête Noël avec toute notre famille, mon grand frère rentre pour l’occasion… Ce soir et demain je serai totalement bloqué à la maison… Mais promis après-demain dès que je le peux je viens ici ! - D’accord. Alors je regarderai par la fenêtre toutes les cinq minutes. Comme ça je serai sûr de ne pas te manquer ! Un autre sourire échangé – qui contaminait jusqu’à leurs yeux de bonheur – et ils se séparèrent à regret, chacun rentrant chez soi, les dents serrées à l’idée de l’engueulade qui se profilait à l’horizon. *** - Kadaj ? Le jeune homme aux longs cheveux argentés releva la tête, interrogeant sa mère du regard. - Je peux te parler un instant ? C’est à propos de Riku… - Bien sûr. Qu’est-ce qu’il a ? - Eh bien, tu as peut-être vu que des espèces de sauvages s’étaient installés à côté du village, non ? Un hochement de tête sec. Kadaj n’avait jamais aimé ce genre de personne qui, selon lui, ne faisait que profiter de la vie sans travailler, exploitant les terres des autres sans aucune vergogne avant de fuir pour éviter les ennuis. Qu’ils osent approcher de son petit frère et… - Il… y en a un qui tourne très souvent autour de Riku. J’ai peur qu’il n’ait une mauvaise influence sur lui. Une très mauvaise influence… … ça irait mal pour eux. - T’inquiète pas maman. Je vais le surveiller, alors. Personne ne fera de mal à mon petit frère, je te le jure. *** Après ce qui lui avait semblé être quelque chose comme des années ou même des siècles, le matin du 27 décembre arriva. Enfin. Riku se réveilla en sursaut ce matin-là, son subconscient lui rappelant énergiquement sa promesse à Sora. Il se leva et s’habilla en à peine cinq secondes top chrono, mais fut freiné dans ses ardeurs par sa mère qui, dès qu’il osa mettre un orteil en dehors de sa chambre, le houspilla pour qu’il vienne l’aider à ranger leur maison, toujours en désordre après le départ de leur famille. Seul son frère aîné, Kadaj, était resté dormir avec eux. Il faut dire qu’avec son école militaire, il était obligé de partir pas mal loin de la maison, et donc quand il pouvait rentrer il faisait toujours en sorte de rester plusieurs jours de suite pour ne pas avoir à se trimballer son paquetage et son fusil d’un bout à l’autre du pays sans cesse. Avec l’état de la salle à manger – inviter plus de douze personnes dans un salon qui n’en contient habituellement que deux, voire trois, c’est du sport ! – et la maniaquerie de sa mère, Riku en eut pour plusieurs heures à ranger méticuleusement tout ce qui traînait, puis à nettoyer de fond en comble tables, meubles et sol. Il en venait à maudire la quelconque divinité qui devait avoir une dent contre lui lorsqu’elle le relâcha enfin, faisant un geste vague en direction de sa chambre pour lui faire comprendre qu’il avait certainement des devoirs à faire. Il ne se fit pas prier, et remonta directement dans cette dernière. Bien évidemment, il n’avait aucune intention de travailler de quelconques devoirs. La veille au soir, il avait fait en sorte de ramener le plus discrètement possible sa veste et ses gants dans sa chambre. Il se doutait bien que sa mère ne le laisserait sortir sous aucun prétexte, après le savon qu’il s’était ramassé, deux jours auparavant. Il avait donc décidé d’emprunter la voie la plus discrète: sortir par la fenêtre de sa chambre – Dieu merci, un étage ce n’était pas bien haut, et il aurait la neige pour amortir sa chute – et filer en passant derrière la maison pour rejoindre la lisière de la forêt. Tout se passa exactement comme il l’avait prévu. Sauf qu’il ne comptait pas sur le fait que son frère, accoudé à une fenêtre de la vieille réserve à outil que leur père utilisait avant sa mort, l’avait observé sauter puis se mettre à courir en direction des bois, une grimace de mécontentement sur le visage. *** Il ne fallut qu’environ trois minutes pour que Sora rejoigne Riku. A tel point que ce dernier se demanda si son ami n’avait pas fait le pied de grue devant la fenêtre toute la journée pour être si rapide. Une pointe de remords vint serrer son cœur tandis que le bohémien courait à perdre haleine dans sa direction, ne ralentissant qu’au dernier moment pour se jeter dans ses bras sans le faire pour autant basculer – mais de peu. Riku éclata d’un rire joyeux, serra le plus jeune dans ses bras et ébouriffa un peu sa crinière avant de le relâcher, tout aussi heureux que lui. Il en profita pour s’excuser rapidement de son retard, arguant la maniaquerie de sa mère. Un sourire le rassura. - C’est pas grave, tu sais. L’important, c’est que tu sois là ! Et avant que l’argenté ait pu répondre quoi que ce soit, le châtain lui tendit sa main en une invitation silencieuse à s’éloigner avec lui pour goûter leur temps ensemble, loin de toute éventualité dérangeante. Loin de la réalité. Ce fut avec plaisir que l’argenté prit sa main, un sourire doux toujours accroché aux lèvres. Les deux silhouettes s’éloignèrent sans avoir conscience de la tempête qu’ils laissaient derrière eux. - Où va-t-on ? - Euh… je n’y ai pas réfléchi en fait. La clairière ? - Ça me va ! Enfin, avec toi tout me va, de toute façon. Un petit silence gêné, le rougissement du plus jeune qui se mit à sautiller en balançant joyeusement leurs mains jointes pour cacher son trouble. Ils n’échangèrent que des banalités sur le chemin, mais l’argenté sentit bien que Sora semblait ailleurs, comme s’il avait eu quelque chose à lui dire mais qu’il ne voulait pas. Dès qu’il l’avait vu courir vers lui, il avait eu cette sensation étrange, comme un nœud dans le ventre qui se resserrait de minutes en minute, à chaque fois qu’il croisait son regard océan, teinté d’inquiétude. Ce ne fut que lorsqu’ils furent enfin assis dans la clairière, l’un en face de l’autre – deux de leurs mains toujours jointes, comme soudées ensemble – qu’il osa enfin aborder le sujet. - Sora, est-ce que… - Quoi ? - Quelque chose ne va pas ? Tu sembles… bizarre. Un sourire triste, qui assombrit légèrement les prunelles du plus jeune, n’aidant en rien l’inquiétude du plus vieux. - Tu… comment tu fais ça ? J’ai l’impression que je ne peux rien te cacher, que quand tu es dans le coin, je suis comme un livre ouvert… Un petit sourire d’excuse de l’argenté, et il continua, baissant subitement les yeux comme s’il ne supportait plus de croiser son regard. - Je… Crina m’a annoncé ce matin qu’on allait bientôt repartir. Elle dit que d’ici ce soir ou demain, on aura plié bagage. Mais… Sa voix se brisa. Mais je ne veux pas partir moi ! Je veux rester ici ! Tu es … Il y a que toi qui m’aies jamais vraiment accueilli à part eux, je… j’ai pas envie de partir loin de toi ! Sa réplique s’acheva dans un quasi-cri, laissant place ensuite à un silence presque choquant. Riku, les yeux écarquillés, tentait de mesurer toute la portée de ses paroles. Elles ne semblaient pas si différentes de celles qu’ils avaient tous les deux prononcées deux jours auparavant, mais quelque chose au creux de son estomac lui soufflait que pourtant, une différence fondamentale était là, dans le ton si désespéré qu’il avait employé. Sans avoir tout à fait conscience de ce qu’il faisait, il tira sur la main qu’il tenait toujours dans la sienne, faisant basculer Sora sur lui – dans ses bras. Leur position n’était pas des plus confortables – lui le tenant maladroitement, devant jouer des muscles pour ne pas s’effondrer au sol, Sora certainement avec les membres tordus d’une drôle de manière qui lui vaudrait bien des courbatures plus tard – mais il n’était en aucun cas décidé à lâcher son ami. Ce qu’il venait de dire le bouleversait totalement et il ne trouvait de réconfort que le nez enfoui dans l’épaisse tignasse de son compagnon. Il ne réagit que quand la voix de ce dernier le ramena à un semblant de la réalité, toujours aussi tremblante, aussi pleine de sanglots qui étrillaient son cœur. - Ri… Riku ? - Je… je veux pas que tu partes. Ou que tu me quittes, plutôt. Je… C’est pas possible, pas maintenant. Dans tout ce village de décérébrés, t’es le seul qui me comprennes, t’es le seul avec qui je suis bien. C’est pas possible, on peut pas être séparés maintenant. Je veux pas. Une main serrant convulsivement son pull – quand avait-il eu le temps de la passer sous sa veste ? – et il comprit que le châtain n’était pas loin de pleurer. Il resserra son étreinte. - Je veux pas, t’entends ? Et si tu peux pas rester alors c’est moi qui partirai. Tant pis pour les mois qu’il y a encore avant ma majorité. Le silence revint, tandis que Riku sentait les épaules de Sora cesser de trembler. Apparemment, ce qu’il avait dit lui avait causé un tel choc qu’il en avait même oublié de pleurer. Haussant un sourcil, il baissa la tête pour observer le châtain. Celui-ci releva le regard, le plongeant dans les pupilles turquoise de son aîné. - Tu… es sérieux ? Tu ne rigoles pas, là ? - Bien sûr que non. Je t’avais dit que je voulais partir, même si je ne savais pas où aller. Tu es le seul jusqu’ici qui m’a donné envie de le faire vraiment, de ne pas crever dans ce patelin moisi. Tu es le seul à me donner un véritable but. Encore une fois, Sora en resta muet. C’était sans importance, ses yeux parlaient pour lui. A l’intérieur des deux océans de saphir, Riku pouvait lire tout ce que ses paroles signifiaient pour le châtain, tous les sentiments qui en découlaient, qui semblaient à deux doigts de déborder de son âme pour glisser le long de ses joues. Il se demanda un instant si ses pupilles étaient aussi transparentes que les siennes, et comprenant que c’était sûrement le cas, rougit légèrement. Mais ne lâcha pas son regard. Il était trop bleu, trop parfait, trop magnétique pour seulement lui laisser une chance d’y penser. Sora avança légèrement la tête, quelques millimètres à peine, se redressa un peu sur ses genoux. Quelques millimètres qui lui permirent de coller son front à celui de Riku, mêlant leurs deux souffles. Il n’y eut aucun mot, aucune parole. Juste un semblant de demande dans les yeux de l’un, un semblant de réponse dans le regard de l’autre. Fut-ce le premier qui se baissa, le second qui se releva, un peu des deux gestes dans le même ensemble ? Il aurait été difficile de le dire. Tout ce qui était sûr, c’est qu’un instant plus tard, leurs lèvres comme leurs âmes étaient soudées. Riku goûtait avec application celles, plus sucrées, de son cadet. C’était une sensation toute nouvelle pour lui. Bien sûr il avait déjà embrassé, mais c’était des filles, c’était des bisous rapides, c’était pas… «Sérieux». Pas aussi sérieux que là, pas comme s’il avait l’impression que ce simple baiser résumait toute sa vie, toute son existence. Il eut la sensation que le temps se dilatait autour d’eux, tandis qu’il caressait la nuque de Sora, que celui-ci répondait en plongeant une main dans sa tignasse argentée. Que tout était à la fois trop rapide et trop lent, que ce moment durait déjà une éternité, mais qu’il n’aurait jamais su être suffisamment long. S’il avait dû résumer tous ses sentiments en un seul mot, «paradoxe» aurait certainement été approprié. Lorsqu’ils relâchèrent doucement leurs étreintes, ce qu’il lut dans les yeux de Sora – et qu’il répéta tout bas – le convainquit qu’il avait tort. «Amour» était des centaines de milliards de fois plus approprié. Il s’apprêtait à répondre quelque chose lorsque deux minuscules détails attirèrent son attention. Un mouvement sur l’extrême droite de son champ de vision, et un cliquetis qu’il aurait reconnu entre mille. Un fusil qu’on armait. Tournant brusquement la tête, il s’arracha à la bulle de tendresse dans laquelle les pupilles de Sora l’avaient plongé. Et en fut stupéfait. Le mouvement qu’il avait perçu un instant auparavant était l’arbre qui cachait la forêt. Il avait cru sur le coup qu’un seul homme était présent. Erreur. Une bonne moitié du village – si ce n’est plus – étaient réunie là, devant eux, à la lisière de la clairière. Et tous les regardaient, un air de dégoût affiché, peint sur le visage. Le premier d’entre eux, le plus proche d’eux, surtout ? Son frère, Kadaj, fusil au poing. Riku avança d’un pas de manière, se plaçant un peu en avant sur Sora. Il connaissait son frère. Celui-ci était tout bonnement adorable, mais aussi effroyablement entêté. Quand il avait décidé ou s’était persuadé d’une chose, le faire changer d’avis, c’était limite mission impossible. Et ce qu’il voyait dans son attitude ne lui plaisait pas. Mais alors, vraiment pas du tout. Et surtout… le fusil dans ses mains n’était pas de bon augure. - Kadaj… qu’est-ce que tu… ? - Eloigne-toi de mon frère, vermine. Inutile de se demander, au vu du ton dégoulinant de mépris, à qui il s’adressait. Riku s’apprêtait à parler quand il vit un autre mouvement à la périphérie de son œil droit. Tournant la tête, il sentit un frisson d’horreur parcourir sa colonne vertébrale. Une partie des bohémiens venait d’arriver, se massant à bonne distance des villageois, les yeux rivés sur les deux garçons au centre de la clairière. Il reporta l’attention sur son frère, qui n’avait pas bougé d’un iota, les mains crispées sur son arme. Il ouvrit la bouche, mais ce fut la voix de sa mère qu’il entendit. - Riku, viens là tout de suite ! Éloigne-toi de… de ce monstre ! - Maman… qu’est-ce que tu racontes ? - Enfin, tu vois bien qu’il n’a fait que te pervertir ! D’abord tu ne faisais plus tes devoirs correctement, puis tu fuis l’église… et… et maintenant ça ! La tirade avait fini sur un cri strident, tandis qu’elle pointait du doigt les deux mains liées des garçons. Ces derniers échangèrent un coup d’œil, l’un inquiet, l’autre se voulant rassurant mais tout aussi terrifié, puis Riku releva fièrement la tête, affrontant sa mère du regard. - Il ne m’a pas perverti, c’est vous qui êtes tous cinglés. Vous êtes même pas capables de vous rendre compte que je ne supporte pas de vivre comme vous tous, que j’ai qu’une envie, me barrer d’ici. Sora n’a rien fait, au contraire ! - Riku chéri, arrête ça. Tu sais bien que ce n’est pas vrai, tu n’es pas comme ça. Ce n’est pas le Riku que je connais, pas le… - Rik… Sora n’avait même pas eu le temps de prononcer totalement son prénom. Il avait à peine attrapé le bras de son ami de sa seconde main que le frère de ce dernier rugit de manière presque bestiale, faisant un pas en avant. - Lâche mon frère, sale monstre ! Je vais te faire payer ! Riku eut de la chance. Enfin, si l’on pouvait parler ainsi dans la situation présente. Il dut son prodigieux réflexe à deux choses. Le ton – et les paroles – de son frère, et le fait qu’il le connaissait si bien. Il comprit instinctivement, à ces deux choses, ce que celui-ci préparait. Lorsqu’il leva l’arme, il était déjà prêt. Il se jeta sur le côté. - NON !! Son cri fut étouffé par la détonation du fusil. Il sut au moment où le froid envahissait sa poitrine qu’heureusement, il avait été assez rapide. Un instant, il eut l’impression étrange de voler. Comme si le temps s’était gelé pour lui offrir une seconde d’éternité. Puis, tout revint à la normale, et il s’écrasa violemment sur le côté, étouffant une plainte sourde de douleur. Un cri retentit au loin, un autre plus près de lui. Sa mère. Sora. Un seul importait à ses yeux, tandis que deux petites mains froides et tremblantes appuyaient sur ses épaules – lui arrachant une autre plainte de douleur – pour le tourner sur le dos. Il entendit un hoquet avant de voir les yeux de Sora, agrandis, assombris par l’inquiétude. Ça ne devait pas être beau à regarder. Il comprit que c’était même pire que ça lorsque des larmes perlèrent sur ses pommettes. Tentant vainement de lever la main vers la joue de son cadet, il sentit ce dernier l’attraper pour l’y aider. Il voulut parler, mais était déjà trop faible. Lorsqu’il ouvrit la bouche, ce fut un autre son qui se fit entendre. Un cri désarticulé, sorti à ce qu’il pouvait distinguer, de la gorge de son frère. Son cœur – ou ce qu’il en restait – se serra quand il comprit que cette fois-ci, il ne pourrait rien faire. C’était déjà trop tard. Un second coup de feu déchira le silence, et le temps parut encore une fois se dilater. Pourtant, contrairement à la première fois, Riku aurait tout donné pour que cet instant n’existe pas, ne puisse pas s’allonger indéfiniment, au même rythme que la douleur qui s’étirait dans chacune de ses cellules. Il vit la peau de Sora perdre ses couleurs, tandis que son regard océan quittait le visage de Riku pour descendre vers son torse, où une tache de sang tendait à s’agrandir de plus en plus vite, colorant les vêtements du bohémien d’un rouge sombre. La main de Riku se serra sur sa joue, ramenant Sora à ses pupilles turquoise, ou il lisait toute sa détresse, toute la peur qu’il ressentait. Pas pour sa propre vie, pour la sienne. Un délicat sourire triste fleurit sur ses lèvres, tandis qu’il basculait sur le côté, ses forces l’abandonnant à une vitesse effrayante. Riku tourna lentement la tête en direction de sa main, toujours posée sur la joue de Sora. Elle formait un dernier et maigre rempart de chaleur – de tiédeur, déjà – contre le lit glacé de neige sur lequel ils reposaient. Il sourit à son tour – un sourire infiniment doux et triste – quand il recroisa les yeux saphir. Ne les lâcha plus. Pour rien au monde, il ne cesserait de le regarder. Surtout pas maintenant qu’il comprenait que bientôt, il n’en aurait plus du tout l’occasion. Leur agonie paraissait figée dans l’éternité, pourtant il sentait – son cœur battant de plus en plus vite, la douleur sourde qui fusait dans tout son corps, le froid qui s’étendait… – que bientôt, tout cela cesserait. Que le noir les envahirait. Il ne voulait pas le quitter. Même s’il savait qu’il n’avait pas le choix, tout son être, toute son âme se révoltait à l’idée d’abandonner la main qu’il avait tenue si peu de temps auparavant, de quitter ce regard plongé dans le sien. Les yeux de Sora s’éclaircirent une dernière fois, bravant les brumes de la douleur pour attacher encore une fois son âme à celle de l’argenté. Il décela une petite lueur d’espoir dans ses pupilles, tandis qu’il chuchotait: - Ri… tu… entends ? Il n’eut pas le temps de répondre. Au moment où l’océan de son regard se ternit, il sentit son propre cœur cesser de battre. Quelques secondes – une éternité ? – pour observer ce visage si angélique se figer comme du marbre, et il exhala son dernier soupir. Dans la neige, leur sang traçait de délicates arabesques couleur rubis. *** Comme une explosion de couleur, un arc-en-ciel qui… La première chose qu’il perçut, ce fut les notes. Délicates, pures, entremêlées pour former une harmonie qui parvenait à ses oreilles comme une sonate réconfortante, qui berçait son esprit, soignait son âme. Puis, le contact froid, doux, léger de la neige sur laquelle il était allongé. Il ne savait pas où il était, ce qu’il faisait là. Tout ce dont il se rappelait, c’était des magnifiques couleurs qu’il avait perçues – mais qui s’estompaient déjà, comme un vieux souvenir, comme un rêve qui s’échappe dans la brume du matin, qu’on ne peut déjà plus retenir – puis ces notes, qu’il entendait, ce contact qu’il sentait. Il ouvrit lentement les yeux, découvrant au-dessus de sa tête un ciel infiniment bleu. Qu’est-ce qu’il… ? Prenant appui sur ses mains, il s’assit en secouant la tête pour tenter de remettre un peu d’ordre dans ses pensées éparses, incompréhensibles. Lorsqu’il leva les yeux, il sut qu’il n’y parviendrait pas. Mais cela n’avait plus aucune importance. Un regard aussi pur que le firmament qu’il avait aperçu en ouvrant les paupières le fixait, abasourdit, presque choqué. Aussi choqué que lui, qui se rappelait peu à peu – bribes, souvenirs égarés de douleur, de solitude, de souffrance, mais aussi d’un bonheur infini, si pur qu’il ne voudrait – qu’il ne pourrait – jamais oublier. Un sourire colora délicatement le visage du façonneur de neige qu’il avait en face de lui. Riku ouvrit la bouche, voulu dire quelque chose, mais l’autre fut plus rapide. Un cri de joie couvrit totalement le délicat chant du peuple, assis non loin d’eux. Des pas, pressés, comme une course, un impact sourd. Ils dérapèrent sur un mètre, peut-être un peu plus, tant et si bien qu’ils finirent en bas de la souche, dans une épaisse couche de neige. L’argenté n’en eut pas cure une seule seconde. Il était bien trop occupé à serrer contre lui le plus précieux trésor qu’il possédait en ce monde. Sora. |
| | | Laemia Vincent-Jean-Hubert
Messages : 706 Date d'inscription : 22/05/2012 Age : 27 Localisation : Dans ton C... Cauchemar. Je suis un Avale-Rêve, coucou.
| Sujet: Re: Partage des cadeaux - Event de Noël 2012 Dim 27 Jan - 12:02 | |
| Titre : D'andouilles et de mauvais karma Monde : Canon... Plus ou moins Genres : Humour, Friendship Personnages : Lea, Isa, Ansem, Ienzo, le Narrateur Pairing : Lisa \o/ Statut : Complet Disclaimer : Le Narrateur m'appartient Rating : T Résumé : Quand Lea et Isa rencontrent Dieu. PARDON NUITY POUR LE RETARD. T_T Je m'excuse à plat ventre. Ce truc m'a donné du fil à retordre et en plus c'est même pas si bien que ça. C'est un gros WTF avec des traits d'humour bien grossiers, ahah. Enfin, j'espère que ça te plaira un minimum quand même. :B
Il était une fois, une jeune fille que sa méchante belle-mère et ses deux affreuses sœurs tuaient à la tâche tous les jours depuis la mort de son pauvre père (le narrateur soupçonne d'ailleurs la marâtre de l'avoir cruellement assassiné mais ce fait ne sera jamais prouvé). On l'appelait Cendrillon (la jeune fille, pas son père) et, malgré ses malheurs, elle se montrait de la plus douce des natures car elle espérait qu'un jour ses rêves deviendraient réalité. Ce texte ne raconte pas son histoire.
Mais allons plutôt nous intéresser à deux protagonistes bien plus amusants qui vivaient à quelques mondes de là, dans une ville nommée le Jardin Radieux. Nous pourrions nous appesantir quelques instants sur ce nom fort intriguant (ou pas d'ailleurs, tout le monde s'en fout comme de l'an 40 avant Kingdom Hearts). Jardin... je ne vois pas. Moui, il y a quelques fleurs ici et là, mais serait-ce suffisant pour qualifier cette ville de Jardin ? C'est pas une jungle non plus, faut pas déconner. Radieux, par contre, ça faisait référence à la Lumière emplissant ce monde et le cœur de ses habitants, sans oublier la paix sans égal qui y règnait depuis toujours, donc c'était déjà plus compréhensif. Oui, c'est niais, oui. Enfin, c'est un détail puisque bientôt il sera renommé la Forteresse Oubliée après l'attaque des Sans-Coeur envoyés par le Sans-Coeur de X... Oups, le narrateur s'égare.
Bref, dans ce Jardin – ou Jungle, ou Ville, ou ce que vous voulez – Radieux (ahem) vivaient deux jeunes garçons (AHEM) qui se prénommaient élégamment... Oh puis non, je vais pas vous le dire tout de suite. C'est juste trop drôle. Commençons l'histoire.
Assis sur un banc, en train de ne rien f... de procrastiner, se trouvaient donc nos deux protagonistes. Le premier paraissait dans une intense réflexion philosophique au sujet de la vie, de l'univers et de tout (quelqu'un pourrait quand même lui dire que la réponse est 42...). Il paraissait donc intelligent - en tout cas un peu plus que son compère dont nous parlerons peu après – et... relativement misanthrope. La nature avait doté ce charmant jeune homme de longs cheveux bleus qui lui avaient déjà valus de nombreuses moqueries, surtout à l'école maternelle (les enfants sont des choses cruelles et dégueulasses, on ne le répétera jamais assez). Heureusement, ces années de persécutions avaient eues pour effet de développer chez lui un système d'auto-défense qui compte sans doute parmi les armes les plus puissantes de la terre : l'ironie. Cela lui avait également valu de se trouver un ami présentant, de façon étonnante, des caractéristiques proches des siennes, bien qu'ils soient totalement opposés sur plusieurs points.
Le second protagoniste, donc, était doté de cheveux orange vif. Si, si. Et encore, ce n'est pas le pire. Cette chevelure rousse pétante ne semblait avoir jamais vu un peigne de sa courte vie – au grand damn de la mère de notre ami, qui a pourtant tout essayé pour dompter la bête – et se dressait donc fièrement au-dessus de la tête souriante de son propriétaire. Aux côtés de son compagnon d'infortune, celui-ci paraissait un peu... lent. Ou un peu con, si vous tenez vraiment à dire les choses franchement. Bon, nous n'irons pas jusque là, d'ailleurs nous ne sommes pas ici pour juger – quoique. Disons juste que ce garçon ne tenait pas en place plus de dix minutes, qu'il lui fallait sans cesse trouver une nouvelle occupation car il se lassait vite des choses (sauf de son meilleur Koupain ici présent, qui l'accompagnait malgré lui dans ses conneries depuis qu'ils portaient des couches). Il se battait avec des plaques de pizzas décorées au Stabilo (bon okay, cette blague n'est pas de moi, mes excuses) et... Se battre contre quoi, vous dites ? Eh bien, contre les créatures ayant infiltré son magnifique monde il y a quelques temps – et aussi contre un blondinet rencontré peu de temps auparavant – et qui ne sont pas le thème principal de cette histoire.
Le rouquin, lassé de ne rien faire et d'écouter son ami penser, s'étira et bâilla en faisant le plus de bruit possible.
« Je m'ennuie, Isa ! cria-t-il dans l'oreille de la chose bleue.
-Que veux-tu que j'y fasses, Lea ? » soupira l'autre.
Je vous JURE que ce sont des garçons. En tout cas, c'est ce qu'on dit, mais le narrateur, votre serviteur, est trop facilement impressionnable pour aller vérifier. D'ailleurs, ceci est la seconde raison de leur exclusion sociale : leurs prénoms de mer... euhm, leurs prénoms passables, dirons-nous. C'est bête, hein ? Si ça se trouve, ces jeunes gens sont pleins de qualités humaines que les autres ne découvriront jamais parce qu'ils s'arrêtent à leurs noms débiles. Enfin, on n'est pas ici pour prôner la tolérance non plus, donc on peut dire que c'est de leur faute. Ils n'avaient qu'à pas s'appeler comme des meufs, aussi.
Le narrateur vient de se rendre compte que la relation de nos deux personnages – qu'on aime beaucoup malgré leurs défauts, hein – n'a pas encore été expliquée. Ils se sont rencontrés en maternelle, et se sont vite rendus compte qu'ils étaient stigmatisés (page 142, Larousse 2012) pour le même genre de conneries. Au début, c'était donc une alliance presque forcée contre leurs persécuteurs. Et puis, Lea a continué à suivre Isa partout et ils sont devenus unis comme les deux doigts de la main - d'un mec qui a pas eu de chance dans la vie pour n'avoir que deux doigts – et entretiennent une relation presque fusionnelle de part leurs ressemblances et leurs différences prononcées.
Ils sont peut-être amoureux l'un de l'autre, ou pas. Ce qui les empêche de chercher plus loin est la peur de perdre le peu de virilité qui leur reste. Parce que oui, quand on réfléchi un tant soi peu aux choses de l'amour et qu'on se montre sensible, on n'est pas un vrai homme, c'est bien connu. Prenez exemple sur les choses aux prénoms étranges, messieurs, ne montrez pas vos sentiments !
Reprenons notre histoire.
Le dénommé Lea (on ne rit pas !) se leva d'un bond pour crier son désespoir au ciel pluvieux de cet après-midi d'automne (notons que le froid ne l'empêche pas de se balader en manches courtes et en bermuda... sûrement un truc de roux).
« C'est nul les vacances ! Y'a tellement rien à faire dans cette ville !
-Je crois que t'es le seul mec que je connais et qui arrive à nous casser les oreilles toute l'année à prier pour que les vacances arrive, pour se plaindre ensuite de ne pas être en cours... répliqua Isa, fatigué des jérémiades de son ami.
-Ah, mais je veux pas aller en cours non plus !
-Faudrait choisir...
Mais t'es débile ou quoi, Isa ?
-C'est celui qui dit qui est...
-J'aime les vacances, mais je les préfères quand j'ai quelque chose à faire ! »
On ne dira rien. Toujours assis sur le banc froid, Isa songeait très sérieusement au suicide. Ou au meurtre. Il a un mental très instable, cet enfant, il faudrait le surveiller. En même temps, s'il fallait le psychanalyser, je dirais que tout ses troubles sont dû à son hyperactif de -ahem- meilleur ami. Et là, la question que l'on est en droit de se demander est « Mais pourquoi il le laisse pas tomber, alors ? Il doit bien y'avoir d'autres rouquins avec un nom étrange quelque part ! ». Eh bien, je répondrais que l'amour peut faire faire des choses étranges. Je pourrais insinuer ou ne pas insinuer ce que vous pensez.
Mais vous vous demandez certainement à quoi rimes tout cela. « Ouais, c'est bien beau de nous présenter des ahuris aux cheveux douteux et qui se font chier par un moche après-midi d'automne – et encore, il ne pleut pas ! - et après? Il est où, l'intérêt, à part m'empêcher de voir pour la sixième fois le neuvième épisode de Derrick ? » Chers gens, lâchez votre inspecteur retraité, l'histoire qui va suivre est bien plus passionnante ! Elle ne parle peut-être pas de dragons, d'anneaux magiques, d'elfes, de nains et de gens encore plus petits que des nains, mais vous allez voir, c'est plus drôles. On a un truc que ces histoires n'ont pas : des héros paumés. Quoique... Oui, mais nos héros à nous ils ont les cheveux bleus et oranges ! Nah !
Et donc, vous vous doutez bien qu'ils auront une idée fabuleuse pour tuer l'ennui.
Ce fut en regardant autour de lui que Lea trouva la solution qui allait le sauver d'une mort lente et douloureuse – bon, n'exagérons rien tout de même. Il leva les yeux vers la ville et vers le château qui se dressait fièrement en hauteur. Ce fut à cette instant que le déclic se fit dans son cerveau de roux.
« Je sais ! fit-il en prenant son ami par la main (oh, c'est-y pas mignon?) pour le faire lever ses grosses fesses de fainéant. On va essayer d'entrer dans le château. »
Isa le dévisagea d'un air blasé.
« Vas-y tout seul, sortit-il d'une voix monocorde.
-Quoi ?
-T'as très bien compris, roukmoute. Je te suivrais pas.
-Mais Isaaaaa ! Geignit son compagnon avec un regard de chiot (roux) battu. Comment tu peux me laisser tomber ? Puis c'est notre rêve, ce château !
-Je dois te rappeler ce qu'il s'est passé la dernière fois qu'on a essayé d'y entrer ? Je dois vraiment te rappeler les alligators de noël ?
-Nan, c'est bon ! Le coupa Lea.
-On s'est fait poursuivre par les gardes sur deux-cents mètres, t'as trébuché sur une guirlande de noël qui traînait par là, t'as perdu ton pantalon et...
-C'est bon, je t'ai dit ! Bon, on a un peu foiré la dernière fois, mais...
-Un peu ?! S'étouffa le bleu (mais non enfin, je parles de ses cheveux, soyez pas bêtes!). On a failli se faire tuer ! Puis c'était ta faute, ne m'inclus pas là-dedans.
-Comment je pouvais prévoir que les reptiles se baladaient en liberté ? »
Vous mourez d'envie de savoir le fin mot de cette histoire. Vous le saurez peut-être ou peut-être pas, mais c'est une autre histoire. Laissez-moi vous en apprendre un peu plus sur ce château. Là-bas vivaient Ansem le Sage qui régnait sur le Jardin Radieux et ses apprentis. Personne, mis à part ces derniers, n'avaient jamais vu le vrai visage d'Ansem et personne d'autre n'était autorisé à entrer dans le château. Lea et Isa étant les fauteurs de troubles que nous connaissons désormais relativement bien, ils avaient tentés d'y entrer pendant des années. Quarante-deux fois plus précisément. Intérêt ? Satisfaire leur curiosité en premier lieu, passer le temps en second lieu. Et après tout ce temps dépensé, toute cette énergie mise au service de cette entreprise, le château avait fini par devenir leur rêve commun.
« Va te faire mettre, j'irais pas. »
Quelle poésie, Isa ! Brillant, vraiment. On devrait décerner le prix de la langue française à ce jeune homme.
« Et si je trouve un moyen imparable de s'y infiltrer, tu me suis ?
-Même pas. J'en ai marre de tes coups foireux.
-Mais bien sûr que si, tu vas venir, rétorqua Lea avec un grand sourire.
-Et pourquoi ça, je te prie ?
-Tu viens toujours. »
Touché. Et il ne pouvait même pas nier. Franchement, il se demandait ce qui le retenait d'étrangler ce fourbe de rouquin. Enfin, il avait besoin d'un bouche-trou, non ? Ouaiiiis, voilà, c'est ça ! C'était l'unique raison pour laquelle il restait à ses côtés. Bien sûr. C'est beau, l'auto-persuasion.
« Mais t'as un plan, au moins ? Capitula Isa en croisant les bras.
-Ca va venir.
-Hum. »
Il n'y croyait pas trop, mais attendit tout de même tandis que son ami paraissait en grande réflexion. Il s'était accroupi sur le sol et dessinais des schémas compliqués dans la poussière à l'aide d'une brindille. Puis...
« Je sais ! s'écria-t-il soudain en se relevant, un sourire idiot fiché sur les lèvres. File-moi tes chaussettes !
-...
-...
-Pardon ?
-Passe-moi tes chaussettes, répéta Lea. S'il te plaît.
-Pourquoi je ferais ça ?
-Parce que j'en ai besoin pour mon plan génialissime ?
-... Tu peux pas prendre les tiennes ?
-Je peux, mais je suis celui qui a élaboré le plan alors que tu t'es tourné les pouces. Donc tu vas enlever tes chaussures puantes et me filer tes chaussettes, merci.
-Qu'est-ce que tu vas en faire ?
-Tu verras. »
Et donc notre gentil soumis d'Isa retira gentillement ses baskets et tendit ses chaussettes dégueulasses au roux, qui parut ne pas s'offusquer de ce détail.
« Super, maintenant suis-moi. »
Le bleu (c'est ses cheveux ! Non, il ne s'est toujours pas transformé en schtroumpf en cours de route) emboîta donc le pas du rouquin qui se dirigeait en direction du château, en faisant attention de ne pas se faire repérer par les deux gardes qui gardaient l'entrée de l'immense porte. Tiens, d'ailleurs, le narrateur tient à signaler qu'il ne comprend pas l'intérêt d'ériger des portes de plusieurs mètres de haut lorsque ceux qui y vivent ne sont pas des géants mais des être tout à fait normaux qui ne dépassent pas les deux mètres de hauteur (et encore, même ça c'est exceptionnel) à tout casser. Votre serviteur ne se souvient plus ce qu'il en est exactement dans ce château-ci et a la flemme de vérifier, mais il se souvient qu'au Château Disney, dans un monde très très lointain, la porte qui mène à la salle du trône est encore plus énorme que celle-ci et qu'une mini-porte y est découpée pour plus de praticité. Sérieusement, intérêt ?
Bref.
Il se planquèrent donc en bas des escaliers menant à la plate-forme où se trouvait le château.
« Génial, et maintenant ? Demanda Isa.
-Attend ici », fit Lea avec un sourire qui n'annonçait rien qui vaille.
Il se précipita hors de son abri, les chaussettes à la main, et son ami se demanda ce qu'il pouvait bien avoir en tête au juste. Les faire renifler aux gardes pour leur faire perdre connaissance ? Il aurait plutôt dû utiliser les siennes, alors...
Mais ce ne fut pas ce que fit le rouquin, bien que cette solution aurait eu des chances de fonctionner – et serait moins coûteuse pour les vêtements de notre bleu (non, pas le fromage, non... Suivez, un peu!). Parce que NON à la place d'un plan sain et équilibré, notre idiot favori (ou pas, ahah ! Roh, mais si, on l'aime, Lea, surtout vu tout ce que lui et son Simili endureront... Oups, spoil) fera donc une chose, eh bien, égale à lui-même. Il posa les chaussettes sur le dallage, à quelques mètres de là, et sortit son briquet, qu'il portait toujours sur lui. Isa poussa un juron (bouh le vilain) en se rendant compte qu'il avait omis de prendre en compte les tendances pyromanes de l'autre. Merdouille.
Lea regarda un moment le feu prendre sur les chaussettes, en sourire inquiétant aux lèvres, puis revint se cacher aux côtés de son ami.
« Ca servait à quoi, ça ?! S'emporta le bleu (oh, non, j'ai la flemme de trouver un jeu de mot, là).
-Tu vas voir... »
En effet, il vit. Peu de temps après, alertés par la fumée et par l'odeur, les gardes quittèrent leur poste pour voir de quoi il retournait.
Je suppose que vous voulez une disgression sur ces fameux gardes. Si, vous en voulez une, ce n'était pas une question. Attendez, le temps que le narrateur prenne ses notes... Ah, voilà ! Visiblement, les fameux gardes étaient aussi des apprentis du Grand Ansem le Sage (et modeste, avec ça), sauf qu'ils... Bah, montaient la garde, justement, et ce toute la journée. Mais dans ce cas, quand trouvaient-ils le temps d'étudier ? Hum... Bref, ils portaient les doux noms de Dilan et Aeleus. Le truc, c'est qu'ils étaient tous les deux des espèces de colosses pleins de muscles (mais pas stupides pour autant, ou en tout cas moins que notre Lea intermondial, puisque le Simili d'Aeleus résoudra un casse-tête dans le manga 358/2 Days... Ahem). Ce qui me fait penser, c'est sans doute pour cela que leur seigneur et maître les a assignés à la protection du château. Ahah, imaginez un peu les deux scientifiques en soif de connaissances qui entrent au service du l'esprit le plus intelligent du monde (du moins, à ce qu'on dit) pour... se retrouver à camper devant une porte des heures durant. Ceux qui pensent qu'Ansem le Sage n'a pas d'humour sont des rabat-joies.
Mais le narrateur s'emporte ! Il ne faut pas lui en vouloir, il a rarement eu à faire à un monde comportant un tel nombre de spécimens étranges. Avant, il était affecté à la forêt des nains et, à part la cruchotte qui parle aux animaux et la mégalomane de reine qui a un gros complexe de supériorité latent, les autres habitants se montraient plus ou moins normaux. Et ennuyeux.
Une fois les gardes détournés de leur poste, Lea fit signe à Isa de le suivre et ils coururent le plus vite possible vers la grande porte et y pénétrèrent (je sais que ce verbe vous fait rire, bande de petits vicieux ! Eh bien non, il est employé de la manière la plus innocente qui soit, ici!) le plus vite possible.
Isa s'assura que la porte était bel et bien fermée avant de s'autoriser à relâcher sa vigilance. Puis le constat fit battre son cœur un tantinet plus vite. Il se trouvaient dans le château. Ils avaient réussi à y entrer. Pour de vrai. Pour peu, il en aurait embrassé Lea et aurait même admis que ces plans ne manquaient pas d'astuce, parfois, sauf que... Lorsqu'il jeta un œil autour de lui, toute pensée cohérente le quitta.
« Waouh... » fit Lea tandis qu'Isa se demandait s'il devait être émerveillé ou effrayé.
Le couloir qui se présentait à eux agressait les rétines de nos deux compères plus sûrement que deux heures de visionnage de Nyan Cat. Décoré de couleurs psychédélique en tout genre, on distinguait à peine les portes des murs. Et ces formes... Tantôt des spirales, des carrés, des spirales de carrés, des dessins d'enfants, des portraits de clowns tristes...
« Où est-ce qu'on est tombés ? souffla finalement Isa.
-Je sais pas, mais c'est trop cool ! »
Il aurait dû s'en douter, que son ami apprécierait ce décor flippant plus que raison.
« Je... Crois qu'on ferait mieux de sortir, objecta le bleu (il s'agit bien de ses cheveux, le changement de décor ne l'a pas métamorphosé en Navii).
-QUEWA ?! Après tout le mal qu'on s'est donné pour entrer ici ? Mais t'es malade mon pote !
-Ouais, mais...
-Mais ?
-Nan, rien. » Il préférait ne pas avouer que la décoration le mettait plus mal à l'aise qu'il ne l'aurait voulu. Cela ressemblait au corridor d'une maison de l'horreur... ou à un cirque déjanté. Non, vraiment, il n'aimait pas ça.
« Bon, on bouge ? » s'impatienta Lea, fébrile comme un gosse.
Ce fut à cet instant qu'une voix de véritable gosse se fit entendre.
« Qui êtes-vous ? »
Devant eux se trouvait soudain un petit garçon qui portait une blouse blanche et dont la moitié du visage était masquée par une mèche de cheveux ardoise. Isa fit un bond en arrière, au grand amusement de Lea.
« Voyons Isa, t'as pas peur d'un gamin, quand même ?
-Mais... Il est apparu comme ça ! Il était pas là, y'a trois secondes ! »
Le roux ne l'écouta pas. Il fit un grand sourire à l'enfant, qui afficha un air impassible. Il tenait dans ses bras un ours en peluche avec une coupe punk et une mini-guitare.
« Bonjour, mon grand ! Dit Lea. Dis, ça t'embêterais de faire comme si tu ne nous avait pas vu, hm ?
-Qui êtes vous ? » répéta le gamin.
Flippant, vraiment. Les deux compères échangèrent un regard.
« On est, euh... Des agents secrets ! Oui, voilà ! On ne te veux aucun mal, je te jure, mais ce serait bien pour notre mission que personne ne sache qu'on est là. »
Un grand silence s'ensuivit, durant lequel personne ne bougea. Isa songeait sérieusement à repasser la porte, quitte à se faire massacrer par les gardes qui devaient certainement avoir éteint le feu depuis un bon moment. Puis, l'enfant parla à nouveau :
« Venez jouer avec moi, sortit-il de son ton beaucoup trop calme qui fit frissonner le bleu.
-Euhm... On est un peu occupés, là, mais plus tard, d'accord ?
-Sinon je dis à mon papa que vous êtes là.
-Qui c'est, ton papa ?
-Ansem. »
En vérité, pas vraiment, il l'avait juste recueilli, mais ça nos deux héros ne le savaient pas. Et puis, cela ne faisait aucune différence. Je suis certain que ce petit garçon flippant vous intrigue tous. Eh bien, il s'agissait d'Ienzo, enfant surdoué et dernier apprenti d'Ansem le Sage. Sans doute le plus brillant, aussi, malgré son jeune âge. Enfin, on dit toujours que les esprits les plus géniaux sont les plus dérangés. Et c'est ce que vous verrez très prochainement, puisque, évidemment, Lea et Isa n'eurent d'autre choix que d'accepter l'offre du gamin. Celui-ci leur intima de le suivre et ouvrit une porte, la première qui passait par là, les laissant entrer. Le décor y changeait radicalement, mais il n'était pas moins stressant. Même Lea ne semblait pas spécialement partisan de la pièce.
Et pour cause, les murs, le sol, le plafond, tout était d'un blanc immaculé. Même le lit discret qui reposait dans un coin de la pièce immense. Au centre se trouvait une petite table en plastique comportant des tasses, une théière et des gâteaux en plastique. Autour étaient attablés des peluches qui firent frissonner Isa : un clown au grand sourire de pédophile, un mog tout déchiré, couturé, à qui il manquait un œil et une oreille, et enfin l'ours en peluche punk que Ienzo venait de poser là. Sur un mur, un tableau noirci d'équations compliquées était accroché.
Isa n'aimait pas du tout cette histoire. Bordel, ils ne pouvaient pas tomber, au moins, sur un gosse mentalement équilibré ? Non, ce serait trop facile. Puis, Isa possédait un mauvais karma qui ne lui laissait aucun répit et qui faisait de sa vie une immense blague qu'il trouvait, personnellement, de très mauvais goût. La preuve, même son âme sœur lui en ferait voir de toutes les couleurs pendant son existence entière puisque, oh malheur, il s'agissait du sale rouquin que s'attablait à présent avec Ienzo pour faire semblant de prendre le thé. Bordel.
« Viens t'asseoir Isa, voyons ! lui lança ledit rouquin. Ne fais pas attendre notre hôte. »
En effet, ce serait... dangereux. Il ne savait pas trop, à la réflexion, ce que ce garçonnet pourrait bien lui faire, mais il préférait ne pas le savoir. Alors il fit ce qu'on lui disait, docilement, et vint prendre place à côté de l'ours – qui s'appelait Myde, si vous voulez tout savoir, et qui était la plus précieuse possession d'Ienzo à ce jour.
Celui-ci se sentit obligé de faire la conversation à ses invités.
« Vous savez, j'ai lu un essai très intéressant sur l'infinité de l'univers, dernièrement. Qu'en pensez-vous, Clowny ? Oh, intéressant ! Et vous, Lea ? »
Celui-ci échangea un regard perdu avec Isa. Bon sang, qu'est-ce que c'était que ce gosse qui lisait des choses pareilles à son âge ? Même le bleu, pourtant premier de sa classe, en serait tombé par terre. Le roux eut un sourire mitigé.
« Euh... Que... Ben... Le dernier bouquin que j'ai lu, moi, c'était Oui-oui au pays des jouets et... Enfin, c'était marrant. »
Ienzo se contenta de le dévisager en silence, puis enchaîna en racontant ce qu'il venait d'apprendre dans ce livre. Parfois, il interrogeait ses peluches pour une réponse – en évitant Myde, la plupart du temps – et prenait leur silence pour un approuvement. Quand il demandait ce qu'ils en pensaient à nos deux héros paumés, en revanche, leurs réponses complètement à côté de la plaque semblaient le dépiter encore plus, si bien qu'au bout d'un moment, il s'exclama :
« Mais c'est pas vrai ! Vous êtes encore plus bêtes que Myde ! »
La peluche se contenta d'un sourire figé. Sans doute avait-elle peur de ce que son propriétaire pourrait lui faire si elle osait protester.
« Euhm, répondit Isa, je crois qu'on va s'en aller, alors. Nous vous laissons à vos discussions intelligentes.
-Vous restez, asséna Ienzo d'un ton qui ne se laissait pas contredire. Sinon...
-Bon, d'accord, dénonce-nous ! s'impatienta Isa en levant les yeux au ciel. Ca ne fait rien, mais nous, on ne veux plus jouer ! »
Il faisait un mouvement pour se lever quand le petit garçon sortit une télécommande de sa blouse et appuya sur un bouton. Aussitôt, l'un des murs se releva, laissant apparaître une grande cage où se trouvaient... Trois alligators en parfaite santé. Pas n'importe lesquels, non ! Des alligators avec un costume et un bonnet de Père Noël. Le sang d'Isa ne fit qu'un tour. Il s'agissait des mêmes alligators de Noël qui les avaient poursuivis la dernière fois qu'ils avaient tentés de pénétrer (non, je ne ferais PAS de blague sur ce verbe) dans l'enceinte du château.
« C'était toi... » murmura-t-il en frissonnant.
Eh oui ! Pendant tout ce temps, ils ne le savaient pas, mais il s'agissait d'Ienzo qui avait lâché les reptiles sur eux, faisant échouer leur tentative ! Oh, pas intentionnellement, non...
« Si vous partez, je lâche mes toutous sur vous » annonça-t-il paisiblement.
En vérité, la dernière fois, il avait entendu de la bouche d'un autre apprenti, Even (un vieux complètement taré chargé de veiller à ce qu'il ne fasse pas trop de bêtises), que les animaux de compagnie nécessitaient que l'on en prenne soin. Cela signifiait donc, les laisser se promener à l'air libre. Ienzo avait ouvert la cage et fait sortir ses bestioles. Il avait fallu des heures pour que Dilan et Aeleus les ramènent dans leur cage sans perdre un bras, et Even avait menacé de les jeter dans la cuvette des toilettes la prochaine fois qu'il les laisserait sortir de sa chambre.
« Ils ont besoin d'exercice, poursuivit-il. Et de viande fraîche. Alors ?
-Tu... Tu n'es pas sérieux, si ? tenta Lea. Allons, laisse-nous partir gentiment et...
-Non ! S'emporta alors Ienzo en tapant du pied par terre. Vous restez sinon je lâche mes toutous et ils vont vous transformer en caca ! »
… Putain. Dans quoi ils s'étaient encore embarqués ? Ils allaient soit être détenus pour l'éternité par un sale gamin surdoué et misanthrope ayant une passion pour les reptiles, soit se faire bouffer par lesdits reptiles.
Alors même qu'Isa formulait cette pensée, une chose extraordinaire vint bouleverser leur destin. Bon, n'exagérons rien tout de même, mais ce fut exactement ce que pensa notre bleu favori lorsque la porte de la chambre s'ouvrit sur un homme en apparence normal – ouf, enfin quelque chose d'ordinaire dans cette aventure de malade ! - blond, avec une légère barbe, une blouse de scientifique et une écharpe rouge très longue (pour pas attraper froid, vous comprenez, même s'il ne quittait jamais son château).
Vous aurez, puisque vous êtes des lecteurs particulièrement perspicaces (et aussi parce que vous avez joué au jeu) deviné de qui il s'agissait. Seulement, laissons encore un peu plus d'indices à nos gentils garçons aux prénoms de fillettes.
L'homme parla d'un voix qui ne laissait pas place à la discussion.
« Ca suffit, Ienzo, laisse ces jeunes fil... hommes tranquilles.
-Mais papa ! Protesta le gosse. Ce sont mes invités et ils sont bêtes comme pas permis ! Dis-leur de devenir intelligents ! -Non.
-Pourquoi ?
-Parce qu'on a besoin de rire, dans la vie, et que ces deux-là sont un de mes divertissements favoris. Allez, ce sont mes jouets, rend-les moi.
-Maiiiis !
-Je t'en achèterais d'autres. Des mieux, et plus malins. Je te sortirais le fantôme de Sigmund Freud des Enfers, si tu veux. Oncle Hadès voudra bien faire ça pour toi. »
La proposition parut satisfaire l'enfant qui se contenta de hocher la tête en serrant Myde contre lui (un jour, cet ours deviendra un Simili suite à un caprice de notre jeune psychopathe et sera aussi peu futé qu'il l'aura prédit). Ans... Hum. L'homme demanda alors à nos idiots favoris de le suivre, mais Lea étant la personne qu'il est (ROUX ! ROUUUUX!!!), il commença à protester.
« Mais c'est quoi, cette histoire, à la fin ? s'énerva-t-il. Enfin, tu vas pas le suivre, Isa ? On sait même pas ce qu'il nous veut !
-T'as bien suivi le gosse et pourtant tu savais pas non plus ce qu...
-C'est pas pareil ! Puis je sais pas pour toi mais j'aime pas trop ce qu'il a dit sur nous ! »
Pour toute réponse, Isa le frappa derrière la tête (violent, ce garçon... Je pense qu'on devrait appeler un psychologue, au moins pour lui et Ienzo) et lui chuchota pour éviter qu'on ne l'entende :
« Fais ce qu'on te dis, espèce d'idiot ! Une fois qu'on sera sortis de là et certains de ne pas être donnés en pâture à des alligators, on avisera, d'accord ? »
Cet argument paru convaincre le roux (à moitié, en fait, mais le regard meurtrier de son meilleur ami le fit se taire) et il suivit docilement le scientifique.
En sortant, ils virent que le couloir avait changé d'apparence et se composait désormais (plafond et sol compris) de carrelage à damier blanc et noir. Isa, commençant à se sentir blasé par tous ces trucs complètement déments, ne daigna même pas feindre la surprise, ni poser une question sur le pourquoi du comment. Cela ne servirait à rien de savoir, de toute manière, sinon à l'embrouiller davantage. Il estimait avoir eu sa dose pour ce jour-ci.
Le château... Qui aurait crû qu'il se passait des choses si louches à l'intérieur ? Pendant tous ce temps, lui et Lea n'avaient rêvés que d'y entrer, sans se douter de ce qu'ils trouveraient à l'intérieur. Pourtant, malgré les apparences et ce que nous avons vu durant cette aventure, le Jardin Radieux était réputé pour être un monde plutôt ordinaire (si, si) et très respectable. Un peu comme une capitale, pour les mondes environnants. Le palais du maître d'un tel monde ne pouvait pas être aussi... aussi... Voilà.
Eh bien, si. Bête, non ? En tout cas, le narrateur, ça le fait bien marrer. Et Ansem aussi, d'ailleurs. Oui, bon, le suspens n'est plus de mise, tout le monde a compris qu'il s'agissait d'Ansem le Sage. Même Isa a fini par le déduire de ses réflexions à deux francs. Lea, en revanche, avait encore un peu de mal, mais tant pis pour lui. Il n'avait qu'à pas être roux et puis voilà. Le narrateur allait sans doute se faire frapper par des fangirls en furie pour avoir dit ça, d'ailleurs, mais peu importait. Il avait très envie de terminer cette histoire pour rentrer chez lui et aller dîner avec sa famille. Seulement voilà, jusqu'à la fin de l'aventure de nos compères, il était coincé là à devoir vous raconter le moindre détail de cette charmante expédition. Et puis, s'il continuait à changer de sujet comme ça, il n'allait jamais en finir.
Ansem les conduisit donc dans une autre pièce... Blanche également, décidément. Sur un pan de mur se trouvaient d'innombrables écrans de télé diffusant tous une image différente, que les garçons ne purent pas bien voir de là où il se trouvaient. Ansem prit place sur un fauteuil roulant au centre de la salle et les dévisagea de toute sa majestique personne.
« Des questions ? Se contenta-t-il de demander sans autre forme de discussion.
-Qui êtes-vous ? Se précipita Isa, saisissante l'occasion.
-Je suis Ansem le Sage, répondit Ansem. Et si ce narrateur cessait de faire des répétitions aussi lourdes, je lui en serait gré.
-Hein ?
-Non, rien. »
Isa n'insista pas. A côté de lui, son roux d'ami tomba par terre. Littéralement. Tiens, alors il n'avait réellement pas compris...
Pour dire ce qui est, Lea n'était pas vraiment stupide. Pas dans le sens où on l'entend, du moins. Le narrateur a beau faire des blagues de mauvais goût sur le vide entre ses oreilles, tout cela n'est pas totalement exact. En vérité, il a autant de cellules grises que notre bon ami Isa (peut-être même plus, qui sait ?) seulement... Eh bien, ce n'est pas qu'il ne sait pas s'en servir, c'est surtout qu'il ne veut pas. Car Lea est encore pire que stupide, voyez-vous, il est fainéant. Oui, messieurs dames. Aussi, lorsqu'il a dû choisir entre réfléchir et agir, il a préféré ne pas devenir un légume dégueulasse et conserver sa mobilité. Donc, cela fait un moment qu'il ne réfléchit plus. Parce qu'il a la flemme. Inutile de se demander, donc, pourquoi il n'avait pas percuté depuis longtemps l'identité de leur hôte.
« Mais ce n'est pas ce que je voulais dire, précisa le bleu. En fait, j'aurais dû demander : Qu'est-ce que vous êtes, au juste, Ansem le Sage ?
-Je ne vois pas de quoi tu veux parler.
-Oh, non, c'est bon, ne nous prenez pas pour des cacahuètes ! Le fait que personne ne vous ai jamais vu, ce château bizarre qui change de déco, le fait que vous parliez de nous comme si on était des choses, et aussi que vous connaissiez Hadès – et oui, j'ai étudié la mythologie, je sais de qui il s'agit ! Sérieusement, qui êtes-vous ? »
Ansem, toujours aussi calme, se leva, un léger sourire aux lèvres, leva les bras au plafond, et toute la lumière divine sembla soudainement éclairée la pièce lorsqu'il déclara très solennellement :
« Je suis Dieu.
-...
-...
-Non, mais sérieusement ?
-Je SUIS sérieux ! s'exclama le prétendu Dieu. Sinon, comment je pourrais entendre le narrateur douter de ma légitimité ? D'ailleurs, je peux le supprimer dès que ça me chante. »
Oups. Le narrateur tiens à préciser à sa seigneurie qu'il pourrait au moins attendre la fin de l'histoire pour cela, sinon des lecteurs frustrés prendront d'assaut le château. Et tout le monde sait que le pouvoir des fangirls est plus puissant que la plus puissante des punitions divines.
En tout cas, Isa et Lea ne comprirent pas cette référence à la sublime personne de votre serviteur.
« Prouvez-le, si vous êtes Dieu, annonça très brillamment Lea.
-A tes risques et périls, mon garçon, soupira Ansem. Approchez donc. »
En disant cela, il s'avança vers les écrans de contrôle, et les deux amis (ou plus que ça, mais nous seront éclairés là-dessus très prochainement) en firent de même.
Ce faisant, ils purent enfin voir ce dont il s'agissait. Sur l'un d'eux, on voyait Ienzo lire une histoire à Myde, sur un autre une jeune blondasse lavait le sol sous l'oeil sévère de ses affreuses belles-soeurs. Sur un autre encore, deux petits garçons jouaient sur une petite île qui serait parfaite pour des vacances à la mer.
« Vous voyez, toutes ces personnes sont mes créatures. Je les aient créées moi-même. Plutôt réussies, non ? Bon, ok, certains ne sont que des prototypes, mais...
-Mais qu'est-ce qui nous prouve que tout ça est vrai ?
-Vous êtes ici. »
Il pointa un écran situé un peu en hauteur, qui les représentait en train de regarder la vie des autres sur l'écran d'Ansem. Ils se tournèrent dans tous les sens, mais furent obligés de reconnaître qu'ils ne voyaient aucune caméra dans la pièce.
C'en était trop pour Isa. De son point de vue, il ne venait pas de rencontrer Dieu. Pas vraiment. Non, l'homme qui se trouvait devant lui, c'était l'incarnation de son putain de karma de merde qui le tannait depuis la naissance.
« NON MAIS CA VA PAS DE JOUER AVEC LA VIE DES GENS COMME CA ! S'époumona-t-il, prit d'une colère inatendue chez lui. Mais sérieux, vous pensez à quoi quand vous créez vos jouets ?! Pourquoi moi, aussi, hein ?! Pourquoi il sont tous normaux sauf moi ?! Oh, non, tiens, ce n'est pas drôle de faire des gens qui se ressemblent, hein ?! Pourquoi j'ai des putains de cheveux bleus et un nom pourrave, hein ?! Ne prétendez pas que c'est à cause de la génétique ! Génétique mon cul ! C'est votre faute si j'ai une vie de merde depuis le début et que je me coltine ce débile encore moins chanceux que moi ! Alors, pourquoi ? »
Le sourire d'Ansem s'agrandit.
« Parce que je trouvais ça pas mal drôle. »
La colère d'Isa redescendit d'un coup pour laisser place à une énorme blasitude. Si, ce mot existe.
« Oh, ok, j'm'en fous, de toute façon. Vie de merde. »
Aujourd'hui, j'ai appris que ma vie ne servait qu'à divertir Dieu, qui est au passage un immense connard. VDM.
Il ne divertissait pas que Dieu, d'ailleurs. Oh, allez, vous, derrière vos écrans, vous ne pourrez pas nier que vous êtes en train de rire là maintenant tout de suite ! Ne me dîtes pas non. En ma qualité de narrateur (qui a arrêté de parler à la troisième personne, tiens donc) je suis aussi omniscient qu'Ansem. Je sais que vous adorez les malheurs de notre pauvre Isa.
Quant à Lea, il préféra poser une question autrement plus existentielle.
« Pourquoi on a qu'un seul écran pour nous deux ?
-Ah, ça, répondit Ansem, c'est parce que vous êtes des âmes sœurs ! »
Le visage d'Isa passa du rouge, au vert, au bleu (maintenant, on peut vraiment dire qu'il est bleu, ahah), au blanc.
« Je crois que je vais être malade...
-Non, rétorqua Ansem. Tu n'as pas le temps d'être malade car je vais vous expédiez à coup de pied au cul hors de mon domaine.
-Je serais malade plus tard, alors.
-Eh non ! C'est ça qui est fun. Quand vous sortirez d'ici, vous ne vous souviendrez de rien !
-C'est pour ça que vous ne sortez pas ? Questionna Lea.
-Bien vu. Ce serait dommage que j'oublie que je suis Dieu et que j'ai à disposition des créatures si amusantes pour m'occuper !
-Combien de fois est-ce qu'on a réussi à entrer ici ?
-Beaucoup. Evidemment, vous ne vous en souvenez pas, ce serait trop simple. Mais un jour, ça vous reviendra, ne vous en faîtes pas. Enfin, pas à vous exactement. Regardez, j'ai deux écrans déjà prévus pour vos Simili, et ils sont séparés cette fois ! Content ?
-Très, ironisa Isa. Est-ce que je peux oublier tout ce que je viens d'entendre sur moi étant l'âme sœur de ce crétin ?
-Comme tu veux, mais cette histoire finira tragiquement. Hum... Bref. Je vous shippais pas trop ensemble de toute manière. J'appelle Dilan et Aeleus. »
Une fois que leur énième tentative d'infiltration du château du Jardin Radieux eut échoué, Isa se demanda pourquoi il suivait toujours cet abruti de Lea dans ses plans foireux. En plus, il avait perdu une paire de chaussettes à cause de ça.
Peut-être parce que, cet abruti, il l'aimait plus qu'il ne voulait l'admettre, mais chut, c'est censé être un secret. |
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